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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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sire ?
    — Je n’aurais pas su mieux
écrire.
    — Alors, si tu acceptais de la
signer… »
    Philippe tendit la main, s’empara
d’une plume, la plongea dans l’encre, mais s’interrompit bientôt sous le regard
inquiet de son secrétaire.
    « Quelque chose ne va pas,
sire ?
    — Non, non », répondit le
souverain en signant la lettre.
    Il retourna aussitôt la feuille et
griffonna quelque chose dans un coin. Eumène s’empara de la missive, la
saupoudra de cendres, qu’il chassa d’un souffle, puis, après s’être incliné, se
dirigea vers la porte d’un pas rapide et léger, craignant que le roi soit pris
de regrets.
    « Un instant », le rappela
Philippe.
    Il regrettait donc son geste.
    Eumène s’immobilisa. « Que
désires-tu, sire ?
    — Où vas-tu expédier cette
lettre ?
    — Eh bien, je me suis permis de
garder des contacts, d’engager discrètement des informateurs… »
    Philippe secoua la tête. « Un
espion, voilà qui je paie pour s’occuper de mon administration ! Tôt ou
tard, je finirai par étrangler ce Grec. Par Zeus, je jure que je l’égorgerai de
mes propres mains ! »
    Eumène esquissa une nouvelle
révérence et quitta la pièce. Tandis qu’il regagnait en toute hâte son bureau,
son regard tomba sur les mots que Philippe avait ajoutés de sa propre
main :
    — Si tu recommences, je te tue.
Tu m’as manqué. Papa.
     

34
    Attale et Parménion passèrent en Asie sans rencontrer de résistance, et
les villes grecques de la côte orientale les accueillirent comme des
libérateurs, consacrant des statues au roi de Macédoine et préparant de grandes
célébrations.
    Cette fois-ci, Philippe reçut avec
enthousiasme des nouvelles de ses courriers : les circonstances de son
expédition en Asie ne pouvaient être plus propices. Du fait de la crise
dynastique, l’Empire perse connaissait de grandes difficultés. Quant à lui, il
disposait d’une puissante armée nationale dont la valeur, la loyauté, la
cohésion et la détermination étaient inégalables ; d’un groupe de généraux
possédant de hautes compétences dans le domaine de la stratégie, et instruits à
son école ; d’un héritier du trône qui avait été formé selon les idéaux
des héros d’Homère et la rationalité de la pensée philosophique, un prince orgueilleux
et indomptable.
    L’heure du départ pour la dernière
et pour la plus grande aventure de son existence était arrivée. La décision de
Philippe était prise et tous les préparatifs achevés : il accueillerait
Alexandre, resserrerait les liens qui l’unissaient au royaume d’Épire en
célébrant avec un faste inoubliable les noces de sa fille Cléopâtre, puis il
rejoindrait son armée au-delà des Détroits pour effectuer le grand saut.
    Et pourtant, maintenant que tout
semblait résolu, que tout paraissait s’arranger pour le mieux, maintenant
qu’Alexandre avait écrit qu’il reviendrait sans tarder à Pella et qu’il
assisterait en grande pompe au mariage de sa sœur, Philippe était envahi par
une étrange inquiétude, qui troublait son sommeil.
    Un jour, au début du printemps, il
envoya un serviteur dire à Eumène de le retrouver dans les écuries pour faire
une promenade à cheval : il devait lui parler. C’était un procédé
insolite, mais le secrétaire s’y conforma, revêtant un pantalon thrace, une
tunique scythe, des bottes et un chapeau à larges bords. Il ordonna qu’on lui
prépare une jument suffisamment âgée et tranquille, puis il se présenta au
rendez-vous. Philippe le regarda de biais.
    « Où crois-tu aller ? À la
conquête de la Scythie ?
    — J’ai suivi l’avis du
responsable de ma garde-robe, sire.
    — C’est ce que je vois. Allez,
dépêchons-nous. »
    Le roi éperonna son cheval et
s’éloigna au galop sur un sentier qui menait hors de la ville.
    Dans les champs, des paysans étaient
déjà occupés à sarcler le blé et le millet, à émonder les sarments de vigne.
    « Regarde ! s’exclama
Philippe en faisant ralentir sa monture. Regarde ! En l’espace d’une
génération, j’ai transformé un peuple de montagnards et de bergers
semi-barbares en une nation d’agriculteurs habitant des villes et des villages
aux administrations efficaces et policées. Je les ai rendus fiers d’appartenir
à leur pays. Je les ai forgés comme le métal, j’ai fait d’eux des guerriers
invincibles. Et Alexandre m’a bafoué parce que je me suis un peu trop amusé, il
a

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