Le Secret de l'enclos du Temple
templiers.
Bussy haussa un sourcil surpris.
— Je réunis et je conserve tout ce qui vient d'eux. Il y a quelques mois, parlant avec votre oncle, il m'a révélé que vous aviez trouvé un coffre avec un message écrit de la main de Jacques de Molay.
— J'ai effectivement découvert une cassette, monseigneur, mais avec un message si abscons que je ne sais ce que vous en ferez, dit Bussy après un froncement de sourcils en apprenant les bavardages de son oncle.
— Je n'en ferai rien ! Je souhaite seulement l'avoir dans mon cabinet de curiosité… En échange de cette cassette et de ce parchemin, qui sont au demeurant sans valeur pour vous, je me fais fort d'obtenir des parlementaires, et même du cardinal, l'arrêt de toute poursuite contre vous.
Bussy resta silencieux un instant. Il ne s'attendait nullement à cette proposition. Que risquait-il à donner le parchemin puisqu'il en connaissait le contenu ? Que Conti parvienne à le déchiffrer et que le trésor lui échappe ? Mais était-ce important si, dans quelques mois, il était condamné aux galères perpétuelles ?
— Puis-je vous donner ma réponse dans quelques jours, monseigneur ? s'entendit-il déclarer.
— Évidemment, mais n'attendez pas trop. Le Parlement va reprendre sous peu son activité judiciaire. Une fois votre affaire inscrite et en instruction, je ne pourrai plus rien pour vous.
Bussy quitta le prince fort embarrassé. Il se pensait prêt à abandonner ce qu'il savait sur le trésor des templiers – s'il y avait trésor ! – mais Conti était bien jeune. Avait-il vraiment l'influence dont il se flattait sur les parlementaires ? Afin d'en avoir le cœur net, il se rendit le soir chez Molé.
Le premier président le reçut avec un mélange de surprise et de curiosité. Que lui voulait ce M. de Bussy, dit proche du prince de Condé ?
Brièvement, le comte lui expliqua – sans, bien sûr, lui parler des conditions mises en avant – la proposition qu'Armand de Bourbon lui avait faite.
— Mais Mgr de Conti ne pèse rien au Parlement, monsieur ! Les négociations avec la Cour ont été menées par M. le duc d'Orléans et par M. Séguier. Personne n'a jamais écouté les suggestions de ce prétentieux !
Ainsi, l'offre relevait de l'imposture ! s'énerva Bussy, finalement fort déçu. Il en profita pour demander au président des nouvelles de son affaire, mais, à son expression soucieuse et évasive, il comprit que les choses ne s'arrangeaient en rien.
— Pour une fois, le cardinal et quelques messieurs du Parlement sont du même avis, fit Molé en grimaçant. Ils veulent vous punir. Mazarin pour que cessent les enlèvements, et ces messieurs afin de nuire au prince de Condé.
Bussy se donna quelques jours de réflexion, puis ayant reçu des ordres du roi pour établir sa compagnie de chevau-légers en garnison dans Autun, il répondit à Armand de Bourbon qu'il le remerciait de sa bonté mais espérait prouver lui-même son innocence.
*
Gaston revint de Mercy le 11 novembre, jour de la Saint-Martin. C'était la rentrée officielle du Parlement. En arrivant rue de la Verrerie, il trouva un billet de Séguier lui demandant de venir le voir d'urgence.
Le chancelier lui expliqua que Nicolas Fouquet, jusqu'à présent intendant de Paris, venait d'acheter la charge de procureur général au Parlement et que la première affaire à laquelle il s'intéressait était l'enlèvement de Mme de Miramion. Sans doute à la demande de la famille, qu'il connaissait, il proposait de requérir rapidement et de faire enfermer M. de Bussy à la Conciergerie le temps de préparer son procès.
Selon Séguier, une telle précipitation avait de quoi étonner. Certes, Fouquet était proche des dévots, comme l'était la famille de Mme de Miramion, mais cela n'expliquait pas tout. Le chancelier s'était donc renseigné. La proposition du nouveau procureur général venait d'Ondedei et de l'abbé Basile, tous deux au service de Mazarin. Séguier avait donc attiré l'attention du cardinal sur les conséquences fâcheuses qu'il y aurait à emprisonner un capitaine du prince de Condé. Le cardinal lui avait rétorqué qu'il ne connaissait pas les détails de l'affaire, sinon qu'il savait par Ondedei que le frère de Fouquet semblait en vouloir particulièrement à Bussy. Séguier lui avait donc déclaré que l'enquête était traitée par la prévôté de l'Hôtel du roi et que Fouquet n'avait pas à s'y immiscer. Si c'était
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