Le secret d'Eleusis

du décès. Petitier n’est pas mort des suites d’un coup porté à la tête.
    — Quoi ?
    — Il est mort d’une crise cardiaque, probablement provoquée par une overdose. Son système sanguin était imbibé de drogue : cocaïne, opium, amphétamines, acide et j’en passe. Je n’ai jamais vu des taux aussi élevés. Si on faisait réduire son sang, on récupérerait de quoi se faire une fortune.
    — Une overdose..., murmura Knox en pensant à Augustin, encore en soins intensifs.
    — D’après Theofanis, voici ce qui s’est passé : Petitier était toxico. Quand on a passé vingt ans seul, il n’est pas facile de se mêler aux autres et encore moins d’intervenir à un congrès. Il avait donc besoin de drogue et il en a sans doute apporté un bon paquet.
    — C’est pour ça qu’il serrait son sac contre lui, à votre avis ? Parce qu’il était rempli de drogue ?
    — Ça paraît logique. Nous avons essayé de trouver par quel vol il est arrivé à Athènes, mais il ne figure parmi les passagers d’aucune compagnie aérienne. Nous pensons qu’il est venu par bateau pour éviter la fouille de son sac. Lorsqu’il arrive à l’hôtel, il entre dans la chambre d’Augustin, qui le laisse seul. Il est stressé. Il pense qu’il est suivi. Il prend quelque chose. Puis autre chose. Un véritable cocktail de stimulants et de sédatifs, tout ce qu’il a sous la main. Il commence à se sentir mal. Il se sent sale. C’est souvent le cas chez les personnes qui prennent des hallucinogènes. C’est pourquoi il prend une douche. Là, il fait sa première crise cardiaque. Elle n’est pas fatale, mais assez violente pour qu’il tombe. Il se tape la tête contre le robinet et s’ouvre le crâne. Il est désorienté. Il sait qu’il a besoin d’un médecin mais, si on s’aperçoit qu’il a de la drogue, il risque d’être envoyé en prison. Alors il titube hors de la salle de bains, dégoulinant de sang, et sort son sac de voyage sur le balcon. Il l’ouvre nerveusement, le déchire, et jette toutes ses drogues par-dessus la rambarde. Puis il retourne à l’intérieur pour téléphoner. Mais il est trop tard. Il est victime d’une deuxième crise cardiaque, qui le paralyse. Il gît sur le sol, mourant, incapable de réagir, jusqu’à ce qu’Augustin et vous arriviez.
    — LSM..., murmura Knox.
    — Je vous demande pardon ?
    — Ce qu’il a essayé de me dire, ce n’était pas « Élysée », mais « LSM ». C’est une variante du LSD, qu’il a expérimentée. Ce qu’il a ajouté dans son dernier souffle devait être « cocaïne ». Il s’efforçait de me dire quelles drogues il avait prises.
    — J’ai suspendu Grigorias. Je voulais que vous le sachiez. Nous allons mener une enquête indépendante et approfondie. Vous avez ma parole. J’ai envoyé une équipe faire des recherches dans la ruelle située sous le balcon pour voir si on peut remettre la main sur ces drogues.
    — C’est là que se trouvent les poubelles de l’hôtel. J’ai entendu passer les éboueurs...
    Un coup de feu retentit ! Les parois du col en renvoyèrent l’écho lugubre.
    — Bon Dieu ! s’écria Knox. Vous avez entendu ça ?
    — Je m’occupe de l’hélico !
    Knox remit son portable dans sa poche sans cesser de courir. Deux autres coups de feu décuplèrent ses forces. Il atteignit le bord escarpé d’une immense caldeira. Il observa la plaine qui s’étendait à ses pieds, les champs, la ferme, les hautes falaises. Un mouvement inattendu dans une mer d’ajoncs lui attira l’attention. Une silhouette rendue minuscule par la distance avançait vers une autre, blottie dans une petite clairière. Malgré l’éloignement, Knox reconnut aussitôt Gaëlle. Il hurla de toutes ses forces, mais le vent lui rabattit ses cris au visage. Il repéra le long de l’escarpement un sentier qui n’en avait que le nom. Même en prenant des risques, il n’arriverait jamais à temps pour secourir Gaëlle. Mais il y avait une sorte de chemin de ronde tout autour de la caldeira. S’il parvenait à aller jusqu’aux falaises d’en face...
    Les jambes terriblement douloureuses, il rassembla ses dernières forces et reprit sa course.
    III
    Dès que Mikhaïl pointa le Mauser vers elle, Gaëlle se jeta au sol et se cacha sous le tapis d’ajoncs. À côté d’elle, Argo s’agitait dans tous les sens en aboyant furieusement et en entortillant sa laisse. Soudain, il lui échappa et courut ventre à