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Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
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toujours – que si je n’étais pas entré dans leur vie, tout se serait déroulé différemment.
    — Qu’est-ce qui est arrivé au juste ? voulut savoir Artem.
    Matveï s’épongea le front et soupira derechef.
    — Un accident de cheval. J’avais offert à ma femme une jument des steppes, rapide comme le vent. Il faut préciser que la bête avait été dressée selon toutes les règles de l’art et que mon épouse était une excellente cavalière. Cet après-midi-là, Anna et moi étions absents : j’avais amené la petite à la foire de Kiev. Nous habitions à l’époque non loin de notre glorieuse capitale.
    — À propos, qui a hérité des terres que possédait ton épouse ? s’enquit Artem.
    — Ses enfants, bien sûr ! Leur mère leur a laissé la belle propriété de Tchernigov que tu connais déjà, ainsi que toutes celles situées dans les environs de Kiev, hormis le domaine où nous nous sommes installés après notre mariage. Elle me l’a offert de son vivant et a confirmé cette donation par testament. C’est là que je réside actuellement.
    — Revenons à la mort de ta femme. Tu as dit que tu avais conduit Anna à la foire. Qu’en était-il de Boris ?
    — Il était bien là, mais j’ignore où il se trouvait au moment de l’accident. Mon épouse venait de faire un tour à cheval et ramenait l’animal à sa stalle. Le palefrenier était occupé à l’intérieur des écuries. Soudain, il a entendu un hennissement suivi d’un bruit de sabots. D’après lui, quelque chose avait fait peur à la jument, elle a dû se cabrer et lancer une ruade. Ma femme n’a pu la maîtriser et a reçu un coup de sabot à la tempe. Elle a eu le crâne brisé.
    — Ce palefrenier, qu’a-t-il vu exactement ?
    — Il a vu la jument s’enfuir crinière au vent et partir au galop dans la plaine. Il n’a pas réalisé tout de suite que ma femme avait été blessée. Il a d’abord voulu rattraper la jument, puis il a renoncé à la poursuite et est revenu vers les écuries. C’est alors qu’il a aperçu Boris assis par terre, le corps de sa mère sur ses genoux.
    — Boris a-t-il raconté sa version des faits ? demanda vivement Artem.
    Matveï esquissa un geste d’impuissance.
    — On n’a jamais réussi à en tirer le moindre mot ! Anna et moi l’avons trouvé dans la même attitude que le palefrenier une heure avant nous. Il avait l’air d’un fou ! Il berçait sa mère morte, lançant des regards furieux aux domestiques qui essayaient de s’approcher. Le cadavre était affreux à voir à cause de son crâne défoncé, et Boris était tout barbouillé de sang. Quand on a voulu le séparer de sa mère, il est devenu enragé. De même, on a dû le ligoter le jour de l’enterrement.
    — Le corps a-t-il été examiné par un médecin ? voulut savoir le droujinnik.
    — Pourquoi ? Les causes du décès étaient évidentes !
    — Pas tant que ça, objecta Artem. Il m’est arrivé d’enquêter sur ce genre d’affaires. Il est possible de faire croire que la victime a été tuée par un coup de sabot de l’animal affolé, alors qu’en réalité…
    Il laissa sa phrase en suspens, et Matveï s’immobilisa pour le dévisager. Artem vit braqués sur lui deux yeux ronds et fixes au regard aigu, les yeux d’un hibou. Puis sa paupière droite retomba et se remit à cligner, son étrange regard s’éteignit.
    — Tu fais allusion à un meurtre maquillé en accident, boyard. C’est invraisemblable ! Mon épouse était une personne discrète et parfaitement inoffensive. Elle n’avait pas de secret pour moi, et il n’y avait aucun mystère dans sa vie ! Pour quelle raison aurait-on voulu la supprimer ?
    — À première vue, je n’en vois aucune, concéda Artem. D’autant que de l’eau a coulé sous les ponts… Aujourd’hui, il est pratiquement impossible d’avancer une hypothèse qui tienne debout. Mais si cet accident avait eu lieu dans ma juridiction, je n’aurais jamais classé l’affaire sans en avoir examiné les circonstances.
    — Je préfère discuter d’un drame bien plus récent, qui n’est point un accident mais un meurtre abject : celui de ma belle-fille ! riposta Matveï.
    — Il sera résolu, tu as ma parole, promit le droujinnik. Selon toi, a-t-il été commis par un rôdeur, ainsi que l’affirme Boris ? Il a d’ailleurs fini par reconnaître que sa sœur avait un amant, mais il refuse de croire que celui-ci ait pu commettre un acte aussi

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