Le secret d'Eleusis
expert en langues anciennes, mais un de mes collègues l’a immédiatement repéré. Aucun des sceaux en linéaire A n’était déchiffrable, mais deux des sceaux en linéaire B comportaient un mot parfaitement lisible.
— Intéressant...
— Le premier était « or ».
— Et le second ?
Nico lança à Knox un regard lourd de sous-entendus.
— « Toison », répondit-il.
Chapitre 7
I
Abasourdi, Édouard leva les mains en face de Mikhaïl Nergadze, qui pointait son fusil sur lui.
— Ne tirez pas ! supplia-t-il.
— Donnez-moi une bonne raison de ne pas le faire ! lança Mikhaïl.
— Je suis Édouard Zdanevich. Je travaille pour votre père. Il m’a envoyé...
— Vous êtes l’expert en antiquités.
— Oui.
Mikhaïl attendit un peu avant de baisser son arme, peut-être pour prendre le temps d’évaluer la situation, mais plus vraisemblablement pour asseoir son pouvoir.
— Je m’attendais à voir arriver Boris et les autres, expliqua-t-il.
— Ils vont bientôt arriver. Ils avaient une course à...
Un cri étouffé surgit de la chambre, derrière Mikhaïl. Une femme, visiblement terrifiée et en danger. Édouard leva les yeux, stupéfait. Elle cria de nouveau, plus fort, plus distinctement, comme si elle avait réussi à retirer un bâillon. Elle semblait jeune.
— Qui est-ce ? demanda Édouard .
— Je ne vois pas en quoi cela vous regarde, répondit Mikhaïl.
La fille continuait à crier avec angoisse. Paniquée, elle suppliait.
Elle parlait trop vite pour qu’Édouard , qui n’avait que quelques notions de grec, puisse la comprendre, mais la situation était parfaitement claire. Édouard hésita, ce qui fit sourire Mikhaïl, conscient du dilemme auquel il était confronté et curieux de voir comment il allait réagir. Il ne pouvait pas rester sans rien faire. Oubliant sa peur, il gravit les marches de l’escalier, passa devant Mikhaïl et s’arrêta brusquement lorsqu’il vit la fille. Elle était nue sur le matelas. Tous les draps, oreillers et couvertures avaient été jetés par terre. Lorsqu’elle vit Édouard , elle essaya de se tourner sur le côté et de se couvrir de son bras droit. Ses gestes étaient si maladroits qu’il repéra aussitôt que sa main gauche était menottée à la tête de lit. À en juger par ses seins modestes, ses hanches larges et son pubis duveteux, elle devait avoir à peu près quinze ans, comme ses jumelles. Elle avait plusieurs hématomes violets sur les bras et la poitrine, une lésion qui ressemblait à une brûlure de cigarette à côté du nombril, et une grande plaque rouge autour du cou, comme si elle avait failli être asphyxiée. Elle aurait été belle, si ses cheveux mouillés de larmes et de sang n’avaient pas été collés sur son visage. Il y avait aussi des taches rouges sur le matelas, et d’autres de couleur incertaine, qu’Édouard n’avait aucune envie d’analyser. Consterné, il se retourna vers Mikhaïl.
— Que lui avez-vous fait ? cria-t-il.
— Rien dont elle n’ait eu envie, répondit Mikhaïl.
— Comment pouvez-vous dire ça ? Regardez-la ! Elle vous supplie de la laisser partir.
— Ce qu’on dit ne correspond pas toujours à ce qu’on veut.
Édouard secoua la tête, atterré.
— Quel âge a-t-elle ?
— Comment le saurais-je ?
— Cela ne vous a pas traversé l’esprit de demander ?
Mikhaïl éclata de rire.
— Vous la voulez pour vous tout seul, c’est ça ?
— Vous êtes malade.
— Allez-y ! Elle aime ça. Elle en redemande.
— Quel genre d’homme êtes-vous ?
— Le genre que vous seriez si vous en aviez dans le pantalon.
— Je vais la libérer, annonça Édouard. Où est la clé ?
— Je n’en ai pas encore fini avec elle.
— Si, décréta Édouard en regardant Mikhaïl droit dans les yeux, certain que la droiture l’emporterait.
Mais le regard de glace de Mikhaïl ébranla sa confiance. Édouard comprit, trop tard, qu’il avait affaire à un homme très différent des autres, y compris des autres Nergadze. Il sentit son cœur s’emballer, sa bouche se dessécher. Sa chair se mit à produire une odeur rance, l’odeur de sa propre peur. Un souvenir désagréable lui revint spontanément à l’esprit : des années auparavant, alors qu’il attendait une place assise dans un restaurant, à Tbilissi, un ivrogne avait trébuché. Il était tombé sur un homme, qui, assis au bar un verre à la main, avait renversé un peu de
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