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Le sang des Borgia

Le sang des Borgia

Titel: Le sang des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mario Puzo
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très fort ; un vent glacé balaya les rues. Mais personne n’osa donner abri à la vieille femme, de peur d’encourir la colère du pape.
    Deux jours plus tard, celui-ci dit donc une autre messe, cette fois pour la mère du cardinal, qu’on avait retrouvée morte de froid, blottie près d’une porte, la main crispée sur sa canne.
    En décembre, César, qui se rendait à Senigallia, s’arrêta à Cesena pour s’enquérir de la situation. Ramiro de Lorca en avait été nommé gouverneur et, selon certaines rumeurs, les habitants de la ville étaient mécontents.
    César convoqua donc une assemblée sur la grand-place, afin que Lorca puisse se défendre des accusations de brutalité portées contre lui.
    — On me dit que tu as recouru à des méthodes des plus cruelles contre les citoyens de cette cité ? demanda-t-il.
    L’épaisse chevelure rousse de Lorca flottait au vent, ses lèvres étaient pincées. Il répondit d’une voix si aiguë qu’on eût dit un glapissement :
    — Je ne crois pas m’être montré excessif, Excellence ! Personne ne veut m’écouter, ni obéir à mes ordres.
    — On me dit aussi qu’un jeune page a été jeté sur un bûcher édifié sur la place publique, et que tu l’as maintenu du pied pour être sûr qu’il brûlerait vif ?
    Lorca hésita :
    — Oui… mais il y avait des raisons à cela…
    — Alors, je serais ravi de les connaître, rétorqua César, la main sur la garde de son épée.
    — Il se montrait insolent… paresseux… maladroit…
    — Cela ne me paraît pas très sérieux.
    César savait par ailleurs que le gouverneur avait fait partie du complot dirigé contre lui. Mais le sort des habitants de Cesena lui importait bien davantage. Toute cruauté exercée sur eux saperait son pouvoir dans les régions de Romagne qu’il contrôlait. Lorca devait donc être châtié.
    Il fut donc aussitôt enfermé dans un cachot de la forteresse, puis César envoya chercher son vieil ami Zappitto, le nomma gouverneur et lui donna une bourse remplie de ducats, ainsi que des instructions détaillées.
    Une fois qu’il fut parti, Zappitto fit libérer son prédécesseur, à la grande surprise des citoyens de la ville, qui en furent assez mécontents ; mais au moins pouvaient-ils se dire que le nouveau gouverneur savait ce qu’était la pitié.
    Le lendemain de Noël, cependant, on vit arriver sur la place du marché le corps décapité de Ramiro de Lorca, encore vêtu de sa cape rouge et or et attaché à son cheval.
    Chacun convint qu’il aurait mieux valu qu’il demeurât dans un cachot de la forteresse.
    César se prépara à attaquer Senigallia, que gouvernait la famille Della Rovere. Il comptait depuis longtemps s’emparer de ce port situé sur la côte de l’Adriatique, et donna donc l’ordre à ses troupes de marcher jusqu’à la mer, où elles seraient rejointes par les forces que dirigeaient les anciens membres du complot. Les condottieri, qu’ils aient conspiré ou non, étaient heureux de pouvoir de nouveau collaborer ; tout se passa sans encombres.
    À l’approche de l’armée, la ville se rendit aussitôt. Andrea Doria, qui commandait la forteresse, exigea toutefois de ne faire sa reddition qu’à César.
    Celui-ci, tout en attendant de rencontrer son adversaire, ordonna à ses troupes les plus fidèles de se placer tout près de la ville, celles de ses adjoints restant à distance des portes de la cité.
    Ses principaux lieutenants, parmi lesquels Paolo et Franco Orsini, Oliver Da Fermo et Vito Vitelli, rencontrèrent un petit groupe de fantassins pour régler les détails de la reddition de la citadelle.
    Tous entrèrent pour rencontrer Andrea Doria dans un palais de la ville. Les portes se refermèrent derrière eux ; César fit remarquer en plaisantant que les habitants de la ville prenaient soin d’éviter que l’armée pontificale ne mette Senigallia à sac pendant les pourparlers.
    Entrant dans le palais, il conduisit ses lieutenants dans une salle de réception de forme octogonale, aux murs couleur pêche, avec une grande table et des fauteuils de velours.
    Ils devisèrent gaiement tout en buvant le vin local versé par des serviteurs. La ville se rendait sans combats. Da Fermo, Vitelli et les deux Orsini étaient heureux de s’en être tirés à bon compte, et surtout de prendre part à une campagne qui s’annonçait victorieuse.
    César marcha jusqu’au centre de la pièce, se débarrassa de son épée et suggéra à ses

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