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Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
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ailleurs, elle avait perdu son innocence bien avant de se donner à son dernier amant.
    Artem nota mentalement ces informations et demeura silencieux, envahi par un sentiment de tristesse et de compassion devant ce corps profané, ce cadavre hideux qui avait été une jouvencelle pleine de charme et de vie. Il n’arrivait pas à condamner la conduite d’Olga qui avait vécu et était morte dans le péché. Il se surprit même à éprouver une secrète satisfaction à la pensée qu’elle avait eu le temps de goûter certains plaisirs avant que sa jeune vie ne fût sacrifiée aux désirs dénaturés d’un fou sanguinaire.
    D’un geste brusque, il serra Philippos contre lui et scruta le petit visage grave aux sourcils froncés. Le garçon était encore pâle mais semblait un peu revigoré. Il se libéra d’ailleurs aussitôt, puis il demanda en humant l’air :
    — Ce parfum, c’est bien celui que tu as senti sous la tonnelle où Olga a été assassinée ?
    Le droujinnik acquiesça avant de s’adresser au médecin :
    — Je voulais justement t’interroger là-dessus, savant Manouk. Quel est cet arôme ? Est-il de nature végétale ou animale ?
    Le médecin écarta les bras d’un air navré.
    — Je confesse mon ignorance, noble Artem. Je m’y connais en huiles et en essences, mais je ne parviens pas à déterminer le principe odorant de celle-ci. Depuis qu’on a apporté ici le corps d’Olga, ce parfum a imprégné l’air, s’est répandu dans toute la chapelle et a pénétré ses moindres recoins. Je ne cesse d’y penser, mais en vain !
    — Il m’obsède, moi aussi, avoua Artem. Olga et son amant s’en sont servis au début de la nuit dernière, mais on dirait qu’il n’a rien perdu de son intensité ! Comment est-ce possible ?
    — Certaines drogues gardent longtemps leur efficacité, répondit Manouk. Elles sont capables d’affecter les sens d’un individu durant plusieurs jours. Il s’agit le plus souvent de puissants aphrodisiaques.
    — Il faut avoir certaines compétences pour se procurer ce genre de produits, avança Artem. Ce n’est pas à la portée de tout le monde ! Seuls les médecins et les apothicaires y ont accès, n’est-ce pas ?
    Manouk réfléchit un instant.
    — Certes, les gens de métier sont mieux placés que le premier venu pour dénicher un élixir réputé introuvable. Mais les droguistes des grandes villes comme Tchernigov offrent une telle abondance de potions et de mixtures que, dans la pratique, n’importe quel habitant aisé peut acheter tout ce qu’il veut.
    Déconcerté, Artem tirailla sa moustache. Au bout d’un moment, il jeta un dernier coup d’œil sur la dépouille d’Olga, posa la main sur l’épaule de Philippos et se dirigea lentement vers la sortie. À mi-chemin de la porte, il se retourna vers le médecin.
    — Une dernière question. D’ordinaire, un aphrodisiaque éveille le désir charnel et excite les sens. Ne pourrait-on pas imaginer une substance encore plus puissante, capable d’affecter la volonté d’un être humain ? Dans ce cas, non seulement la victime ne serait pas en état de résister, mais elle se livrerait de son plein gré à son bourreau !
    Le médecin haussa les sourcils.
    — Pour ma part, je n’ai jamais observé l’effet d’un philtre aussi dangereux. Cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas ! Crois-tu que le meurtrier ait eu recours…
    — Ce n’est qu’une hypothèse, coupa Artem avec un geste évasif. Je suis obligé d’envisager toutes les possibilités.
    — Mais enfin, quel monstre a pu faire ça à une créature de Dieu ? s’enquit Manouk en le fixant de ses grands yeux ambrés. À une si tendre jouvencelle ? Le plus jaloux des amoureux ne saurait commettre un tel crime !
    — Par sa nature, l’homme est capable de tout, et surtout du pire, grinça le droujinnik. Mais qui que ce soit, il ne restera pas impuni. J’arrêterai ce scélérat, que Dieu m’en soit témoin !
    Cette promesse allégea un peu l’angoisse qui lui étreignait le cœur. Il remercia le médecin et prit congé, suivi de Philippos. Ils firent un détour par le bâtiment des cuisines, où Philippos put se rincer la bouche et se laver le visage. Il paraissait complètement remis de son malaise et s’adressa à Artem avec un air mi-espiègle mi-implorant :
    — Puis-je passer la soirée chez Nadia ? Ses amis se réunissent chez elle pour célébrer le Feu nouveau. Je te promets de ne pas rentrer

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