Le secret d'Eleusis

cessé d’aboyer. Sans doute avait-il compris que ses efforts étaient vains ou s’était-il simplement fatigué.
    — Si on se séparait ? suggéra Iain. Vous fouillez la maison et vous essayez de déchiffrer le code. Moi, je vais explorer la vallée et les collines. Si Petitier a découvert un site minoen, ce n’est pas ici qu’on va le trouver. Et avec votre cheville...
    — Bonne idée, admit Gaëlle.
    — Bien, dit Iain en se frottant les mains. Alors essayons de nous concocter un petit déjeuner et allons-y.

Chapitre 29
    I
    Alexei Nergadze lâcha sa tasse de café. Des camions bondés de soldats armés sortaient de la forêt et chargeaient en direction du château. Il les voyait, mais n’y croyait pas. Ce n’était pas possible. Pas ici. Ces véhicules n’avaient pas pu arriver au château sans avoir été repérés par les hommes de guet postés dans les villages. À moins qu’ils ne soient pas passés par les villages. Ce qui voulait dire qu’ils avaient été aéroportés par des hélicoptères de transport...
    Tout à coup, il entendit la trépidation d’un rotor au loin et vit un couple de cygnes blancs s’envoler depuis le lac en ne laissant que son reflet sur la surface ondoyante. Une seconde plus tard, une formation d’hélicoptères apparut au-dessus des bois, de l’autre côté du lac, et se déploya à toute allure. Cela ne pouvait pas arriver. Et pourtant... Il comprit que leur foutu président avait décidé d’agir avant les élections. Et qu’il venait de lui fournir l’excuse rêvée. Il regarda avec une haine viscérale le policier étendu à ses pieds.
    — Vous êtes mort, dit-il en serrant son fusil.
    Il épaula et visa la tête.
    — Vous êtes mort, répéta-t-il.
    Il n’entendit pas la balle supersonique du sniper. Son fusil tomba avec fracas. Il le rejoignit aussitôt.
    II
    À l’arrière de la fourgonnette, une bouteille d’eau vide roulait sur le plancher à chaque virage. Édouard était agacé par ce bruit incessant, mais il ne la ramassa pas, car ce va-et-vient lui donnait un prétexte pour éviter de regarder Knox. L’archéologue avait les poignets attachés dans le dos et ses jambes, maintenues l’une contre l’autre par une bande de ruban adhésif, lui donnaient l’allure d’un Triton. Sa bouche aussi était scotchée ; apparemment pris d’une crise de panique, il respirait vite et difficilement par le nez.
    Ils traversèrent Kifissia et quittèrent l’agglomération. Bientôt, le gravier crissa sous les roues de la fourgonnette. Après avoir remonté l’allée, le véhicule s’arrêta devant la maison de Mikhaïl. Davit vint ouvrir les portes arrière en veillant à ne pas croiser le regard d’Édouard, comme s’il se sentait aussi honteux que lui mais ne voulait pas le reconnaître. Il se pencha vers Knox et le jeta sur son épaule. Puis il l’emmena à l’intérieur et le lâcha devant le canapé.
    Nadia était menottée à un radiateur du rez-de-chaussée.
    — Je suis désolée, gémit-elle lorsqu’elle vit Knox. Je suis désolée.
    Il pâlit en voyant sa main réduite en purée. Il secoua la tête, peut-être pour lui dire qu’elle n’y était pour rien, ou bien pour nier l’horrible réalité à laquelle il était confronté.
    Mikhaïl s’assit sur le canapé et sourit poliment à Knox, tel un chirurgien faisant connaissance avec son prochain patient. Il lui arracha le ruban adhésif de la bouche et en fit une boule, qu’il jeta par terre.
    — Je voulais que vous voyiez votre amie Nadia, commença-t-il. Je voulais que vous sachiez qu’elle vous a trahi. Ce n’est pas grave, une trahison, à moins que vous ne soyez pas de cet avis.
    Il avait fait les poches de Knox en chemin. Il exhiba son téléphone portable, sur lequel était affichée la photo que Gaëlle avait envoyée d’elle depuis la Crète. Puis il ouvrit l’écrin en similicuir rouge et montra à tout le monde la bague qui se trouvait à l’intérieur.
    — Vous étiez sur le point de faire votre demande ? s’enquit-il.
    — Rendez-moi mes affaires, exigea Knox.
    — À moins que vous ne l’ayez déjà faite et qu’elle ait refusé.
    — Allez vous faire foutre.
    — Je comprendrais qu’elle ait refusé si c’est le mieux que vous puissiez lui offrir... Je parie que c’est pour ça qu’elle s’est barrée là-bas, à Agios Georgios. Elle a peut-être envie d’un autre homme. J’ai apprécié notre petit échange dans l’ascenseur et je pense