Le souffle du jasmin
accrochages avaient opposé
quelques excités à Jérusalem, à l'occasion de dévotions juives au
mur des Lamentations ». Des voyageurs de passage confirmèrent cependant
les intuitions : l'affaire avait été beaucoup plus violente que les
journaux le prétendaient.
Lorsque Josef ramena Soliman et Samia
à Haïfa, il y régnait une tension presque palpable.
– Ah ! Josef. Quel
malheur ! se lamenta Hussein. Sais-tu que les Anglais ont décidé de mettre
des postes de contrôle en place aux portes de la ville pour interdire l'entrée
et la sortie des habitants ? On ne pourra plus circuler après 6 heures du
soir.
Il répéta :
– Ah ! Josef. Quel
malheur !
Josef se contenta de lever les
yeux au ciel avec un air catastrophé.
– De plus,
reprit Hussein, j'ai entendu dire que les Juifs se plaignent devoir été mal
protégés pendant les affrontements, et les musulmans affirment que la police
anglaise a fait preuve de partialité parce qu'elle compte dans ses rangs de
nombreuses recrues juives.
– Mon ami,
je suis aussi déboussolé que toi. Si ces deux communautés commencent à
s'entre-tuer sur une terre aussi sainte que celle où nous vivons, que
reste-t-il de bon dans l’humanité ? Gornisht ! Rien !
*
Le Caire,
17 janvier 1921
Mourad
emprisonna la main de Mona et déposa un baiser au creux
de sa paume.
– Je t'aime.
Elle garda le silence, mais la réponse était dans ses yeux. Nue, elle
s 'étira langoureusement sur le lit et revint se blottir
contre le corps de Mourad.
– Tu m'as
manqué, mon amour.
– Pourtant,
je ne me suis absenté qu'une semaine. Je devais voir mes parents, tu le sais
bien.
– Je sais. Mais
chaque fois que tu pars, j'ai l'impression que tu ne reviendras
plus. Je t'aime tellement.
Elle s 'enroula
sur le corps de son amant.
– Embrasse-moi,
j'ai envie.
Il allait prendre
ses lèvres lorsqu'un bruit les fît sursauter.
– Qu'est-ce
que c'est ?
– Ne
t'inquiète pas. Sans doute les voisins qui rentrent chez eux.
– Es-tu sûr
que personne d'autre ne possède la clef de cet appartement ?
– Personne
et même pas mon ami, puisque nous lui déposons la clef sur le linteau lorsque
nous repartons. Depuis le temps qu'il nous prête l'endroit, tu aurais dû être
rassurée.
– C'est
vrai. Je n'y peux rien. Imagine si mes parents venaient à apprendre...
– Hayati , ma vie,
arrête de t'angoisser. Ils ne sauront rien. D'ailleurs, ne sommes-nous pas fiancés ?
N'es-tu pas ma femme ?
– J e le suis.
Mais pas aux yeux de la société, et encore moins à ceux de mes parents. Je
peux…
Elle
n'acheva pas sa phrase. Mourad avait glissé sa main entre ses cuisses et elle ne résista pas.
Insensiblement, ses seins, son ventre, ses bras se transformèrent en une forêt
bouillonnante au-dessus de laquelle un orage sublime s'apprêtait à éclater.
Dans un
élan fiévreux, elle échappa à l'étreinte de son amant et se hissa sur lui.
Emprisonnant le sexe de Mourad entre ses doigts brûlants, elle l'introduisit en
elle, geste fait avec un naturel déconcertant, masculin, directif.
Ils
étaient encore à chercher à assouvir leur désir lorsque l'adhan résonna du haut
des minarets. C'était le troisième appel à la prière de la journée ; il n'était
pas loin de 6 h 30 du soir.
– Oh
là ! s'exclama Mourad, affolé. Tes parents vont se demander où nous sommes
passés.
Il bondit
hors du lit à la recherche de ses vêtements, tandis que Mona demeurait
immobile, le visage tourné vers la fenêtre, fixant le ciel.
– Ma
chérie, que fais-tu ? Nous devons rentrer. Elle ne répondit pas.
– Qu'y
a-t-il ? Tu ne vas pas bien ?
– Je vais
bien. Mais nous avons un problème, Mourad.
–
Oui ? Elle annonça :
–
J'attends un enfant.
*
Paris, 28 janvier 1921
Jean-François
Levent examina une dernière fois les documents et leva les yeux vers celui qui,
depuis quarante-huit heures, occupait la fonction de ministre des Affaires
étrangères de la France : Aristide Briand.
Un personnage intéressant, ce Briand. Cinquante-neuf ans, le front
large, la lèvre supérieure masquée derrière d'énormes bacchantes, il émanait de
son visage un sentiment de et force générosité.
– Alors, Levent, qu'en
pensez-vous ? questionna-t-il en gisant les mains sur la surface de son
bureau.
– Je pense que, si nous voulons
maîtriser la situation, une division de la région en unités
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