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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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ne
pouvait que s’accompagner d’une tragédie.
    La cérémonie
se déroula juste après le Solstice. Mordred devait être proclamé roi et, pour
l’occasion, les grands de Dumnonie se retrouvèrent à Caer Cadarn. Nimue arriva
un jour de bon matin et visita notre cabane, que Lunete avait décorée de houx
et de lierre pour le Solstice. Nimue franchit le seuil gravé de figures pour
conjurer les mauvais esprits, puis s’assit à côté du feu et retira sa capuche.
    Je souris
parce qu’elle avait un œil en or.
    « Ça me
plaît, fis-je.
    — Il est
creux », dit-elle avant de me déconcerter en tapotant l’œil avec un ongle.
Lunete engueulait l’esclave qui avait fait brûler le potage de grains d’orge
germes, et Nimue sursauta devant cette explosion de colère.
    « Tu n’es
pas heureux.
    — Si »,
protestai-je, car les jeunes n’aiment point avouer leurs erreurs.
    Nimue jeta un
coup d’œil sur le désordre et l’intérieur enfumé de notre cabane comme si elle
sentait l’état d’esprit de ses habitants. « Lunete n’est pas bonne pour
toi », reprit-elle calmement en ramassant sur le sol jonché de débris une
coquille d’œuf vide qu’elle broya pour éviter qu’un mauvais esprit ne s’y
réfugiât. « Tu as la tête dans les nuages, Derfel, poursuivit-elle en
jetant aux flammes les bris de coquille, tandis que Lunete est terre à terre.
Elle veut être riche et toi tu veux être honorable. Le mélange ne prendra
pas. » Elle haussa les épaules comme si cela n’avait pas vraiment
d’importance, puis me donna des nouvelles d’Ynys Wydryn. Merlin n’était pas
revenu et nul ne savait où il était, mais Arthur avait envoyé de l’argent pris
à Gorfyddyd, le roi vaincu, pour financer la reconstruction du Tor, et Gwlyddyn
supervisait la construction d’une nouvelle salle, plus grande. Pellinore était
vivant, de même que Druidan et Gudovan, le scribe, Norwenna, ajouta Nimue,
avait été inhumée dans le sanctuaire de la Sainte-Épine où on la vénérait comme
une sainte. « Qu’est-ce que c’est, un saint ?
    — Un
chrétien mort, dit-elle d’une voix monocorde. Ils doivent tous être saints.
    — Et
toi ? demandai-je.
    — Je suis
en vie, fit-elle d’une voix blanche.
    — Tu es
heureuse ?
    — Tu
poses toujours des questions idiotes. Si je voulais être heureuse, Derfel, je
serais ici avec toi, à cuire ton pain et à tenir ta maison.
    — Alors
pourquoi n’en fais-tu rien ? »
    Elle cracha
dans le feu pour conjurer ma sottise.
    « Gundleus
vit, dit-elle sèchement, en changeant de sujet.
    — Emprisonné
à Corinium, ajoutai-je, comme si elle ne savait pas déjà où se trouvait son
ennemi.
    — J’ai
enterré son nom sur une pierre, poursuivit-elle en dirigeant sur moi son œil
d’or. Il m’a engrossée lorsqu’il m’a violée, mais j’ai tué la chose immonde
avec de l’ergot. »
    L’ergot était
cette rouille noire qui poussait sur le seigle et dont les femmes se servaient
pour avorter. Merlin aussi s’en servait pour se mettre en état de rêve et
s’entretenir avec les Dieux. J’avais essayé une fois et j’en avais été malade
des jours durant.
    Lunete insista
pour montrer à Nimue tous ses nouveaux trésors : le trépied, le chaudron,
les bijoux et le manteau, la belle chemise de lin et le broc d’argent battu
avec un cavalier romain nu pourchassant un cerf sur la panse. Nimue fit à peine
semblant d’être impressionnée, puis me pria de l’accompagner à Caer Cadarn où
elle passerait la nuit. « Lunete est une sotte », me dit-elle. Nous
marchions le long du ruisseau qui se jetait dans le Cam. Les feuilles mortes
craquaient sous nos pas. Il avait gelé et il faisait un froid de canard. Nimue
paraissait plus fâchée que jamais et, à cause de cela, plus belle. La tragédie
la pourchassait, elle le savait et elle la recherchait. « Tu te fais un
nom », dit-elle en jetant un coup d’œil aux anneaux de fer de ma main
gauche. Je n’en mettais aucun à ma main droite, afin de garder une prise ferme
sur mon épée ou ma lance, mais j’avais désormais quatre anneaux de fer à la
main gauche.
    « La
chance.
    — Non,
pas la chance. »
    Elle leva la
main gauche, pour que je voie la cicatrice.
    « Quand tu
te bats, Derfel, je me bats avec toi. Tu vas être un grand guerrier, et tu en
auras bien besoin.
    — Vraiment ? »
    Elle
frissonna. Le ciel était gris, de ce même gris qu’une épée qui n’a pas été
polie,

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