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Le sang des Borgia

Le sang des Borgia

Titel: Le sang des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mario Puzo
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vous ferai jeter dans le Tibre cette nuit même, après vous avoir donné l’extrême-onction !
    Le cardinal s’enfuit, cœur battant à tout rompre, avec tant de précipitation qu’il faillit bien tomber dans l’escalier ; il décida de quitter Rome pour se réfugier à Naples.
    Au cours des mois qui suivirent, le pape négligea tous ses devoirs ecclésiastiques ; il ne pouvait penser qu’au mariage de son fils. Il alla même jusqu’à refuser de rencontrer les ambassadeurs de Venise, de Florence, de Milan ou de Naples.
    Le roi Louis XII convoqua César dans ses appartements et lui dit d’un ton réjoui :
    — Je crois que j’ai de bonnes nouvelles pour vous. Si le Saint-Père et vous en êtes d’accord, je vous ai trouvé une épouse digne de vous : Charlotte d’Albret est une femme aussi belle qu’intelligente, et la sœur du roi de Navarre.
    Ravi, César envoya immédiatement un message à son père, lui demandant la permission de se marier et de prolonger son séjour en France.
    À Rome, Alexandre, après avoir célébré la messe, s’agenouilla devant l’autel de la basilique sous le regard attentif d’une statue de la Vierge.
    De toute sa vie – dont trente-cinq ans comme vice-chancelier du Vatican et six sur le trône de saint Pierre –, jamais il ne s’était trouvé face à un aussi terrible dilemme. L’alliance avec l’Espagne avait toujours été sa grande force – du point de vue spirituel aussi bien que temporel. Il avait réussi à maintenir l’équilibre entre le royaume espagnol et celui de France, s’assurant le soutien des deux.
    Mais après la mort de Juan, sa veuve, Maria Enriquez, avait réussi à convaincre la reine Isabelle, et donc le roi Ferdinand, que César était l’assassin de son frère. C’est bien pourquoi tous les membres de la maison d’Aragon – en Espagne, à Milan ou à Naples – refusaient de donner leur fille au fils du pape. Alexandre avait rencontré d’innombrables ambassadeurs, multiplié les promesses, mais en vain. Et pourtant ce mariage devait avoir lieu, car sinon les Borgia n’y survivraient pas.
    En tant que pape, il lui fallait le soutien des armées espagnoles et napolitaines pour reprendre le contrôle des États pontificaux et mettre à la raison les barons locaux. Le mariage de Lucrèce avec Alfonso répondait à de telles préoccupations, tout en préparant celui de César avec Rosetta. Mais voilà qu’elle avait refusé, et que son fils se voyait offrir une princesse française.
    Joignant les mains, Alexandre baissa la tête face à la Vierge et la supplia de lui donner conseil :
    — Mon fils César me demande la permission de prendre pour épouse une fille de France. Et le roi Louis XII lui propose de l’aider à reprendre les terres qui appartiennent à l’Église, en envoyant des troupes qui l’assisteront…
    Luttant avec ses propres pensées, le pape réfléchit longuement. S’il consentait au mariage, il lui faudrait se couper, non seulement de l’Espagne et de Naples, mais aussi de Lucrèce. Car, bien entendu, Alfonso était un prince napolitain, et une alliance avec la France mettrait un terme à leur mariage. Pourtant, que se passerait-il s’il refusait de se joindre aux Français ? Louis XII serait bien capable d’envahir l’Italie, avec ou sans sa permission, et de faire du cardinal Della Rovere le nouveau souverain pontife.
    Alexandre était persuadé qu’en cas d’attaque française sur Milan, le More s’enfuirait sans combattre. Par ailleurs, si Naples prenait les armes, que deviendraient Geoffroi et Sancia ?
    Y avait-il une raison de préférer l’Espagne à la France ? Des heures de réflexion intense ne lui permirent pas d’en trouver une. D’un autre côté, si l’armée française, si bien entraînée, accompagnait César dans sa lutte contre les barons locaux, il pourrait devenir duc de Romagne. La famille Borgia, comme la papauté, serait alors à l’abri.
    Le pape passa la nuit sans dormir, regardant s’éteindre les cierges. À l’aube, quand il quitta la chapelle, il avait pris sa décision – certes à contrecœur.
    Brandao l’attendait dans ses appartements.
    — Duarte, mon ami, dit Alexandre, j’ai réfléchi à tout cela aussi minutieusement que je l’ai pu. Une feuille de parchemin, une plume, et je pourrai rédiger une réponse qui me permettra de dormir un peu.
    Pour la première fois, le pape paraissait vieilli, fatigué. Brandao lui tendit une plume. D’une main ferme,

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