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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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m’honore, je te demande à présent de m’écouter comme tu écouterais ta
mère : épargne à ce peuple le chagrin d’être arraché à sa patrie.
    Souviens-toi de ta propre patrie, et
des êtres chers que tu y as laissés ! Ces malheureux se sont contentés de
défendre leurs terres et leurs maisons.
    Aie pitié d’eux !
    Cette lettre émut Alexandre et sa
colère retomba : il permit aux Uxiens de demeurer sur le haut plateau en
échange d’un tribut annuel de cinq cents chevaux, deux mille juments de somme
et du petit bétail. Les Uxiens acceptèrent de bon gré ces conditions en pensant
que ce garçon coléreux et ses sauvages guerriers ne reviendraient jamais
réclamer leurs chèvres et leurs bœufs.
    Une fois ces terres pacifiées,
Alexandre reprit sa route vers le passage le plus haut : un défilé qu’on
appelait les « Portes persiques », en travers duquel le satrape
Ariobarzanès avait fait construire un mur défensif sur une position très élevée
et, elle aussi, inexpugnable. L’armée se remit en marche par un matin glacial,
sur le haut plateau fouetté par le vent, tandis que la neige commençait à
tomber.
     

20
    La vallée qui menait aux Portes persiques se rétrécit bientôt, se
changeant en un couloir rocheux aux parois abruptes. Les soldats durent avancer
au prix de nombreux efforts dans la neige épaisse et sur des plaques de
verglas, où les chevaux et les mules se blessaient en glissant, où l’on se
brisait les os.
    Une journée s’écoula avant que
l’avant-garde n’atteigne les premiers contreforts des rampes qui conduisaient à
la muraille.
    Tandis qu’Alexandre rassemblait les
chefs des Thraces et des Agrianes pour étudier la meilleure façon d’escalader à
la faveur de l’obscurité l’escarpement, puis la muraille, un vacarme soudain se
produisit : les soldats perses faisaient rouler d’énormes rochers du haut
des parois, provoquant des éboulements.
    Tout le monde s’écria :
« Vite, vite, reculez ! » Mais les pierres furent plus rapides
que les hommes, qu’elles décimèrent inexorablement. Alexandre lui-même fut
plusieurs fois blessé, mais il n’eut heureusement aucune fracture. Quand il ordonna
à ses hommes de rebrousser chemin, les soldats ennemis s’étaient déjà emparés
de leurs arcs et, malgré les gros flocons de neige, tiraient sans rater leur
cible.
    « Boucliers ! hurla
Lysimaque, qui commandait les attaquants. Mettez vos boucliers au-dessus de vos
têtes ! »
    Ses hommes lui obéirent, mais les
Perses couraient le long du couloir rocheux, frappant les soldats suivants, qui
n’avaient pas encore compris ce qui se passait. Seule l’obscurité mit fin à ce
massacre, et Alexandre parvint au prix de nombreux efforts à ramener l’armée
dans un lieu moins étroit où il fut possible de monter le camp. Le nombre des
soldats tués et les cris des blessés, dont les membres avaient été déchiquetés,
transpercés, et les os brisés, semèrent le découragement dans les rangs.
    Philippe et ses chirurgiens
commencèrent leur travail à la lueur des lanternes, recousant les blessures,
extrayant les pointes de flèches et de javelots, réduisant les fractures,
immobilisant les membres au moyen de bandages et d’attelles en bois, pour
lesquelles ils utilisèrent des tiges de flèches ou des hampes de lances quand
les bâtonnets de bois vinrent à leur manquer.
    Les compagnons gagnèrent l’un après
l’autre la tente du roi afin d’y tenir conseil. Il n’y avait ni feu ni braises
pour se réchauffer, mais la lampe qui était accrochée au pal central répandait
un peu de lumière, ainsi qu’une sensation de chaleur. Ces hommes étaient
frappés par l’incroyable changement que leurs vies avaient subi en seulement
quelques jours : la langueur et le luxe des palais de Babylone et de Suse
avaient été brusquement remplacés par le froid et les efforts d’une entreprise
désespérée.
    « À combien estimez-vous leur
nombre ? demanda Séleucos.
    — À plusieurs milliers,
probablement, répondit Ptolémée. Si Ariobarzanès a décidé de défendre le
passage, il dispose certainement de détachements choisis, en nombre plus que
suffisant. »
    C’est alors qu’entra Eumène, blême à
cause du froid claquant des dents. Il portait en bandoulière son étui à
rouleaux, sa plume et l’encre au moyen desquelles il rédigeait chaque soir son
journal.
    « As-tu évalué nos
pertes ? l’interrogea Alexandre.
    — Oui, et

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