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Le Secret de l'enclos du Temple

Le Secret de l'enclos du Temple

Titel: Le Secret de l'enclos du Temple Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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les esprits sont plus qu'aigris. Tout cela doit changer ! Le Parlement ouvre enfin les yeux et a décidé de refuser le Tarif, et tout ce que propose ce fripon !
    Comme son fils restait silencieux, le notaire considéra qu'il approuvait son discours, aussi poursuivit-il avec encore plus de hargne :
    — Nous avons supporté la taxe des aisés, Louis. Près de un million de livres a ainsi été levé pour l'État ! Malgré cela, les gages des officiers ont été réduits du quart pour les cours souveraines, et de moitié pour les autres. L'édit du Tarif a été la goutte d'eau ! Ignores-tu que je dois maintenant payer des sommes astronomiques pour les produits de ta ferme !
    — Je le sais, bien sûr, reconnut Louis en soupirant.
    La seigneurie de Mercy avait une ferme. D'année en année, celle-ci donnait davantage grâce au talent de son fermier. Au début, la production avait à peine été suffisante pour les gens du château, puis elle avait nourri les habitants de Mercy. Ensuite, Louis avait pu vendre le surplus à Luzarches, le village voisin. Mais la ferme produisant encore trop, une ou deux fois par mois, à la belle saison, il chargeait Esprit Ferrant, un jeune paysan de Mercy un temps attiré par la gloire des armes mais plus craintif qu'un lapin, d'atteler une charrette à un vieux cheval et de se rendre à l'étude Fronsac avec l'excédent de récoltes. Selon la saison, il apportait des fruits, des légumes, des sacs de céréales et de farine de froment, parfois un cochon ou un mouton à préparer. M. Fronsac père achetait tout, non que ce soit moins cher qu'aux grandes halles, mais parce qu'il s'agissait des produits de son fils. Seulement, à cause de l'édit du Tarif, il devait maintenant payer de lourdes taxes, ce qui le faisait enrager.
    — Le Parlement n'a pas le pouvoir de s'opposer au roi, dit Louis en secouant la tête.
    — Certains prétendent que le Parlement vient de l'assemblée des Francs qui avait donné le pouvoir à Pharamond, et donc que le roi ne peut faire les lois sans lui, intervint Denis.
    — Billevesée ! répliqua Louis. Au collège de Clermont, devant les pères jésuites, j'ai défendu que le roi ne tient son état que de Dieu et de son épée . Si le peuple ne peut plus payer la taille, il faut réunir les états généraux, car même si la compagnie des parlementaires s'affiche comme des états généraux au petit pied , nos magistrats ne sont pas mandatés par le peuple, le clergé ou la noblesse ; ils ne représentent qu'eux-mêmes et oublient facilement qu'ils tiennent leur droit à juger par seule délégation du roi.
    — Mais le roi a dix ans, Louis ! fit son père en haussant les épaules.
    — C'est pourquoi je crains que tout ceci n'amène que ruine et misère, car ceux qui se présentent comme les amis du peuple protègent uniquement leurs intérêts. La véritable lutte est entre le roi et ceux qui défendent leurs privilèges. Richelieu – que pourtant je n'appréciais pas – savait les tenir en laisse quand il leur assenait : Si vous continuez, je vous rognerai les ongles de si près qu'il vous en cuira !
    La saillie déclencha le rire de Denis, mais M. Fronsac fit aussitôt remarquer à son fils que cette menace avait été faite à M. Séguier, lorsqu'il était lui-même président du Parlement. Ce même Séguier qui, maintenant chancelier, s'opposait aux parlementaires !
    — Sais-tu, Louis, intervint Denis, désireux de montrer qu'il n'était plus un petit garçon, que les comptants, ces dépenses de la Cour pas vérifiées par la Chambre des comptes, sont passés en cinquante ans de deux millions, sous la bonne administration de M. de Sully, à plus de cinquante millions !
    Louis soupira, puis opina sans répondre. Il savait tout cela.
    *
    Après le dîner, il se rendit un moment dans la cuisine où tous les domestiques se tenaient près du feu, partageant un bouillon de poule. Antoinette était assise avec son fils Nicolas, alors que Jeannette et Mme Malet demeuraient debout, devant une grosse marmite fumante. Louis s'installa à côté de Nicolas. Il avait toujours aimé cette proximité de cuisine avec des domestiques qu'il connaissait depuis longtemps. Ils parlèrent du passé, de ce jour de 1624 où, arrivant du collège en croupe sur le cheval de son grand-père, il avait découvert les frères Guillaume que son père venait d'engager pour protéger l'étude. Son cocher et secrétaire, Nicolas, avait alors six ans et ne

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