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Le souffle de la rose

Le souffle de la rose

Titel: Le souffle de la rose Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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taille.
    Éleusie jeta un regard surpris à sa fille apothicaire qui
poursuivit :
    — Tout d’abord, Jeanne, je dois vous informer qu’il me
manque cinq gros de poudre d’if, de celle-là même dont je me sers pour
éradiquer rats et mulots qui menacent nos grains.
    — Comment se fait-il que je n’en aie pas été informée
plus tôt ?
    — Elle a été subtilisée durant votre dernière tournée.
    — Doux Jésus, murmura Jeanne d’Amblin. Elle pourrait...
    — Oui, elle peut empoisonner l’une d’entre nous avec
aisance... Ce qui me suggère qu’un nouveau meurtre se prépare.
    — Euphémisme que votre « épine » ! commenta
la sœur tourière.
    — Jeanne, me vient une requête que je souhaite vous
présenter.
    L’hésitation soudaine qui perçait dans la voix d’habitude
autoritaire de l’apothicaire alerta les deux autres femmes. Éleusie se
demandait où elle voulait en venir, n’ayant pas été consultée sur l’opportunité
de ladite requête.
    — J’espère ne pas offenser notre mère en la formulant
sans l’en avoir prévenue auparavant. J’ai... Disons que des doutes me sont
venus sur certaines d’entre nous, doutes personnels, dont je n’ignore pas qu’ils
sont peut-être dénués de tout fondement...
    Tant de circonvolutions, de précautions de langage de la
part de la peu diplomate Annelette achevèrent d’inquiéter les deux autres
religieuses.
    — ... Notre mère n’est pour rien dans mes préventions.
Bref, reprit-elle d’une voix plus ferme, je n’éprouve qu’une bien modeste
confiance en Berthe de Marchiennes.
    — Comme vous y allez, murmura Éleusie d’un ton peu
convaincu.
    — Eh bien, c’est ainsi que je le perçois, rétorqua
Annelette, un rien boudeuse. Toujours est-il que je souhaiterais que vous
récupériez sa clef de coffre, Jeanne.
    La sœur tourière la dévisagea un instant comme si elle avait
affaire à une perdue d’esprit. Puis, elle explosa :
    — Auriez-vous jeté votre raison aux orties ?
Certainement pas ! Et devenir ainsi la cible de l’enherbeuse en
remplacement de Berthe ? Que nenni ! S’il s’agissait de protéger la
clef de notre mère, donc sa vie, j’accepterais. J’aurais peur, je vous l’avoue
sans fard, mais j’accepterais. En revanche, pour Berthe... n’y songez pas une
seconde !
    Éleusie réprima un sourire en dépit des sombres
circonstances. C’était bien la première fois que Jeanne perdait son sang-froid
depuis qu’elle la connaissait. Elle la calma :
    — Chère Jeanne, merci de prendre si grand soin de moi.
Merci à vous deux. Il aura fallu ces terribles événements pour que je me
découvre de vraies amies. Quant à ma clef... je la conserve. Personne ne
souffrira à ma place de la charge que j’ai acceptée en rejoignant les Clairets.
    Jeanne baissa la tête pour dissimuler sa peine. Éleusie
tenta de la rassurer :
    — Chère Jeanne, il ne s’agit pas de mon oraison
funèbre. Je n’ai nulle intention de me laisser empoisonner avant que cet être
de malfaisance soit définitivement éliminé.
    Lorsqu’elles se séparèrent quelques instants plus tard, le
regard appuyé que destina Éleusie à la sœur apothicaire fit comprendre à cette
dernière que l’abbesse souhaitait s’entretenir avec elle en confidence.
    Elle accompagna Jeanne d’Amblin le long du couloir qui
conduisait au scriptorium, et prétexta des vérifications à entreprendre pour
lui fausser compagnie et revenir sur ses pas par les jardins.
    Éleusie de Beaufort, debout derrière sa grande table de
travail, ne semblait pas avoir bougé d’un cil.
    — Et ce petit tour de votre façon, ma fille ?
Quand m’en fournirez-vous les résultats ? Le temps nous presse affreusement.
La bête va frapper à nouveau, je le sens.
    — Bientôt... je veille, je surveille.

 
Maison de l’Inquisition d’Alençon, Perche, novembre
1304
    Un air de courtois ennui sur le visage, Nicolas Florin
détaillait le comte Artus d’Authon, installé de l’autre côté de sa petite table
de travail.
    — Puisque vous n’êtes pas, messire, de la parentèle
directe de madame de Souarcy, je suis au regret de ne pouvoir accéder à votre
autorisation de visite. Croyez bien que je déplore de ne pouvoir vous obliger
en la matière, mais je suis soumis au respect d’une stricte règle.
    Florin marqua un temps pour juger de l’effet de cette
rebuffade à peine dissimulée. Artus demeurait impavide, aussi l’inquisiteur ne
perçut-il

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