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Le salut du corbeau

Le salut du corbeau

Titel: Le salut du corbeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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cilla pas ni ne décroisa les bras.
    — Où sont-ils ? demanda l’émissaire.
    Il était visiblement contrarié. Louis répondit, un demi-sourire défiant aux lèvres :
    — Aitken ne les trouvera pas au domaine non plus. Ils sont loin.
    — Je vois. Audacieux, insolent et aussi fin finaud qu’un goupil. Eh bien, puisque c’est comme ça…
    Il jeta un coup d’œil à l’un des vougiers* et reprit, toujours avec le même air hautain :
    — Tu as vu juste. Notre présence ici n’a rien à voir avec un quelconque enjeu politique. Cela n’a fait que nous servir de prétexte. Ménage donc ta salive et ne perds pas ton temps à essayer de me convaincre que tu es du bon côté. Des bourreaux, ça se contente de se ranger à côté d’un billot.
    — Exact. Cette neutralité est indispensable si l’on tient à garder la tête froide.
    Les hommes échappèrent quelques rires gras. L’émissaire sentait confusément qu’ils appréciaient le courage tranquille du colosse et se disposaient de plus en plus à se prendre de sympathie pour lui. C’était très mauvais. Mieux valait abréger les palabres.
    — Suffit. Sache que le preux Samuel l’Escot* conteste depuis toujours la légitimité de ton union avec la dame d’Augignac, ainsi que ta paternité. Cependant, il a daigné se montrer magnanime en acceptant de s’abaisser à ton niveau pour te provoquer, toi, en duel judiciaire.
    — S’abaisser ? Il était sous ma tutelle et c’était mon garçon d’écurie.
    — C’est effectivement possible, mais il ne l’est plus. Il appartient désormais à la cour du roi. Accepte le combat à outrance et il épargnera les gens d’Aspremont de même que leurs récoltes. Il t’attend à Hiscoutine.
    La porte de l’église s’entrouvrit dans le dos de Louis. Les hommes se tinrent prêts à intervenir, mais Louis leva les mains.
    — Du calme. Ce n’est que le chapelain.
    Le moine se coula discrètement à l’extérieur. Après avoir jeté autour de lui un regard anxieux, il s’avança bravement en direction du messager. Tête nue comme il l’était habituellement, les mains rentrées dans ses manches amples, il avait retiré ses sandales et s’était passé une corde au cou.
    — Père, que faites-vous ? demanda Louis.
    L’aumônier présenta une grosse clef à l’envoyé et s’adressa à lui :
    — Vous avez respecté l’usage, alors, nous faisons de même (81) .
    L’envoyé de Sam ricana. Il ne prit pas la clef et dit à Louis, comme s’il n’y avait pas eu d’interruption :
    — Allez, bourrel*, va te battre. Profite donc de l’occasion qui t’est offerte de manier l’épée comme un homme et non pas comme le vil boucher que tu es. Voici les termes, tels que proposés par l’Escot* : au vaincu, une mort honorable par le fil de l’épée ; au vainqueur, la femme et l’enfant.
    — Hein ? Quoi ? balbutia Lionel.
    — Laissez, Père, ce n’est pas le moment. Reculez, grommela Louis.
    Aux hommes qui s’impatientaient, l’émissaire rugit :
    — Vos gueules, vous autres !
    Il fit signe au vougier* de s’éloigner et d’abaisser son arme. Ce dernier obéit, du moins de prime abord. S’il consentit à jeter son arme d’hast*, ce fut pour mieux s’emparer d’un perce-mailles* qu’il avait jusque-là tenu caché sous sa cotte. Louis ne parvint à esquiver le coup qu’en saisissant le poignet de l’homme à deux mains. Il le lui tordit et l’éloigna d’un coup de pied avant de dégainer sa propre dague. Les autres firent cercle autour d’eux, alléchés par la perspective de cet affrontement inattendu. Le chef s’abstint aussi d’intervenir. Il se contenta d’exprimer une simple remarque :
    — Robert, c’est très déloyal, ce que tu viens de faire là.
    L’homme répondit, sans quitter Louis des yeux :
    — Va au diable. Cet ignoble brise-garrot a coupé les lèvres de mon frère en raison d’un vol anodin. Il y a deux ans que je veux sa peau.
    — Si j’ai fait cela, c’est parce que c’est mon travail !
    Les deux hommes s’affrontèrent à quatre pieds l’un de l’autre et s’évaluèrent. L’agresseur, sûr de lui, contournait Louis lentement. Un rictus dédaigneux enlaidissait ses traits barbouillés de barbe. Le géant, quant à lui, économisait ses gestes. Les bras le long du corps, il ne se déplaçait pas, hormis pour tourner sur lui-même afin de ne jamais présenter son dos à l’adversaire. Son regard ne cillait pas. Il

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