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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emma Locatelli
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encore, qui suintaient la mort et entre lesquelles leurs deux vies agonisaient.
    — Tu n’aurais jamais dû venir, Annia. Rentre chez nous.
    — Chez nous ? Il n’y a plus de chez nous. À l’issue de ton procès, Antonin a décrété la confiscation de tous nos biens. Nous n’avons plus rien.
    Et, comme elle cachait son visage ravagé par les pleurs, Pomponius lui saisit les poignets :
    — Qu’importe, puisque tu ne pouvais pas rester à Rome, dit-il gravement. Antonin est assez fou pour s’en prendre à tous ceux qui m’étaient chers, y compris toi. Je veux que tu quittes cette ville. Va à Pisae, chez mon ami Mucianus. Tu y seras en sécurité.
    — Je préfère retourner chez mes parents.
    — Non, Annia. C’est prendre trop de risques.
    Il caressa d’une main possessive et douce les boucles noires de sa femme.
    — Promets-moi de partir dès demain, insista-t-il sans cacher l’anxiété qui le rongeait.
    Demain ! Le mot fit vaciller Annia et elle dut s’agripper aux épaules de Pomponius pour ne pas s’écrouler. Demain… Ce simple mot suffit à les replonger tous les deux dans l’insupportable réalité.
    Alors, ils cessèrent de parler, de peur que d’autres mots ne les ramènent à leur terreur, gâchent ce dernier moment d’intimité, si précieux. Ils s’enlacèrent plus fort qu’ils ne l’avaient jamais fait, cherchant l’un dans l’autre la force surhumaine qui leur permettrait de tout oublier. Ce fut une étreinte sublime et triste, une confusion des chairs et de l’âme pour un ultime adieu. Ils restèrent un long moment à se presser, immobiles, joints l’un à l’autre par le contact de leurs deux corps, leur esprit remontant d’une manière fulgurante toute l’histoire de leur passion, se rappelant les souvenirs de leur vie commune, de leur tendresse, de tout ce qu’ils avaient ressenti ensemble, de tout ce qui les avait unis, des mille choses intimes qu’ils avaient partagées.
    — J’ai été le plus comblé des hommes, murmura-t-il tandis qu’ils se séparaient enfin. Il n’y a pas eu un seul jour où je n’aie mesuré la chance d’avoir à mes côtés une femme telle que toi.
    Il soupira :
    — Ne pleure plus, Annia, sois courageuse.
    Alors, par une tension formidable de volonté, elle cessa de sangloter, s’obligea à ce que plus aucune crispation de douleur ne déformât son visage. Mais sur sa joue inondée, une larme, plus grosse que les autres, une larme ronde et brillante comme une perle, continuait de rouler très lentement.

CHAPITRE XXX
    Annia ne put trouver le repos cette nuit-là. Dès qu’elle s’assoupissait un peu, d’effroyables visions défilaient devant ses yeux. Elle assistait à la mort de Pomponius, comme si elle eût été là, sur place, spectatrice impuissante et paralysée. Et la vision du corps sans vie de son époux s’écroulant à ses pieds la réveillait aussitôt en sursaut. Alors elle mordait son poing pour ne pas hurler, se tournait et se retournait sur son lit trempé de sueur, poussant des gémissements douloureux.
    Dans son cachot, Pomponius ne dormit pas davantage. Chaque bruit de pas qui résonnait sur la voûte du Tullianum le sortait brusquement de son sommeil et le laissait hagard, le cœur battant. Lorsqu’à l’aube, la trappe qui fermait la minuscule salle souterraine s’ouvrit enfin, il sut que l’heure était venue et en éprouva un certain soulagement.
    Une lumière blafarde fit irruption dans l’ombre de son réduit et un courant d’air froid le pénétra jusqu’à l’os. Quatre gardes pénétrèrent dans le cachot et l’entourèrent sans un mot. Le sénateur se leva de sa paillasse et se tint debout devant eux, leur signifiant ainsi qu’il souhaitait mourir dignement. Comme aucun de ses exécuteurs, visiblement impressionnés, ne se décidait à agir, il leur facilita la tâche en faisant deux pas dans leur direction, jusqu’à ce que se tende la chaîne qui le reliait au mur.
    — Je suis prêt, dit-il simplement.
    Prêt, il l’était vraiment ; il avait prié les dieux et il s’était adressé aux mânes, en leur recommandant la sauvegarde de tous les êtres qui lui étaient précieux, en particulier Annia. Et surtout, il s’était convaincu que cette fin n’était ni tragique ni honteuse, mais volontaire, une belle fin, en parfaite conformité avec la cause qu’il avait toujours servie et les principes qui avaient guidé toute son existence. Persuadé qu’il sacrifiait

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