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Le temps des illusions

Le temps des illusions

Titel: Le temps des illusions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Evelyne Lever
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offrant à la vue du spectateur les appas les plus propres à émouvoir les sens, multipliant les œillades suggestives, les moues provocantes, les voluptueux déhanchements, mêlant avec art les lascivités de l’arabesque aux grâces du rigodon. Au bout de trois mois chezLany, le maître de ballet de l’Opéra, notre figurante sera prête à tenir sa partie dans un ballet, demi-nue et le corps visible à travers la jupe en rubans. On cite les demoiselles Allard et Peslin comme des modèles, pour l’aisance avec laquelle elles exécutent les tournoiements, écarts et pirouettes sur un pied, tout en laissant deviner des parties secrètes qu’un indiscret caleçon dévoile par instants, pour les dérober aussitôt, excitant les ardeurs du parterre. Il est des danses plus affriolantes encore, mais que l’on ne peut voir que sur des scènes privées.
    Merveilleuse voie d’accès à la carrière de courtisane, l’entrée à l’Opéra suscite d’âpres convoitises. On voit des mères proxénètes et prévoyantes y préparer leur fille dès le plus jeune âge, intriguer auprès des gentilshommes de la Chambre, parmi lesquels lemaréchal de Richelieu, grand connaisseur en matière de tendrons, ou marchander avecLany, séducteur et débauché, qui a même vendu sa propre sœur.
    Fréquenter les coulisses de l’Opéra n’empêche pas les libertins d’aller chez Mme Pâris qui tient à Paris l’hôtel du Roule, rue de Bagneux, bien meublé, où l’on trouve des chambres accueillantes et des dîners raffinés. On vient chez la Pâris pour passer un moment tarifé avec ses charmantes pensionnaires qui outre leurs charmes personnels ont reçu des leçons de danse et de musique. Un chirurgien les visite tous les deux jours. Cette femme et son petit sérail son protégés par la police pour y attirer des étrangers importants, des ambassadeurs. Il y a dit-on quelques domestiques espions qui connaissent les langues étrangères et qui entendent dans les parties de débauche ce qui pourrait servir au ministère !
    1 - Luynes, Correspondance , op. cit ., t. V, p. 93.

    2 - Ibid.

    3 - Ibid ., p. 77.

    4 - Vignerot Du Plessis était le patronyme du cardinal de Richelieu dont la terre de Richelieu fut érigée à son intention en duché en 1631.

    5 - Jean-François Marmontel, Mémoires , Paris, Mercure de France, 1999, p. 101.

    6 - Sainte-Beuve, Causeries du lundi , t. I, p. 206 et 209.

    7 - Denis Diderot, Le Neveu de Rameau , Paris, Gallimard, 2006.

    8 - Charles Pinot Duclos, Mémoires pour servir à l’histoire des mœurs du xviii e  siècle , Paris, 1751, p. 68-69.

    9 - Charles Pinot Duclos, Mémoires secrets sur le règne de Louis XIV, la Régence et le règne de Louis XV , Paris, Didot, 1865, p. 112.

Chapitre XV
    L’année de Fontenoy
    Mariage princier
    Que d’effervescence au début de cette nouvelle année 1745 ! On prépare le mariage dudauphin. C’est une aubaine pour les corps de métiers parisiens où affluent des commandes de toutes sortes. Le peuple attend avec impatience les réjouissances prévues en de telles occasions, mais pour les courtisans les noces princières coûtent cher. Il faut trois somptueux habits pour les journées officielles, sans compter ceux du bal masqué, et d’autres plus simples (si l’on peut dire) pour les fêtes qui dureront cinq jours encore. Les carrosses doivent être repeints et redorés, les cochers et les laquais vêtus de neuf, les hôtels illuminés. Les immanquables frais de réception risquent d’augmenter les dettes de la noblesse qui vit souvent au-dessus de ses moyens. Paraître dans toute sa splendeur aux yeux du roi, de la famille royale et de la Cour fait partie des devoirs auliques.
    Le roi a soudain retrouvé une vitalité qu’on ne lui avait pas vue depuis longtemps. Il passe un temps fou à arbitrer des conflits d’étiquette qui sembleraient futiles hors de ce pays-ci. Est-ce au capitaine des gardes ou aux gentilshommes de la Chambre qu’il appartient de faire les invitations pour la soirée de ballet ? On n’imagine pas les discussions suscitées par cette question. On recherche dans les archives des maîtres de cérémonie ce queLouis XIV a décidé pour le mariage de Monseigneur le dauphin,son fils, il y a soixante ans. Et cent fois par jour on se heurte à de tels détails qui ont ici une importance capitale.
    On en oublierait presque les nouvelles de la guerre. Il y en a pourtant et non des moindres. Lemaréchal de

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