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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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Au-delà des ronces, le vent faisait frémir les herbes marines. Un oiseau
hurla sur mon passage puis, ses ailes blanches déployées, se perdit dans le
ciel ensoleillé. La route serpentait et je me dirigeais donc directement vers
l’ancienne ville. C’était une ville romaine, mais rien à voir avec Glevum ou
Durnovarie, juste un ramassis de maisons basses en pierre, avec des toits de
bois flottants et d’algues séchées, où vivaient jadis les esclaves des
carrières : de bien misérables refuges, même pour les morts. La peur de ce
qui m’attendait en ville me fit défaillir, et une voix hurla soudain pour me
prévenir tandis qu’une pierre dévalait la pente, à ma gauche, depuis les
broussailles et allait se briser sur la route, à côté de moi. L’alarme fit
sortir des cabanes un essaim de créatures en guenilles venues voir qui
approchait de leur colonie. L’essaim se composait d’hommes et de femmes, pour
la plupart en haillons, mais d’aucuns, la tête couronnée de guirlandes d’algues,
portaient leurs loques avec un air de majesté et s’approchèrent de moi comme
s’il n’était de plus grands monarques sur terre. Quelques hommes portaient des
lances et la quasi-totalité étreignaient des pierres. Certains étaient nus. Il
y avait des enfants parmi eux. Des enfants petits, sauvages, dangereux.
Quelques adultes étaient secoués de tremblements impossibles à contrôler,
d’autres étaient saisis de convulsions, et tous me regardaient d’un œil vif et
vorace.
    « Une
épée ! fit un géant. J’aurai l’épée ! Une épée ! » Il
avança vers moi d’un pas traînant et ses acolytes le suivirent, les pieds nus.
Une femme lança une pierre et, soudain, toutes hurlaient de plaisir : une
nouvelle âme à dépouiller !
    Je tirai
Hywelbane, mais personne, ni homme ni femme ni enfant ne cilla à la vue de sa
longue lame. Sur ce, je pris la fuite. Il n’y avait pas de honte à ce qu’un
guerrier détalât devant les morts. Je regagnai la route et un fracas de pierres
atterrirent à mes pieds, puis un chien plongea ses crocs dans mon manteau vert.
Je me défis de la brute d’un coup d’épée, puis je gagnai le coude de la route
où je plongeai sur la droite, traversant les ronces et les broussailles pour
atteindre le flanc de la colline. Une chose se cabra devant moi, une chose nue
avec une figure d’homme et un corps de brute, hirsute et crasseux. L’un des
yeux de la créature était une plaie purulente, sa bouche une fosse de gencives
putréfiées, et il se jeta sur moi avec des mains aux ongles si longs et crochus
qu’on aurait dit des serres. Hywelbane s’abattit comme un éclair. Je hurlais de
terreur, certain d’affronter l’un des démons de l’île, mais mes instincts
étaient encore aussi tranchants que ma lame, qui sectionna le bras velu de la
bête et lui fendit le crâne. Je bondis par-dessus son corps et escaladai la
colline, sachant que j’avais à mes trousses une horde d’âmes faméliques. Une
pierre me frappa le dos, une autre ricocha sur la roche à côté de moi, mais je
jouais des pieds et des mains pour escalader les piliers et les corniches de rocher
avant de découvrir un sentier étroit qui serpentait comme les chemins d’Ynys
Trebes autour du flanc de la colline escarpée.
    Je me
retournai pour faire face à mes poursuivants. Ils hésitaient, enfin effrayés
par l’épée qui les attendait sur le sentier, où ils ne pouvaient s’engager
qu’un par un. Le géant me lança des œillades. « Petit, petit !
appelait-il d’une voix pateline, descends. » Il tendait un œuf de goéland
pour m’appâter. « Viens manger ! »
    Une vieille
femme releva ses jupes pour me montrer ses hanches. « Viens à moi, mon
amant ! Viens à moi, mon chéri. Je savais que tu viendrais ! »
Elle se mit à pisser. Un enfant rit et lança un caillou.
    Je les
laissai. Quelques-uns me suivirent le long du sentier, mais ils finirent par se
lasser et regagnèrent leur colonie fantôme.
    L’étroit
sentier menait entre le ciel et la mer. De loin en loin, une carrière
abandonnée où l’on apercevait encore les marques des outils romains sur les
blocs de pierre, mais, au-delà, le sentier recommençait à serpenter parmi les
touffes de thym et les bosquets d’épineux. Je ne vis personne jusqu’à ce que,
soudain, une voix me héla depuis l’une des petites carrières. « Tu n’as
pas l’air fou », disait la voix d’un ton dubitatif. Faisant

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