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Le Temple Noir

Le Temple Noir

Titel: Le Temple Noir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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sud-est du futur bâtiment, un coup de pioche mit au jour une cavité profonde qui s’enfonçait à la verticale. Alerté, Salomon se rendit sur les lieux que les terrassiers, effrayés, venaient de déserter. Un grondement sinistre et une haleine putride montaient de la fosse béante.
    — Je ne me rappelle pas ce passage dans les Saintes Écritures, fit remarquer le Légat.
    Le conseiller eut un moment d’inquiétude. Les dignitaires de l’Église n’aimaient guère les racontars en marge de la parole de Dieu.
    — Monseigneur, je ne fais que rapporter la tradition orale. Vous savez comment est le peuple, toujours prompt à la légende.
    — Continuez, frère dominicain.
    — Dans tout Jérusalem, la rumeur courait que le roi venait de réveiller le dragon qui dormait sous la ville. Alors, pour conjurer le sort, Salomon détacha la pierre la plus précieuse de sa couronne et la précipita dans la bouche d’ombre. Aussitôt le râle de mort cessa et une odeur de rose monta dans les airs.
    Tout en écoutant, le Légat sortit une clé de sa tunique.
    — Alors le roi ordonna de jeter un seau dans le Puits. Quand il remonta, il était plein d’une eau fraîche et limpide. Salomon loua le Seigneur, et ordonna que cette eau pure serve à tout jamais pour les ablutions du nouveau temple.
    Le Légat fit jouer la clé. Le dominicain se signa. Sa voix trembla.
    — Mais depuis, le temple a été détruit. Les païens, les infidèles, ont profané ce lieu saint. Les Templiers occupent une partie des anciennes possessions de Salomon. Et désormais le Puits est maudit.
    La porte de chêne, hérissée de têtes de clous, pivota dans un bruit d’outre-tombe.
    Une odeur pestilentielle monta des ténèbres. Le Légat éclata de rire avant de répondre :
    — Bienvenue dans le royaume des ténèbres.
     
    Le rez-de-chaussée de la tour donnait directement sur le Puits. Rares étaient ceux qui y avaient accès. Seul un corps de garde, trié sur le volet, conduisait les captifs dans cette antichambre de la mort. Le Renard s’avança. La margelle, édifiée en pierre plate, débutait au ras du sol tandis qu’un escalier s’enfonçait dans l’obscurité. Les dernières marches étaient en bois, fichées dans la paroi en pierre, on les retirait une fois le prisonnier jeté au fond. Le Légat saisit une torche et commença de descendre. Derrière lui, il entendit la voix angoissée du dominicain :
    — Monseigneur, je vous en supplie, faites-vous escorter.
    Le Renard ne répondit pas. De la main gauche, il tira les pans de sa capuche pour se protéger de l’odeur. Par la fente étroite qui lui servait de fenêtre de vision, il aperçut une rangée d’ouvertures ovales fermées par des panneaux de bois. Il s’enfonça plus en avant. Un bruit d’eau se rapprochait. Il baissa son flambeau : une avancée en bois donnait sur le fond du Puits. Il continua. Désormais, il n’y avait plus de marches. De nouveau, il abaissa sa torche. Une mare vaseuse apparut. De l’eau jusqu’au visage, un homme se tenait agrippé à une pierre en saillie.
    — Quel est ton nom ? interrogea le Légat.
    — Mouamar, Seigneur, ayez pitié, cria le messager entre deux hoquets.
    — Tu es musulman ?
    — Je sers des chrétiens, Seigneur.
    Les Francs, en général, ne parvenaient pas à comprendre l’inextricable mosaïque religieuse de l’Orient. Juifs, Arméniens, Grecs, Byzantins, Chiites, Sunnites, Alaouites, Druzes, Syriaques… La Terre sainte était une vraie tour de Babel. Un casse-tête pour la plupart des croisés, un échiquier subtil pour d’autres.
    — Ce sont eux qui t’ont envoyé à Jérusalem ?
    L’homme se cramponna au mur.
    — Seigneur, pitié, je suis juste un porteur de message.
    — Un message que tu devais donner aux Frères du Temple. Pourquoi eux ?
    — Seigneur, je ne sais pas.
    Le Légat posa la torche derrière lui. L’obscurité revint. L’homme hurla.
    — De quelle ville viens-tu, déjà ?
    — Al Kilhal…
    Au fond du trou, le musulman continuait ses lamentations :
    — Des Francs, des pillards, nous ont attaqués, ils ont pris la cité en otage, ils réclament une rançon… Ils…
    — Ta ville est réputée pour sa richesse, je m’en souviens.
    — Relâchez-moi ! Je n’ai rien fait de mal.
    La voix du messager résonnait entre les murs, écorchée par la peur. Le Renard ouvrit sa capuche et fixa le fond du Puits. Cet homme avait dit tout ce qu’il savait. Le Légat jeta la

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