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Le salut du corbeau

Le salut du corbeau

Titel: Le salut du corbeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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se rassit et tenta du mieux qu’il put de reprendre son calme. Le chambellan continua :
    — Comme il ne saurait être question cette fois-ci de banquet, mon roi comptait empoisonner le vôtre par l’intermédiaire d’un jeune médecin venu de Chypre. Ce jeune homme eût pu d’autant plus aisément être introduit auprès du roi qu’en plus de sa science, qui lui eût plu fort, il possède une érudition peu commune.
    La plume du greffier crissait sur le parchemin neuf sans s’arrêter alors que le chambellan avouait, d’un débit de plus en plus précipité :
    — Il a aussi empoisonné les deux reines. La reine Jeanne de Bourbon… ses humeurs, vous savez… et sa propre femme aussi, qui est, je vous le rappelle, la sœur de votre sire le roi. Il a également cherché à se débarrasser de l’héritier du trône et de bien d’autres encore.
    Le silence tomba. Louis et le prince se regardèrent. « N’en mettez pas trop, quand même », eut envie de murmurer le bourreau. Il l’eût probablement dit si ce genre d’échange clandestin avait été permis.
    — C’est tout, dit de Rue, qui lui aussi avait capté le brusque changement d’ambiance et s’était mis à craindre d’avoir trop voulu bien faire.
    Il leva les yeux sur Louis, comme en quête de son approbation. Il lui fit un signe d’assentiment. Jaquet n’en ajouta pas moins :
    — Eh quoi, croyez-vous que j’exagère mes aveux ? Auriez-vous déjà oublié ce qui est arrivé à Seguin de Badefol (73)  ? Rappelez-vous comme mon roi et le vôtre, encore dauphin, aimaient à festoyer ensemble. Les occasions n’ont pas manqué. Tenez, par exemple, cette visite de mon sire Charles au dauphin dans le Vaudreuil…
    Le greffier se leva et apporta au chambellan le parchemin, l’encrier ainsi que la plume dont il s’était servi.
    — Veuillez signer votre déposition, je vous prie, dit-il.
    Une fois que le captif se fut acquitté de cette exigence d’une main tremblante, le magistrat se leva pour annoncer :
    — Bien, messire de Rue, vous demeurerez sous bonne garde jusqu’à la fin des délibérations. Tout sera mis en œuvre pour assurer votre confort pendant la période de détention requise. Le verdict sera rendu consécutivement à l’interrogatoire de Pierre du Tertre, lieutenant du Navarrais et gouverneur du comté d’Évreux.
    — Quoi ? dit le chambellan.
    Son visage blêmit davantage à l’idée que ses aveux pouvaient être corroborés autant qu’invalidés par le lieutenant ; car s’ils étaient corroborés, la peine de mort était assurée ; s’ils étaient invalidés, cela signifiait que ses tortures allaient être reprises. Peu importait ce qui allait advenir désormais, il se savait perdu.
    — Oui. Vous saviez sûrement que les places fortes tenues par les gens de votre roi sont en train d’être reprises une par une ? Du Tertre a capitulé à Bernay et a été arrêté. Voilà toujours bien une place de plus. Allez, la séance est levée.
    *
    Le Louvre, quelques jours plus tard
    Charles le Noble, le fils du Navarrais, ne tenait pas en place. Indigné, il trépignait et marchait de long en large à travers une petite salle privée au centre de laquelle était assis un Charles de Valois presque immobile sur un fauteuil, tel un pilier de soutènement central. Sa main enflée frémit à peine sur le bras sculpté de son siège.
    — Il a donc tout avoué ? demanda-t-il.
    — Oh, bien plus que cela. Nous lui en avons soutiré suffisamment pour perdre le Mauvais lui-même. Sire, je ne ressens plus que honte et mépris à l’égard de mon père. J’ai son comportement, indigne de celui d’un roi, en pure aversion. Comment avez-vous pu croire un seul instant que j’avais besoin d’être réprimandé à son sujet ?
    — Je ne demande qu’à croire en votre bonne foi, monseigneur, vous qui fûtes jadis par lui confié à mes soins. J’estime que c’est là la seule vraie et bonne décision qu’a prise mon beau-frère au cours de ces dernières années, car vous étiez très influençable, alors, et d’être resté auprès de lui n’aurait fait que vous nuire. L’amertume éprouve grandement l’aptitude à régner du meilleur des monarques. Maintenant, vous avez demandé à me rencontrer en privé. Ce n’est pas, je l’espère, pour vous faire répéter des certitudes, ni pour me faire le reproche d’avoir voulu m’assurer de votre soutien ?
    Le jeune homme s’étaya des deux poings sur

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