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Le talisman de la Villette

Le talisman de la Villette

Titel: Le talisman de la Villette Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Claude Izner
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transporter sur une île déserte, il n’eût pas hésité une seconde.
    — On devrait ériger un monument en l’honneur du silence, grommela-t-il.
    Vexé, Joseph se renfrogna.
    — Concentrons-nous, dit Victor. La Gournay et Gaétan dirigeaient une société occulte. Les poupées de Gaétan ont été saccagées avant son assassinat. Gaétan n’a pas porté plainte. S’il a omis de le faire, c’est qu’il soupçonnait un individu précis. Or il y a un troisième administrateur, Gouvier m’a révélé son nom, Absalon Thomassin, l’acrobate vedette du cirque Franconi. Est-il en danger ? Est-il coupable ?
    Joseph se serait muré dans la bouderie si Victor ne lui avait appliqué sur le dos une bourrade amicale.
    — Nous allons cuisiner tout le monde, nous percerons ce mystère !
    — Mais vite, sans quoi on va récolter d’autres cadavres !
    — Vous en avez de bonnes ! Les journées n’ont que douze heures ! Tasha compte sur ma présence et Iris sur la vôtre. Quartier libre jusqu’à demain. J’avoue que j’aimerais parfois accélérer le cours du temps !
    — Ben pas moi, sinon je serai grand-père avant d’avoir profité de ma progéniture !… Nom d’un… Cette visiteuse chez Gaétan, elle s’est présentée dans la soirée du 9, la date du meurtre de Louise Fontane !
     
    Sophie Clairsange avait occupé la matinée à ranger sa chambre. Ce labeur domestique la distrayait de son angoisse, elle redevenait celle qu’elle avait été, une personne obligée de subvenir à ses besoins, et non une riche propriétaire régentant une foule de mercenaires dans un domaine californien planté d’orangers. Le décor à dominante jaune, dépourvu de beauté, suscitait des résonances mélancoliques. Elle ne prisait guère le style Henri II, pourtant le maigre espace compris entre le lit à colonnes doté de tapisseries anciennes et le buffet reconverti en commode symbolisait une oasis de paix, d’où le mal était exclu. Quant à la gouache maladroite où une vieille femme tassée près d’un âtre tisonnait une flambée moribonde, elle évoquait la douceur d’une maison gratifiant ses hôtes d’un quotidien sans heurts. La silhouette trapue de Samuel Mathewson évoluait à l’arrière-plan, transparente. Sûr de lui et bienveillant, cet époux envers lequel elle n’avait en aucune occasion ressenti une once de désir lui avait néanmoins procuré une existence confortable qu’elle s’autorisait à qualifier d’heureuse, à présent qu’il était mort. Elle vouait une immense gratitude à ce mari providentiel.
    Elle se risqua sur le palier où reposait à même le sol un plateau garni d’un repas froid et d’un quotidien barré d’un titre en caractères gras :
    LE COUTURIER RICHARD GAÉTAN
    ASSASSINÉ !
    Elle s’absorba dans la lecture de l’article, et, brisant la consigne qui l’isolait au second étage, descendit d’une démarche saccadée.
    Hermance Guérin avait déjeuné dans le salon où les deux fenêtres à vitraux prodiguaient davantage d’ombre que de clarté. Son bonnet de travers, elle somnolait sur une bergère tendue de cretonne, les pieds chaussés de pantoufles, face à un piano droit orné d’une pendule de marbre et de chandeliers Renaissance. Son tricot avait glissé de ses genoux vers une carpette en feutre. Le geste de Sophie pour le ramasser l’éveilla.
    — Tu avais promis de rester là-haut.
    — J’ai lu le journal.
    — Moi aussi. Il n’a que ce qu’il mérite.
    — Oh, je suis à bout ! Combien de temps vais-je encore me terrer ?
    — Patience. Ce qui est entamé doit être achevé, ma chérie. Tu devrais manger, tu as mauvaise mine.
    Sophie se plongea dans la contemplation des losanges blancs et noirs du dallage. L’incertitude la tenaillait, elle murmura :
    — Si quelqu’un avait fouillé mon sac…
    — Rassure-toi, tes craintes sont infondées.
    Afin de la convaincre, les aiguilles éperonnèrent la laine.
    — Pendant ma maladie…
    — J’étais à côté du docteur à chacune de ses auscultations.
    — Sylvain ?
    — Hormis son commerce et ses cocottes, il ne s’intéresse à rien. Aline est une niaise, elle ne connaît de l’alphabet que les quelques lettres nécessaires aux commissions.
    — Je m’inquiète au sujet de cet homme qui jure m’avoir sauvée sur la plage. Il ne cesse de rôder.
    — Sois tranquille, personne ne te fera de mal, je veille sur toi, dit Hermance avec un sourire.
    La pelote

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