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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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dépêcher
auprès d’un roi affligé. Tu dois le persuader, le flatter, le supplier, mais
surtout, Seigneur Prince, le convaincre que nous gagnerons la guerre demain ou
que nous combattrons pour le restant de nos jours. »
    Galahad
accepta. « Bien que j’aie ta permission de revenir me battre aux côtés de
Derfel dès que j’aurai livré le message ? précisa-t-il.
    — Tu
seras le bienvenu. » Arthur s’arrêta, les yeux fixés sur les tas de
grains. « Nous sommes peu nombreux, conclut-il simplement, et ils sont
légion, mais les rêves ne se réalisent pas en jouant de prudence, mais en
bravant le danger. Demain, nous pouvons donner la paix aux Bretons. » Il
s’arrêta brusquement, peut-être frappé par l’idée que son ambition de paix
était aussi le rêve de Tewdric. Peut-être Arthur se demandait-il s’il devait se
battre. Je me rappelais comment après l’entrevue avec Aelle, lorsque nous
avions prêté serment sous le chêne, Arthur avait envisagé de renoncer, et je
m’attendais vaguement à le voir mettre de nouveau son âme à nu. Mais en cette
nuit pluvieuse, le cheval de l’ambition tirait rudement son âme et il ne
pouvait projeter une paix dont le prix fût sa vie ou son exil. Il voulait cette
paix, mais il désirait plus encore la dicter. « Quels que soient les Dieux
que vous priez, dit-il, qu’ils soient avec vous tous demain. »
    Je dus prendre
un cheval pour aller retrouver mes hommes. J’étais pressé et je tombai trois
fois. Et, mauvais augures, les chutes furent terribles, mais la route était
boueuse, et seul mon orgueil en prit un coup. Arthur m’accompagnait, mais il
arrêta mon cheval alors que nous étions encore à une portée de lance de
l’endroit où les feux de camp de mes hommes vacillaient sous une pluie
battante. « Fais ceci pour moi demain, Derfel, et tu pourras porter ta
bannière à toi et peindre tes boucliers. »
    Dans ce monde
ou dans l’autre, pensai-je, mais je me gardai de rien dire de crainte de tenter
les Dieux. Parce que demain, dans l’aube grise et blafarde, nous aurions le
monde contre nous.
     
    *
     
    Aucun de mes
hommes ne fut tenté de se délier de son serment. Quelques-uns, peu nombreux,
auraient sans doute voulu éviter la bataille, mais personne ne voulut trahir sa
faiblesse face à ses camarades et nous nous mîmes tous en marche, en plein cœur
de la nuit, pour nous frayer un chemin à travers une campagne gorgée de pluie.
Arthur nous regarda partir, puis rejoignit le campement de ses cavaliers.
    Nimue insista
pour nous accompagner. Et comme elle nous avait promis un charme de
dissimulation, plus rien ne pouvait persuader mes hommes de la laisser
derrière. Elle officia avant notre départ, accomplissant son charme sur le
crâne d’un mouton trouvé dans une fosse à la lueur d’une flamme, à proximité de
notre campement. Elle tira la carcasse du bosquet où un loup s’en était régalé,
trancha la tête, la dépouilla de ses lambeaux de peau grouillant d’asticots
puis s’accroupit sous son manteau avec le crâne puant. Elle y demeura un long
moment, respirant la puanteur fétide de la tête en putréfaction, puis, se
relevant, lança le crâne d’un geste méprisant. Elle le regarda tomber et, après
un instant de réflexion, déclara que l’ennemi aurait les yeux tournés tandis
que nous marcherions dans la nuit. Fasciné par l’intensité de Nimue, Arthur
frissonna en l’entendant parler ainsi puis m’embrassa. « Je suis ton débiteur,
Derfel.
    — Tu ne
me dois rien, Seigneur.
    — Ne
serait-ce que pour m’avoir transmis le message de Ceinwyn. » Son pardon
lui avait procuré un immense plaisir, puis il avait haussé les épaules quand
j’avais ajouté qu’elle demandait sa protection. « Elle n’a rien à craindre
d’aucun homme de Dumnonie », avait-il dit. Puis il me donna une claque
dans le dos. « Je te verrai demain à l’aube », promit-il. Après quoi
il nous regarda nous éloigner en file indienne dans l’obscurité.
    Nous
traversâmes des prairies herbeuses et des champs moissonnés depuis peu, sans
rencontrer d’autres obstacles que la terre trempée, l’obscurité et la pluie
battante. Cette pluie nous venait de gauche, de l’ouest, et paraissait ne
vouloir jamais cesser : une pluie cinglante, piquante et froide, qui
s’infiltrait dans nos justaucorps et nous glaçait l’échiné. Au départ, nous
avançâmes serrés les uns contre les autres, afin qu’aucun homme ne se

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