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Le spectre de la nouvelle lune

Le spectre de la nouvelle lune

Titel: Le spectre de la nouvelle lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
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acquis la certitude que Godfrid et Gilbert ont été exécutés en raison ou sous prétexte de forfaits et crimes commis sur leur domaine ; Conrad a été leur complice, peu importe pour quels mobiles. Dans ces conditions, pourquoi a-t-il été épargné… jusqu’à la nuit dernière ? Et pourquoi a-t-on monté en toute hâte cet attentat après qu’il eut fait, hier, des aveux publics ?
    — Mais, précisément, pour l’empêcher de dévoiler d’autres infamies, comme le meurtre prémédité de Bénédicte ! s’exclama Timothée.
    — Mais pourquoi cette hâte ? Ce qu’il pouvait révéler concernant la mort de Bénédicte, cela faisait des semaines, voire des mois qu’il le savait ! rétorqua Erwin. Et puis, l’assassinat de cette lavandière, aussi odieux soit-il, revêt-il une telle importance ?
    — Cependant, par l’interrogatoire de Conrad, n’as-tu pas montré, seigneur…
    Le missus interrompit Timothée.
    — Certes… Mais voyons cela ! dit-il. Que nous a-t-il appris ? Bénédicte a quitté sa masure, peut-être pour gagner Mézières, deux jours avant la Saint-Jean… Godfrid et Gilbert ont été assassinés, nous le savons, le 28 août… Plus de deux mois se sont écoulés entre la mort de la lavandière et ce double assassinat. Peut-on alors faire dépendre uniquement ceci de cela ?
    — Il est vrai que la bande aurait pu frapper bien avant, reconnut le frère Antoine.
    — En fait, son incursion meurtrière a été sans doute la conséquence non pas d’une seule mais de nombreuses actions criminelles perpétrées par les maîtres du domaine. Observons que, selon Conrad, colons, domestiques, esclaves et même hommes libres vivaient, depuis des années, sous un joug insupportable ! Les vengeurs – peut-on les appeler ainsi ? – ont donc attendu que la mesure soit comble. Il n’est pas exclu que la mort d’un ou plusieurs prisonniers dans les eaux du marécage, et postérieurement au meurtre de Bénédicte, les ait déterminés à agir.
    — Reste que l’attentat dirigé contre Conrad est certainement lié aux aveux qu’il a faits, à son arrestation, donc à ce qu’il peut encore nous dire ! affirma l’ancien rebelle.
    — Assurément ! approuva le missus. Ceux qui ont entendu ses aveux, ou ceux auxquels ils ont été rapportés, ont dû croire qu’il détenait un secret mettant leur bande en péril, oui, un secret plus grave que le meurtre même de la lavandière.
    — Et maintenant, seigneur ? demanda Doremus.
    — Ou bien ils estiment que l’intendant a eu l’occasion et le temps de nous révéler ce secret, ce qui éloignerait de lui le danger, ou bien ils pensent qu’il ne l’a pas fait, notamment parce qu’il en ignorerait la portée, alors, il serait toujours en péril…
    — … car il pourrait avoir un éclair de lucidité ?
    — En effet !
    — … ou bien, compléta Timothée, dans le doute, ils décideront de ne pas s’abstenir et de supprimer la menace de toute façon.
    Le missus approuva de la tête.
    — Voilà pourquoi, dit-il, vigilance d’abord ! Et, à ce propos, j’aimerais bien entendre de la bouche même de l’abbé Ferréol quelles sont les mesures de sécurité qu’il a décidées.
    Mandé par Erwin, le supérieur du monastère, qui devait attendre non loin, se présenta immédiatement. Il dut exposer dans le détail les dispositions qu’il avait prises et indiquer de quelle manière il s’était assuré de leur exécution. Comme il semblait s’offusquer quelque peu de l’insistance du Saxon, celui-ci lui fit remarquer d’un ton sec « que l’événement justifiait sa méfiance ».
    — Il est évident, dit-il, que l’attentat contre Conrad n’a pu être préparé en quelques heures, et mené à son terme, ou presque, qu’en raison des complicités que ceux qui l’ont tramé, et leur exécutant, ont trouvées ici même…
    — Mais… comment ? Ici même ?…
    — Oui, parmi tes moines ou parmi tes serviteurs !
    Erwin balaya d’un geste de la main les vagues protestations que bredouillait l’abbé et poursuivit :
    — Aussi ai-je chargé mes trois assistants que voici de mener une enquête pour découvrir quel est ou quels sont ceux qui, en cette abbaye, ont aidé cet agresseur, vrai ou faux moine, en tout cas sicaire dont quelque bande a armé la main.
    — Je me ferai un devoir de les aider, avança le père Ferréol.
    — Il n’en est pas question ! rétorqua le Saxon. Puis-je sans examen te retirer de la liste des complices

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