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Le sang des Dalton

Le sang des Dalton

Titel: Le sang des Dalton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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ouvert en grand les portes de l’écurie.
    « D’après un paragraphe que j’ai lu dans le journal, Grimes et une cinquantaine d’autres représentants de la loi sont à nos trousses.
    — Il règne mucho consternation, faut bien le reconnaître », a admis Pierce.
    Il a défait la boucle d’une de ses sacoches de selle et compté quinze billets de vingt dollars prélevés dans une enveloppe blanche flétrie parsemée d’empreintes de doigts marron. Il a noué la bride de chaque cheval à la queue de celui qui le précédait et lorsqu’ils ont tous été en file derrière lui, il s’est hissé en selle et a tamponné son nez gros comme le pouce avec son mouchoir blanc.
    « Je ne suis que le garçon de courses d’Annie Walker, a-t-il déclaré. Elle n’en ferait pas un drame si je rendais mon tablier pour m’adonner à des activités plus gratifiantes.
    — Je le signalerai à Bob, ai-je répondu.
    — Et moi, j’inscrirai ton nom dans ma bible de famille », a-t-il répliqué.
     
     
    Blackface Charley Bryant habita pendant la moitié du mois de juin au Rock Island Hotel, à Hennessey, une trentaine de kilomètres au nord de Kingfisher. L’hôtel devait son nom à l’embranchement ferroviaire qui desservait la ville et il était géré par une ravissante tenancière du nom de Jean Thorne et son frère, qui avaient connu Bryant du temps où il était cow-boy. Pour un dollar par jour, Bryant jouissait d’un lit à ressorts, d’une commode et d’un fauteuil rembourré de coton garni d’une têtière en crochet sur laquelle il avait épinglé l’avis de recherche émis à l’encontre du meurtrier du guichetier de Wharton. Miss Thorne lui montait ses repas sur un plateau, appliquait des cataplasmes sur son estomac et ses cuisses marbrées de rouge à cause de l’infection et lavait son visage en sueur avec un gant de toilette. Mais il se lassa d’être materné et, un mardi à la tombée de la nuit, il descendit en boitant, écorça une branche arrachée à un arbre de la cour afin de se confectionner une canne et se rendit à un camp de vachers de Buffalo Springs, où étaient regroupés cinq cents têtes de bétail et quelques cow-boys dormant sous des tentes de l’armée confédérée. Il payait cinq cents pour la soupe, dormait sur sa couverture sous un lit de camp militaire et, certains après-midi, accomplissait plus d’une soixantaine de kilomètres pour se faire soigner par la squaw de Jim Riley. Tous les vachers ne juraient que par elle. Elle était capable de guérir la calvitie, le croup et les rhumatismes  – ainsi que les verrues, en urinant sur vos mains. J’ignore ce qu’elle faisait à Bryant, hormis qu’elle utilisait une pipette en verre de chimiste.
    Mon frère eut vent de ce traitement et, pour asticoter Bryant, lui adressa, chez Jean Thorne, la réclame suivante, découpée dans le journal : « Petites natures ! Hommes à la vitalité déficiente, par suite d’excès d’étude ou de travail, de tension nerveuse ou de mélancolie, de surmenage sexuel à l’âge mûr ou de folies de jeunesse… Triomphez sans mal de tous ces désordres grâce au nouveau remède fortifiant des docteurs Searles & Searles. »
    Au-dessous de quoi Bob avait rajouté : « Sinon, tu peux aussi envisager les comprimés Ripans. Ils soulagent l’estomac, le foie et les boyaux. C’est l’antidote idéal contre les affections hépatiques, la néphrite chronique, le catarrhe, la colique, l’urticaire, les nausées, la gourme, la scrofule, la paresse hépatique, les remontées acides et les plaques sur le visage. »
    Mon frère Bob avait vingt fois plus de cran que moi. J’aurais été terrifié que Bryant me tue pour un truc comme ça, mais pour autant que je sache, Charley se contenta de jeter la lettre au feu.
     
     
    Cet été-là, je pris mes quartiers à environ vingt-cinq kilomètres du bâtiment principal du ranch de Jim Riley, dont je surveillais la clôture sud pour deux dollars par semaine, tout en creusant à la pelle et à la pioche un abri de cinq mètres et demi de côté que j’avais délimité avec des crampons de chemin de fer. Bryant y faisait parfois halte pour me regarder en crachotant du tabac à chiquer, appuyé sur sa canne en frêne, tandis que j’excavais l’argile rouge, pieds et torse nus. J’obtins une fosse d’à peu près un mètre vingt de profondeur, que je pourvus d’une charpente de grosses branches, et lorsque j’eus fini, je disposais

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