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Le souffle de la rose

Le souffle de la rose

Titel: Le souffle de la rose Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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supplie.
    Archambaud d’Arville n’eut aucun doute qu’elle disait la
vérité et lui évitait ainsi le cauchemar de l’interminable remords. Elle avait
choisi pour lui, le dispensant de désobéir au spectre, à la missive romaine
dont il était porteur, lui épargnant d’y obéir.
    — Je... vous pardonne... ma sœur... Merci.
    Esquive d’Estouville accompagna le dernier soupir du
mourant, les larmes ruisselant de ses yeux ambre clair sur son surcot de cuir.
Elle s’accroupit à ses côtés afin de l’allonger et de croiser ses mains sur sa
poitrine ensanglantée, et contempla le beau gisant apaisé. Combien de temps
resta-t-elle là, pleurant des prières pour le salut de l’âme du templier, de la
sienne aussi ? Elle n’aurait su le dire.
    Lorsqu’elle se releva enfin, la lune était pleine. Elle se
dirigea vers le corps assoupi de Leone et se coucha contre lui. Elle l’enveloppa
de ses bras, effleurant son front d’un baiser. Elle rabattit sa cape sur lui
pour le préserver de la fraîcheur humide de la nuit en murmurant :
    — Dors, mon doux archange. Dors, je veille. Ensuite, je
disparaîtrai à nouveau.
    Esquive d’Estouville ferma les yeux sous l’émotion qui la
faisait trembler contre ce grand corps inconscient de sa présence. Péchait-elle ?
Sans doute, mais ce péché-là compensait toutes ces années d’attente, tous ces
rêves malvenus mais si bouleversants contre lesquels elle ne luttait plus
puisqu’ils remplissaient à eux seuls ses heures d’éveil. Depuis Chypre, depuis
qu’elle s’était présentée à lui sous le déguisement d’une petite mendiante
crasseuse capable de l’éclairer sur la signification d’un oracle de runes, elle
n’avait pensé qu’à lui. Elle avait offert sa vie et son âme à leur quête, mais
son cœur appartenait à cet homme qui était presque un ange. Il l’ignorait et c’était
aussi bien. La seule pensée d’un amour qui ne fut pas de mère, de sœur ou d’amie
le remplirait de tristesse puisqu’il n’y souhaitait, n’y pouvait pas répondre.
Quelle importance ? Elle l’aimait par-delà elle-même et cet amour la
tendait d’une joie et d’une force qu’elle avait découvertes grâce à lui.
    Lorsque Leone revint à la conscience, le soleil commençait à
poindre. Une épouvantable migraine lui serrait les tempes et une salive amère s’accumulait
dans sa bouche. Il parvint à s’asseoir. La tête lui tournait. Il lutta contre
la panique que faisait monter en lui le vide de son cerveau. Où se trouvait-il
au juste ? Que faisait-il allongé au beau milieu de la forêt, au petit
matin ? Il combattit l’amnésie qui obscurcissait ses souvenirs en
recherchant le fil de ses actions de la veille. Peu à peu, des visages, des
paroles émergèrent du brouillard confus de son esprit. Il s’était donc rendu en
la commanderie templière afin d’y rencontrer Archambaud d’Arville, qui l’avait
saoulé de sa faconde faussement bonhomme. Pourtant, à un moment, Leone avait
senti qu’il se dissimulait une sorte de crainte, de désespoir derrière sa
jovialité fraternelle. Le commandeur lui avait offert une bolée de cidre pour
accompagner son départ.
    Un fol espoir tendait Leone lorsqu’il avait pénétré dans la
nef de Notre-Dame. Celui de recevoir un signe confirmant que ces pierres, ces
dalles et ces piliers dissimulaient le secret qu’il poursuivait depuis des
années. Le vertige qui l’avait saisi dans le temple, l’apaisement magnifique
qui l’avait soudain envahi étaient-ils la confirmation de ce signe ou les
premières manifestations de l’effet de la drogue ?
    Où était passée sa jument fatiguée ? Il se leva,
titubant un peu, et regardant autour de lui. Attachée au tronc d’un bouleau à
quelques toises de lui, elle le considérait, revigorée par sa nuit sans charge
ni course. Il s’était effondré, glissant à terre. Qui avait attaché le cheval ?
C’est alors qu’il remarqua la nappe rouge brun qui avait coulé de sous un
monticule de feuilles mortes. Il tira son épée du fourreau et s’approcha. Il
repoussa les feuilles du bout de la lame, déjà certain de ce qu’il allait
découvrir. Il lâcha l’épée et tomba à genoux à côté d’Archambaud d’Arville,
puis balaya de la main le mince tombeau végétal. Les deux blessures jumelles
qui entaillaient sa poitrine et avaient ensanglanté son manteau blanc
renseignèrent Leone, tout comme la compassion et le respect avec lesquels

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