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Le Temple Noir

Le Temple Noir

Titel: Le Temple Noir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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pas. Je me donne six mois pour changer de… position. Tout est terminé, n’est-ce pas ?
    — Je ne vous retiens pas, mon ami. Bonne soirée.
    Dray le salua et s’éloigna du banc en direction du sud, par la petite rue qui menait vers les quais d’Embankment. L’entretien n’avait pas duré plus de cinq minutes.
    L’aristocrate glissa les feuillets et la clé dans sa veste et se leva à son tour alors que la chorale entonnait le dernier mouvement de la Missa di Gloria . Il se dirigea vers l’entrée de l’église et poussa la lourde porte en bois. Les gonds grincèrent légèrement, l’air frais lui caressa le visage. Une discrète odeur d’encens flottait dans l’air, mêlée aux voix des choristes qui donnaient toute leur puissance. Fainsworth entra et se signa d’un air grave. Temple Church, l’église première. L’esprit des Templiers était toujours présent, cristallisé dans la pierre, figé dans les neuf gisants éparpillés çà et là dans la nef, sous la haute voûte gothique. Pauvres chevaliers qui n’attendaient qu’un signe du Christ pour se relever d’entre les morts et repartir à la conquête du monde. Il jeta un coup d’œil aux gisants sur la gauche mais obliqua vers le chœur où s’étaient massés les chanteurs, groupés autour de l’autel.
    Il marcha le long de la travée centrale et s’assit sur un des bancs de chêne, juste à côté d’un révérend en soutane rouge. L’homme d’Église semblait subjugué par les vocalises. Il avait le visage assorti à sa robe, des yeux ronds et une bouche que l’on aurait pu qualifier de sensuelle. Le prêtre gardait son regard rivé sur les choristes et, se rapprochant imperceptiblement du nouveau venu, il murmura :
    — Ils le tiennent enfin, ce n’est pas trop tôt.
    — Je vous demande pardon, révérend, répondit l’aristocrate à voix basse.
    — Le dernier mouvement de la Missa , bien sûr. Deux mois de répétitions, j’ai cru qu’ils n’en viendraient jamais à bout. Au fait, l’avez-vous ?
    — Oui. Ça m’a coûté une fortune.
    Le prêtre tourna la tête vers lui. Son visage rubicond n’était plus jovial. Il le regarda d’un air grave.
    —  Christus sanctus .
    Le religieux s’essuya le front, il avait l’air de souffrir de la chaleur.
    — My lord, vous croyez vraiment que ça va marcher ? Je veux dire, le projet dans son ampleur.
    — Bien sûr. C’est le but ultime, depuis le début. Le rétablissement de ce qui n’aurait jamais dû être brisé.
    — Je sais… Mais est-ce à nous de prendre cette décision ? Les forces que nous allons manipuler sont si puissantes.
    — Il est trop tard pour reculer. Auriez-vous peur, comme notre vénérable ?
    — Non… Non. Mais pour être franc, j’ai mis une boule noire dans le coffret. Je n’étais pas l’un de vos partisans.
    Lord Fainsworth masqua son irritation. Il avait besoin de tout le Temple Noir avec lui.
    — Je comprends et je respecte votre position, mais la décision a été prise par la majorité de nos membres. Vous le savez bien. Je suis obligé de vous quitter, je retourne à la City.
    Le chœur entamait le dernier mouvement de la Missa di Gloria , le plus troublant, plus païen qu’il n’eût fallu. Pour la première fois depuis qu’il était rentré dans le Temple Noir , il tremblait en son for intérieur. Une onde glacée parcourut son échine. Tout reposait désormais sur lui.
     
    Nick Dray marchait d’un pas vif le long d’Embankment en direction du métro Blackfriars. Il était heureux comme jamais il ne l’avait été dans sa petite vie de chercheur subalterne. Un demi-million de livres. Une fortune, rien que pour lui. La première fois qu’il avait reçu le coup de fil de l’émissaire de Lord Fainsworth il avait failli raccrocher. Ça sentait la mauvaise blague à plein nez. Ce ne fut qu’après la première rencontre et un versement de cinq mille livres qu’il réalisa le sérieux de la proposition. Ses scrupules s’étaient rapidement estompés en regard de la somme proposée. Terminée, son existence miteuse, à lui la belle vie au soleil, en Italie ou en Espagne, loin de ce pays humide et déprimant. Le plus dur serait d’attendre quelques mois avant de tout plaquer et de supporter sa petite chef acariâtre et dépressive qui lui pourrissait la vie au quotidien. Il avala une grande goulée d’air ; pour la première fois de sa vie d’homme, il ressentait une sensation nouvelle et grisante. Il

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