Le secret d'Eleusis
Mikhaïl sourit et aboya des ordres en géorgien. Le géant sortit et revint avec un banc de jardin, mouillé par une récente averse.
— Mettez-le là-dessus, ordonna Mikhaïl en parlant de nouveau en anglais, sans doute pour que Knox sache ce qui l’attendait. Attachez-le bien. Je ne veux pas qu’il bouge.
Knox essaya de se débattre mais, pieds et poings liés, il n’avait aucune chance. Il se retrouva momifié sur le banc par plusieurs bandes de ruban adhésif. Ses poignets lui rentraient dans le creux des reins. Mikhaïl s’en alla brusquement. Knox l’entendit gravir l’escalier et le vit revenir avec un bâillon-boule en cuir. Il résista aussi longtemps qu’il put en serrant les mâchoires, en tournant la tête d’un côté et de l’autre, en respirant par le nez. Imperturbable, Mikhaïl lui pinça les narines et attendit qu’il ne puisse plus respirer. Puis il lui enfonça le bâillon dans la bouche et le lui attacha derrière la tête en lui sciant les lèvres et les gencives, avant de le serrer encore un peu, simplement parce qu’il pouvait le faire.
— Laissez-moi partir ! implora Knox.
Mais ses paroles étaient incompréhensibles.
Davit, allez me chercher une serviette, dit Mikhaïl.
— Quel genre de serviette, monsieur ? demanda Davit.
— Une serviette à main, pas trop grande.
— Oui, monsieur.
Davit prit une serviette verte dans une des salles de bains du rez-de-chaussée.
— Est-ce que ça fera l’affaire ? demanda-t-il.
— Parfait ! s’exclama Mikhaïl.
Il s’approcha de Knox pour lui faire une confidence.
— Quand je vivais aux États-Unis, toute cette polémique sur les nouvelles techniques d’interrogatoire a éveillé ma curiosité, avoua-t-il.
Il plia la serviette en deux et la posa sur le visage de sa victime. Knox ne vit plus rien, excepté le tissu, que le soleil faisait légèrement rougeoyer. Il entendit des pas s’éloigner, les placards de la cuisine s’ouvrir et se refermer. Un bruit de casseroles résonna, comme si on en alignait plusieurs sur un comptoir. Le robinet se mit à couler. L’eau éclaboussa le métal avec un tambourinement sonore, qui s’amenuisa progressivement. Un des hommes remplit un récipient, une grosse casserole ou une cocotte à en juger par le temps de l’opération. Puis la procédure fut répétée avec une seconde casserole. Enfin, les pas revinrent dans le séjour.
Knox avait entendu parler de la simulation de noyade, bien sûr, mais il ne s’y était pas intéressé dans le détail, car jamais il n’avait imaginé qu’il en serait victime un jour. Par conséquent, il ne savait pas ce qui allait se passer ni comment résister.
— Levez-lui les pieds, ordonna Mikhaïl. Il faut qu’ils soient plus hauts que la tête.
L’extrémité du banc fut soulevée à environ trente centimètres du sol. Cette position était déjà inconfortable en soi. Knox sentait le sang lui monter à la tête, mais ce n’était rien comparé à son angoisse face à ce qui allait se passer. Il prit une profonde respiration et retint son souffle, juste avant que le contenu de la première casserole ne soit versé sur la serviette. L’eau dégoulina sur ses joues, mais une grande partie fut absorbée par la serviette et s’engouffra dans sa bouche, ouverte par le mors, et s’écoula dans sa gorge. Il s’efforça de ne pas tousser.
— Il retient sa respiration, observa Mikhaïl.
Knox reçut un coup de poing dans le plexus solaire, ce qui l’obligea à expirer. Il inspira juste au moment où le contenu de la seconde casserole était versé au-dessus de sa bouche. L’eau pénétra dans ses poumons. Secoué de convulsions, tout son corps s’arqua dans le but unique d’obtenir de l’air. Il cracha tout ce qu’il put, inspira de nouveau mais ne fit qu’aspirer l’eau retenue par la serviette. Il ne pouvait pas respirer ! Le manque d’air était insupportable, absolument terrifiant. Il n’avait jamais rien connu de tel. Il se débattit et se jeta sur le côté avec une telle violence qu’il faillit se déboîter l’épaule, mais il n’avait toujours pas d’air. Sa tête était prête à exploser ; son cœur était au bord de la rupture. Il sentit l’obscurité le happer et ce fut un véritable soulagement lorsqu’elle l’enveloppa comme un voile et l’emporta.
Chapitre 30
I
Le berger allemand aboya furieusement lorsqu’il vit Iain s’en aller mais, après avoir constaté son impuissance, il se mit
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