Le secret d'Eleusis

magnifique robe de velours bleu. Les jumelles, Eliso et Lila, avaient la même tenue : un chemisier crème sur une jupe noire, longue jusqu’aux chevilles. Quant à Kiko, il arborait son tee-shirt de rugby blanc et rouge signé par l’équipe nationale de Géorgie.
    — Qu’est-ce vous racontez ? bredouilla Édouard.
    — Ils seront mes invités, répondit Ilya, jusqu’à votre retour d’Athènes.
    Édouard posa la main sur sa poche, sentit les contours de son téléphone portable contre sa cuisse. Il songea aussitôt à appeler Nina ou à lui envoyer un texto pour lui dire de mettre les enfants dans la voiture et de les emmener quelque part, n’importe où.
    — Ne vous donnez pas cette peine, le prévint Ilya, qui avait lu dans ses pensées. Ils sont déjà mes invités. À l’heure qu’il est, mon petit-fils Alexei est en train de les conduire jusqu’à ma propriété de Nikortsminda.
    — Ils y seront très bien reçus, affirma Sandro. Nous avons une réunion de famille ce week-end. Ce seront des vacances pour eux. L’air frais de la montagne, les promenades à cheval, le bateau, la gastronomie. Que rêver de mieux ?
    — Et puis comme ça, vous n’aurez pas à vous soucier d’eux, renchérit Ilya. Vous pourrez concentrer toute votre énergie sur la réussite de notre projet.
    Il se pencha légèrement en avant.
    — Est-ce clair ? demanda-t-il.
    Édouard sentit ses épaules s’affaisser. Nina l’avait supplié de ne pas frayer avec ces gens-là. Elle l’avait supplié ! Pour la première fois depuis qu’ils étaient mariés, elle s’était agenouillée devant lui, puis elle lui avait pris les mains, avant de les embrasser et de les mouiller de larmes. Mais il ne l’avait pas écoutée. Il s’était cru plus malin qu’elle.
    — Oui, répondit-il. Parfaitement clair.
    III
    Commissariat de police d’Omonia, centre d’Athènes
    L’inspecteur Angelos Migiakis n’était pas de bonne humeur. Il l’était rarement lorsque le devoir l’obligeait à reporter ses visites de l’après-midi à sa maîtresse. Et encore moins lorsqu’il s’agissait de démêler une nouvelle affaire menaçant de couler son service déjà entaché de scandales.
    — Alors, qu’a dit Loukas ? demanda-t-il.
    — Il a confirmé la version de Grigorias, répondit Theofanis. D’après lui, Augustin Pascal s’en est pris sans raison à Grigorias, qui n’a fait que se défendre.
    — Alors quel est le problème ?
    — Loukas ment, voilà le problème !
    — Vous en êtes sûr ?
    — Je le connais depuis quinze ans. C’est la première fois qu’il évite mon regard.
    — Merde ! s’exclama Angelos.
    Il saisit un verre sur son bureau, s’apprêta à le jeter contre le mur d’en face et se retint juste à temps. Il était colérique, mais il faisait de son mieux pour garder son sang-froid.
    — Je pense que je peux lui soutirer la vérité en insistant un peu, déclara Theofanis, mais je voulais vous en parler d’abord, car nous n’avons vraiment pas besoin d’un nouveau scandale.
    — Je ne vous le fais pas dire, soupira Angelos en reposant le verre sur son bureau. À votre avis, que s’est-il passé ?
    — Je n’y étais pas, mais je suis prêt à parier que ce Knox a dit la vérité, affirma Theofanis en désignant du menton la déposition de l’intéressé. Grigorias a peloté la fille. Le Français l’a vu et s’est emporté. C’est sa petite amie, après tout. Ensuite Grigorias est devenu fou.
    Il grimaça de dégoût.
    — Si vous voyiez ce qu’il a fait..., murmura-t-il.
    — Ce n’est pas beau à voir ?
    — Pas beau du tout.
    Theofanis inspira profondément avant de poursuivre.
    — En ce qui me concerne, je ne suis pas surpris, ajouta-t-il, étant donné la conduite de Grigorias depuis que cette fille l’a quitté. Je vous avais dit qu’il n’était pas prudent de l’envoyer sur le terrain.
    — Alors maintenant, ça va être de ma faute, c’est ça ? cria Angelos.
    — Ce n’est pas ce que j’ai dit.
    — Vous savez très bien qu’on manque de personnel.
    — Oui.
    Angelos tapa du poing sur son bureau.
    — Bon Dieu ! hurla-t-il. Quel imbécile !
    Il soupira et attendit que sa colère retombe.
    — Bon, nous ne pouvons rien faire de mieux que de nous en tenir sa version des faits, estima-t-il. Ce sera notre parole contre la leur. Et ce sont des étrangers.
    — Ce sont aussi des archéologues, fit remarquer Theofanis. Ils sont venus assister à