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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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bureau. Au moment où elle y pénétra, s’attendant au pire, le directeur, tout sourire, commença par la complimenter sur son zèle avant d’en venir au fait.
    —  J’ai besoin de toi pour aller chercher la « marchandise » chez mon compradore… lui souffla-t-il.
    À ces mots, le sang de Laura se glaça. Elle savait fort bien que toute personne prise sur le fait à transporter la boue noire encourait la peine capitale.
    —  Le coursier qui en est chargé est tombé malade. La marchandise n’est pas lourde. Je te paierai huit liang de bronze pour la peine… ajouta, sourire en coin, le directeur, en découvrant une dentition qui virait au carnage.
    Quoique alléchante sur un plan financier, la tâche comportait de tels risques que la jeune Anglaise décida sur-le-champ de tout faire pour y échapper.
    —  C’est loin d’ici   ? lança-t-elle à son bourreau d’une voix étranglée par l’angoisse.
    —  Vers le port ! Et en plus, tu n’auras même pas à prendre des chemins détournés comme c’était le cas du coursier…
    —  Mais avec mon faciès de nez long, est-ce que je ne vais pas attirer l’attention de la police   ?
    —  Au contraire ! Jamais la police ne songera à arrêter une nez long. Il te suffira de passer par la porte arrière du magasin de mon fournisseur et personne n’y verra que du feu !
    —  Je ne connais pas la ville ! Je risque de me perdre… gémit-elle.
    L’horrible Chinois se mit à ricaner.
    —  Nous ferons ensemble le premier trajet aller. Je suis sûr que tu retrouveras sans peine le chemin du retour !
    —  Et si je refusais   ?
    —  Nous nous comprenons mal. Je veux bien te laisser jusqu’à demain pour réfléchir à ton intérêt ! lâcha le directeur du Paon Splendide d’un air menaçant.
    Laura ne se voyait guère en vaillant coursier transportant chaque jour au nez et à la barbe de la police la petite caisse de boules noires qu’elle serait allée chercher auprès du grossiste. Elle ne pouvait que refuser ce rôle qui la rendait complice d’un monstrueux crime d’empoisonnement.
    Comme si un malheur ne suffisait pas, de retour dans son galetas, elle constata que Joe, contrairement à l’accoutumée, ne l’y attendait pas.
    Paniquée et en proie à un pressentiment terrible, elle se rua à la fumerie, bien décidée à en inspecter un à un tous les recoins, et ne mit pas longtemps à tomber sur ce qu’elle craignait par-dessus tout. Pelotonné au fond de l’un des minuscules box du rez-de-chaussée réservés à la « clientèle pauvre », Joe, le regard vide, souriait aux anges et gloussait comme une poule. Le nécessaire à opium gisait encore sur la petite table basse. Au fond du couloir, elle aperçut deux serveurs qui pouffaient de rire. Ces vauriens s’étaient amusés à droguer son frère avant de s’éclipser dès qu’ils l’avaient aperçue. Bouleversée et ivre de rage, elle tira Joe de sa torpeur et le traîna tant bien que mal jusqu’à leur chambre. Lorsqu’elle l’étendit sur sa couche, elle crut l’entendre prononcer « papa » au milieu de ses borborygmes et ne retrouva son calme que lorsqu’elle l’eut inondé d’une pluie de baisers et de caresses.
    Totalement exténuée, elle en était au point où elle se demandait si elle n’avait pas péché par imprudence, voire par aveuglement, en quittant sur un coup de tête le presbytère du pasteur Roberts.
    Au moment où la nuit recouvrait tout son être d’un lourd manteau d’angoisse, elle eut soudain la conviction qu’elle était bel et bien tombée dans un terrible piège dont il lui fallait absolument s’extirper. Pour elle, pour l’enfant à naître, mais également pour Joe, c’était une affaire de survie.
    Alors, furtivement, son pouce dessina une petite croix à l’emplacement de son cœur en même temps qu’elle se mit à supplier Dieu avec ferveur de l’aider à sortir du terrible mauvais pas où elle était.

 
    34
     
    Londres, 20-21 août 1847
     
    Il était trois heures du matin lorsque, dans une atmosphère alourdie par une nuit caniculaire, Nash Stocklett, pâle comme un linge, épuisé et en proie à un terrible accablement… Nash, qui comprenait mieux, à présent, la détresse de Brandon, ce fameux soir où il était venu le défier, Nash, qui eût donné cher pour que Barbara l’entendît hurler qu’il continuait à l’aimer de toutes ses forces, relut une dernière fois sa lettre de démission de ses fonctions

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