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Le secret de la femme en bleu

Le secret de la femme en bleu

Titel: Le secret de la femme en bleu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
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que j’aie jamais rencontré, dit le religieux d’une voix sourde à celui qui se tenait à présent près de lui. Du diable si je m’attendais à te trouver ici… Mais tu as été bien inspiré. Je commençais à me sentir un peu seul.
    Les deux hommes se donnèrent une accolade.
    — Me diras-tu, cher « marquis des clairières », murmura alors Timothée, ce que tu fais dans cet accoutrement, te faufilant entre les halliers, avec la prudence d’un loup-cervier ?
    — Comme le loup-cervier, je quête mon gibier !
    — Le même que le mien sans doute. Étonnante rencontre, non ? Remercions donc la Providence de nous avoir conduits sur le chemin l’un de l’autre.
    — La Providence ? Elle a bon dos. Mais tu ne manqueras pas de me dire comment elle se nomme en l’occurrence et comment…
    Doremus s’interrompit brusquement, plaça un doigt sur ses lèvres et se laissa glisser à terre, imité par le Grec. Un cheval que son cavalier conduisait à vive allure passa non loin de l’endroit où ils s’étaient tapis. Ils attendirent ainsi quelques instants par précaution. Puis ils se relevèrent et reprirent leur marche vers la ferme en progressant sur deux sentiers parallèles sans se perdre de vue. Ils parvinrent de la sorte à la lisière et se dissimulèrent derrière les fourrés.
    Devant eux s’étendait une prairie en pente douce, en haut de laquelle se dressait une grande chaumière, avec étable, grange et resserres. Sur la droite, un jeune garçon essuyait un cheval en sueur. Celui qui l’avait monté se désaltérait à longs traits. Non loin, une forte femme, la fermière sans doute, auprès de laquelle se trouvait une fillette, faisait face à trois hommes vêtus comme des Aquitains. La conversation ne devait pas être aisée car l’un d’eux cherchait à se faire comprendre en criant, parce qu’il croyait, comme beaucoup, que la force de la voix permet de surmonter les difficultés qu’engendrent les différences de langages. Observant plus attentivement le cavalier qui se rapprochait de ses amis, Doremus crut reconnaître celui qui l’avait nargué à l’arrière de la barque.
    Le « marquis des clairières » et le Goupil tinrent l’affût un moment. Comme Timothée, malgré lui, avait fait craquer une branche morte, la fillette jeta un regard dans sa direction, puis, n’ayant rien aperçu de suspect et n’entendant plus rien, se blottit contre sa mère.
    Cette alerte décida les deux guetteurs à partir sans tarder. D’ailleurs ils pouvaient estimer que les va-et-vient des uns et des autres ne leur apprendraient plus rien d’important. Enfin les constatations qu’ils avaient faites commandaient sans doute des initiatives. Ils s’éloignèrent donc de la lisière en rampant sur trois cents pas. S’étant rejoints sur la sente qui conduisait à la fontaine à l’orme, ils pressèrent le pas. Quand ils y furent parvenus, ils se désaltérèrent et se reposèrent avant de reprendre la route.
     
    Le comte Childebrand avait envoyé son écuyer auprès de Régina pour lui annoncer sa visite. Cette procédure, quelque peu solennelle, alerta celle-ci. Aussi ne fut-elle pas surprise quand il se présenta à elle avec un air de sévérité qui dissimulait mal son souci.
    Elle accueillit le Nibelung avec une légère révérence et désigna en souriant une table placée près de la cheminée où flambaient quelques bûches. Elle y avait fait disposer une collation, faite d’un cuissot de chevreuil et d’oiseaux rôtis à la broche, accompagnés de beignets au miel saupoudrés d’anis. Elle savait Childebrand friand de gibier. Ayant pris place, celui-ci invita son hôtesse à s’asseoir à sa table ; puis il commença à découper et à manger un morceau de venaison tandis qu’elle savourait une caille dont elle jeta les restes dans le feu.
    — On vient de m’apprendre, annonça-t-elle après qu’ils eurent échangé des propos convenus, qu’Odile, la malheureuse, n’a pas survécu à ses blessures. Elle est morte dans la nuit.
    Le comte montra un visage attristé.
    — Je savais, dit-il, qu’elle était à l’agonie.
    Il se leva, se dirigea à pas lents vers un bassin posé sur un trépied et empli d’eau parfumée, se lava les mains, les essuya à un linge de lin fin et revint s’asseoir.
    — Cependant, reprit-il, à défaut de nous apporter un témoignage, elle a quand même, avant de mourir, dévoilé un secret de grande importance, oui, et qui peut changer le cours de

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