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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emma Locatelli
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comme un enfant pris en faute.
    — Tu as pris de quoi écrire ? demanda l’empereur.
    — Oui, maître.
    Il sortit aussitôt de sa theca (23) uneplume taillée et des feuilles de parchemin.
    — Va chercher quelque chose pour t’asseoir et rejoins-nous.
    Sur cette injonction, le scribe partit promptement. Il réapparut quelques instants après en tenant sous le bras un siège portatif sans dossier et un petit coussin.
    Macrin se mit à marcher lentement à travers la chambre, en tripotant d’un air embarrassé les poils de sa barbe grisonnante et frisée.
    — J’ai trop tardé à écrire cette lettre, avoua-t-il à Épagathos qui l’observait à la dérobée. J’aurais dû entreprendre cette corvée il y a plusieurs mois.
    Ainsi était Macrin. Tantôt suffisant, comme le noble qu’il rêvait d’être, ou plutôt comme l’empereur qu’il s’imaginait être devenu, tantôt emprunté et complexé par son manque de volonté, incapable de prendre des décisions importantes.
    — Pourquoi ? De quoi avais-tu peur ? interrogea Épagathos. Tu as été proclamé empereur par tes troupes, le Sénat n’a pas le pouvoir de te refuser la pourpre.
    — C’est vrai, mais il faut néanmoins suivre la procédure. Le Sénat doit approuver l’acclamation des soldats, conformément à la tradition. Seuls les Pères conscrits peuvent m’accorder les investitures et me concéder les titres honorifiques.
    — Bah ! fit Épagathos en haussant les épaules, ce ne sont plus que des formalités.
    — Certes, mais des formalités par lesquelles il me faut obligatoirement passer, répliqua Macrin d’un air soucieux.
    — Eh bien, fit Épagathos avec enthousiasme, commençons ! Les sénateurs n’ont strictement rien à te reprocher. Je crois même savoir qu’ils te sont reconnaissants de les avoir débarrassés de Caracalla, cet ignoble tyran fratricide. Sans compter que ta conduite a été exemplaire… Ton premier geste d’empereur n’a-t-il pas été de faire exécuter Martialis, son assassin ?
    Une légère rougeur monta aux joues creuses de Macrin.
    Comme venait de le lui rappeler Épagathos, non sans une certaine ironie d’ailleurs, il avait effectivement mis à mort le meurtrier de Caracalla. Mais de nombreux sénateurs soupçonnaient le centurion Martialis d’avoir agi sur son ordre.
    Cet acte n’était donc pas des plus glorieux et Macrin savait qu’il devrait soigneusement éviter de se vanter, dans sa lettre, d’avoir fait exécuter l’homme dont il avait secrètement dirigé le bras.
    — Tu as fait élever à Carrhes un temple à la mémoire de Caracalla et offert de magnifiques funérailles à sa défunte mère, renchérit Épagathos. Quelles autres preuves de ta bienveillance leur faut-il donc ?
    L’empereur sentit soudain sa gorge se contracter. Son favori se raillait-il de lui ou pensait-il sincèrement ce qu’il disait ?
    Il avait effectivement fait construire un temple en hommage à Caracalla, mais c’était uniquement pour détourner la colère des prétoriens fidèles à l’empereur.
    Quant à Julia Domna, en l’exilant à Antioche, il avait largement contribué à son suicide, et de cela non plus personne ne doutait.
    Il déglutit avec peine et bredouilla :
    — Et si nous écrivions cette lettre ?
    Aussitôt, Philophorus trempa sa plume dans le mélange de suie et de gomme.
    — Que dois-je écrire, dominus ? demanda-t-il.
    Macrin lança à son favori un regard indécis.
    — Puis-je me permettre ? demanda celui-ci, voyant que son maître, manifestement, attendait son aide.
    Le vieil homme acquiesça. Il avait toute confiance dans les capacités de l’affranchi. Épagathos était un homme fin et son érudition était impressionnante. Macrin le savait amateur de poésie et de philosophie et surtout, passionné d’histoire. Il avait lu les œuvres de Salluste, de Cornélius Nepos et de Tite-Live, dont il citait souvent les plus célèbres passages. Il s’exprimait avec aisance et maîtrisait l’art de l’éloquence. Très tôt, Macrin avait trouvé en lui un conseiller avisé et il appréciait la concision de sa pensée, même si sa verve moqueuse le mettait parfois mal à l’aise.
    — Si tu étais un sénateur, demanda Épagathos en prenant la pose, quels seraient, d’après toi, les plus grands empereurs de Rome ?
    Comme Macrin tardait à répondre, l’affranchi lui posa une autre question :
    — Serait-ce Tibère ?
    — Non ! s’exclama l’empereur

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