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Le salut du corbeau

Le salut du corbeau

Titel: Le salut du corbeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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la gorge de Louis afin de tâter son pouls. Il fit semblant de ne pas entrevoir les luisances de ses prunelles fixes à travers les paupières mi-closes et les longues mèches souillées. Il lui était pénible d’avoir à convenir que, par l’effet de son amour chaste, les battements de cœur de cet individu égalaient ceux d’un homme de haut rang. Ils les surpassaient même. Sam leva la tête et fronça les sourcils.
    — Qu’est-ce que c’est que ça ? Tu entends ce bruit ?
    Iain tourna la tête vers l’entrée. Ce n’étaient pas les battements faibles du cœur de Louis, que Sam percevait. Le sol s’était mis à trembler. Un grondement sinistre approchait à toute vitesse, bientôt ponctué de cris d’alerte avinés. Iain disparut.
    — Ah, merde !
    Sam trébucha dans le corps de Louis et tomba à genoux avant de s’élancer vers la sortie. On avait lancé quelques feux grégeois* depuis les bosquets pour faire diversion ou impressionner. Des cavaliers en grand nombre déboulaient dans la cour et la cernaient de toutes parts, tandis que d’autres descendaient de cheval pour pénétrer dans le manoir. Les bruits d’un bref affrontement et quelques cris d’agonie se firent entendre au moment où l’un des cavaliers aperçut l’Écossais.
    Au même instant, un homme d’armes à cheval, dont l’armure de plates était protégée par un surcot de velours bleu aux armes du roi de France, vit la silhouette d’Iain qui filait entre des bosquets. Il cria :
    — Lui là-bas ! Le grand maigre ! C’est un Escot*. C’est lui, leur chef, j’en suis sûr ! Rattrapez-le !
    Sam ne se rendit pas tout de suite compte qu’il s’était mis à courir dans la direction opposée. Il sut sans le voir que le cavalier coupait la retraite à Iain en le devançant à l’orée de la futaie, où il parvint à l’assommer d’un coup de cravache. Ce fut grâce à lui que Sam parvint à s’échapper.
    Aux lueurs des flammes isolées dans le jour déclinant, les ombres des sauveteurs s’agitaient devant Louis qui, inerte, n’en voyait rien. Certains des hommes de Sam, encore ivres, se rendirent sans avoir livré bataille. Ceux qui tentèrent de se disperser furent sans effort abattus ou arrêtés.
    L’homme d’armes au surcot descendit de cheval et s’introduisit seul dans la tour, où il s’approcha du bourreau. Un valet l’y suivit.
    Louis ressemblait à un pantin brisé, abandonné dans son coin par un garçon trop turbulent. Du sang maculait son poignet menotté et gouttait le long de son bras, car les secousses des convulsions l’avaient profondément écorché. L’écume qui lui souillait le menton donnait l’impression qu’il s’était gavé de crème.
    — Le pauvre bougre ! dit l’homme d’armes en s’accroupissant près de lui.
    Il posa son oreille contre la poitrine de Louis.
    — Il paraît mort, dit le valet, tandis que d’autres gens d’armes curieux s’approchaient discrètement.
    Leur chef se redressa et annonça :
    — Non, il vit encore, du moins pour l’instant. On peut dire qu’il s’en est fallu de peu. Mais il n’y a pas une minute à perdre. Ce qu’il lui faut à présent de toute urgence, c’est un physicien* et un prêtre.
    — Il y a ce chapelain qui s’est enfermé dans l’église avec les habitants du village au bas du coteau.
    — Parfait. Il fera l’affaire. Va le quérir.
    L’homme acquiesça et se détourna. Un autre s’avança et dit :
    — Pour le physicien*, ça va être plus compliqué. C’est à au moins quatre heures de route. Aura-ton le temps ?
    L’homme qui avait posé cette question tenait encore son cheval par la bride. Le chef répondit :
    — J’en compterais plutôt cinq si ce n’est six, car nous devons en plus nous charger de conduire les prisonniers à Caen. De toute façon, on n’a pas le choix. Un chevaucheur* doit prendre les devants.
    Le chef se retourna vers ses autres hommes.
    — Il faut que trois d’entre vous restent ici avec lui en attendant les secours. Transportez-le au manoir et soignez-le du mieux que vous le pouvez. Je suppose que c’est à moi que revient le devoir d’aller quérir l’aide et prévenir la famille.
    Il jeta à Louis un coup d’œil navré avant de sortir dans la cour où les prisonniers, inconscients ou non, avaient été rassemblés et enchaînés.
    En forêt, loin de cette agitation, Sam s’était assis à même la terre piétinée d’un ancien sentier, parmi les racines

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