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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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Il brûle en générant une énorme chaleur.
Regarde ! »
    Un groupe de soldats, que l’officier
avait chargés de remplir des outres de naphte, répandait le liquide sur deux
lignes parallèles le long du sentier qui menait au camp. L’officier s’empara
d’une lanterne et mit le feu aux deux extrémités des lignes : deux murs de
flammes s’élevèrent aussitôt et s’étendirent jusqu’à l’entrée du camp avec la
rapidité de l’éclair, laissant tout le monde bouche bée. L’étrange substance
continua de brûler en dégageant deux rideaux d’une fumée dense et nauséabonde,
ainsi qu’une chaleur insupportable.
    Alexandre voulut prendre un bain
sans tarder pour se libérer de cette odeur dont il était imprégné de la tête
aux pieds. Tandis que Leptine le lavait, il s’entretint avec Héphestion,
Ptolémée, Callisthène, un nouveau masseur du nom d’Athénophanès, originaire
d’Athènes, ainsi que son assistant, un dénommé Stéphanos.
    « On pourrait se servir de ce
naphte comme d’une arme, disait le roi : imaginez l’effet qu’il produirait
une fois projeté sur nos ennemis !
    — J’ai entendu dire que le
naphte ne se prête pas à cet emploi, intervint le masseur qui avait étudié la
philosophie dans sa jeunesse. Il déclenche, en effet, d’étranges incendies.
Tout le monde sait que le feu est un élément éthéré, céleste, qui se transmet à
travers l’air en diffusant de la chaleur et de la lumière. Le naphte, en
revanche, émane de la terre et ne brûle qu’au contact avec un terrain
totalement aride – comme le sable –, ou trop humide et trop gras, comme celui
du sud de la Babylonie. Sur une substance d’humeur intermédiaire, telle qu’un
homme, il ne prendrait jamais feu, cela ne fait aucun doute.
    — C’est une hypothèse
hasardeuse, me semble-t-il, objecta Callisthène. Il est difficile d’appliquer
des catégories de l’intellect à de simples manifestations physiques, fruit de
composantes fortuites qu’on ne peut quantifier, et en outre…
    — Je suis certain de ce que
j’avance, répliqua Athénophanès tandis qu’Alexandre sortait de son bain et que Leptine
l’essuyait avec un drap de lin. Et Stéphanos, mon assistant, a entendu tout
comme moi le sophiste Hermippos, mon maître, soutenir cette thèse.
    — Je suis prêt à vous le
démontrer moi-même par une expérience, s’exclama le jeune homme, dans le but,
peut-être, d’attirer l’attention et la gratitude d’Alexandre.
    — Cela n’en vaut pas la peine,
à mon avis, dit le roi. Mieux vaut laisser tomber. »
    Mais le garçon insistait, soutenu
par Athénophanès, qui continuait de palabrer et d’exposer ses théories philosophiques.
Alors on envoya un domestique puiser du naphte, et le jeune Stéphanos
s’enduisit soigneusement le corps, comme s’il utilisait de l’huile d’olive.
    « Maintenant, annonça
Athénophanès en saisissant une lanterne, je vais vous démontrer que le naphte ne
peut s’enflammer sur un corps humain d’humeurs moyennes. »
    Il approcha la flamme du jeune
homme. En un instant, le corps de ce dernier fut enveloppé d’un globe de feu
d’une effroyable puissance. L’assistant se mit à hurler désespérément. Tout le
monde s’empara de seaux et de récipients, avec lesquels on puisa l’eau du bain,
heureusement disponible. Mais même ainsi il fut difficile d’éteindre les
flammes.
    Alexandre fit aussitôt appeler
Philippe, qui saigna le jeune homme en le recouvrant d’onguents contre les
brûlures. Il parvint au prix de nombreux efforts à lui sauver la vie, mais le
pauvre garçon fut irrémédiablement défiguré, et il ne recouvra jamais sa santé.
    Callisthène conseilla à tout le
monde de ne plus s’occuper de cette substance malodorante tant que son oncle
Aristote ne l’aurait pas étudiée à fond, et n’aurait pas découvert ses
véritables propriétés. Le lendemain, l’armée se remit en marche.
    Au fil de la route, la steppe
s’effaçait devant une terre de plus en plus grasse et fertile, irriguée par des
dizaines de canaux qui reliaient les rives du Tigre à celles de l’Euphrate. La
campagne était parsemée d’un grand nombre de villages, où les paysans
s’employaient à préparer le sol pour les prochaines semailles.
    Quand l’armée s’arrêtait, les chefs
locaux lui offraient les spécialités de la région, en particulier des cœurs de
palmier au goût agréable et à l’effet rafraîchissant. Le vin de

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