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Le Temple Noir

Le Temple Noir

Titel: Le Temple Noir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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Il tenait entre ses mains une vieille serviette de cuir usée, à la poignée noircie par des années de sueur. Il aperçut Lord Fainsworth et se leva d’un bond. L’aristocrate agita sa canne et la pointa d’un geste brusque sur le banc.
    — Allons, mon ami, restez assis. Il faut savoir profiter du temps qui passe, surtout en ce lieu.
    L’homme au visage mal rasé obéit instantanément. Lord Fainsworth s’assit à ses côtés et regarda d’un air pénétré la façade de pierre de l’église.
    — Quel chant merveilleux. On a une fausse idée de Puccini, on le croit léger et superficiel. Quelle erreur, je mets sa messe au-dessus du Requiem de Mozart. Vous aimez la musique ? La vraie s’entend.
    — Je n’y connais rien et je m’en fous. Pourquoi m’avoir donné rendez-vous ici ? Il y a plein de monde dans l’église.
    L’aristocrate joua avec sa canne contre la pierre. Le raclement irrita l’homme aux cheveux de paille et cela le réjouissait.
    — J’ai une affection particulière pour cet endroit. Les Templiers aimaient construire des églises circulaires, elles favorisaient la communion avec Dieu et l’égalité entre les humains.
    — Venant d’un lord, je trouve cette remarque du meilleur goût, jeta l’homme avec un accent prononcé du pays de Galles.
    Fainsworth ne releva pas. Son regard se porta en haut d’un pilier, sur la statue équestre des deux Templiers sculptés dans la pierre noire, qui chevauchaient le même destrier.
    — Savez-vous que la rotonde a été construite à l’image de l’église du Saint-Sépulcre à Jérusalem ? En ce Moyen Âge merveilleux, les dirigeants anglais de l’ordre du Temple pensaient sincèrement que ce sanctuaire était une extension de la cité sainte dans le royaume d’Angleterre. On a perdu cette naïveté de nos jours. C’est bien dommage.
    — Pour la discrétion, c’est pas terrible. Ça grouille d’avocats et de juges, je parle même pas de la chorale.
    Lord Fainsworth secoua la tête d’un air contrit.
    — Sachez aussi que c’est encore l’un des rares endroits à Londres où le système de surveillance par caméra dépend d’un service privé, non connecté au réseau public. Avez-vous mon… présent ?
    L’homme à la serviette se gratta la joue. L’aristocrate remarqua, avec répugnance, une série de petites taches rouges sur sa peau. Même le col de chemise était maculé. Les effluves agressifs d’un parfum bon marché exhalés par intermittence confirmaient un rasage récent. Nick Dray ne cessait de jeter des regards dans toutes les directions.
    — Bien sûr, my lord. Je joue ma place et dix ans de prison si on s’aperçoit de ce que j’ai fait.
    L’homme crispa ses mains sur la serviette, les jointures blanches contrastaient avec le cuir sombre. Il continua sur un ton haché.
    — Où est l’argent ?
    — Là où vous m’aviez dit de le mettre, mon ami. Dans une banque de la rue la plus courue de Zurich. Il ne manque plus que le code que je vous donnerai avec le plus grand plaisir en échange de votre document.
    Dray le dévisagea avec insistance, puis jeta son mégot et ouvrit sa serviette. Il en sortit trois feuillets liés et une clé USB de couleur noire. Lord Fainsworth mit la main dans la poche de sa veste chinée de chez Brun and Tuzet et prit un papier plié en deux. Les hommes procédèrent à l’échange. L’aristocrate se contenait pour ne pas laisser transparaître son impatience.
    — Je suppose que je dois vous faire confiance, c’est bien la copie exacte ?
    — Bien sûr. Vos spécialistes pourront l’authentifier sans problème, répondit l’homme qui tapait en même temps sur son smartphone la série de chiffres et de lettres inscrits sur le bout de papier.
    — Prodigieux, tout simplement prodigieux, murmura l’aristocrate, vous n’imaginez pas à quel point vous rendez cette journée merveilleuse.
    — Tant mieux pour vous, grommela le type qui ne quittait pas son petit écran des yeux. Je vois que le transfert a bien été effectué. Un demi-million de livres, Dieu vous bénisse, my lord.
    Lord Fainsworth regarda l’homme se lever et continua à racler la pierre.
    — Laissez le Tout-Puissant là où il est. Profitez bien de votre argent mais pas tout de suite. Vu votre… position, on pourrait avoir des soupçons si vous arrivez en Aston Martin à votre bureau.
    Il avait prononcé le mot position avec une intonation qui déplut à Dray.
    — Ne vous en faites

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