Le temps des illusions
passons). Peu de temps après elle s’est jetée à la tête deRiom, l’ancien amant de laduchesse de Berry ; elle ne s’en est pas contentée et s’est attaquée également à son beau-frère, lechevalier d’Aydie. Comme Riom lui en faisait le reproche, elle lui répondit qu’avec son tempérament, elle ne pouvait se contenter de lui seul et qu’il avait bien de la chance qu’elle le gardât, car elle ne peut s’endormir que si elle a été baisée huit fois de suite. Elle est revenue sans tarder à Richelieu, mais pour pimenter l’affaire ce beau seigneur a exigé qu’elle lui livre sa belle-sœur, lamarquise d’Alincourt, qui passe pour très vertueuse. Ils ont convenu d’une partie carrée. Très émoustillée à cette idée, la duchesse a arrangé un rendez-vous dans les jardins du château, sans prévenir Mme d’Alincourt.
Un beau soir du mois de juillet, les deux belle-sœurs se promenaient tranquillement dans un bosquet lorsque surgirentRichelieu etRiom. En riant, la duchesse saisit aussitôt les mains de la marquise qui se débattit et se mit à hurler. Ses cris empêchèrent les deux compères de poursuivre leur entreprise. Mme d’Alincourt se réfugia chez sa mère Mme de Boufflers, qui la conduisit aussitôt chez leduc de Villeroy… grand-père de la duchesse de Retz et aussi celui de la marquise d’Alincourt !
Mais que faisaient donc leduc de Retz et lemarquis d’Alincourt ? Ces messieurs qui ont à peine vingt ans participaient à une orgie d’un style différent dans un autre bosquet en compagnie dumarquis de Rambure récemment marié, du marquis de Mesmes qui accuse bien ses quarante ans et du jeuneBoufflers. Ce dernier voulut d’abord violer Rambure, mais n’en put venir à bout. D’Alincourt dit qu’il voulait prendre la revanche de son beau-frèreBoufflers. Rambure ne s’en défendit point et en passa doucement par là… Et la fête se poursuivit.
Le duc de Villeroy est atterré. Deux de ses petits-fils et deux de ses petites-filles compromis dans un pareil scandale, il y aurait de quoi se suicider si le maréchal-duc n’était pas si dévot. Il a aussitôt demandé au Régent des lettres de cachet contre ses petits-enfants. M. d’Alincourt est exilé à Joigny et Boufflers en Picardie où leurs femmes doivent les rejoindre. Laduchesse de Retz, surnommée « Mme de Fiche-le-moi » est expédiée au couvent et son mari, dans son gouvernement. Rambure est envoyé à la Bastille.
Le roi a demandé la raison de tous ces ordres d’exil. On lui a répondu que ces jeunes gens avaient arraché des palissades. Depuis lors on se gausse en parlant des « arracheurs de palissades » ! Le roi croit-il un mensonge aussi ridicule ? Le triste visage de son gouverneur doit l’intriguer. Sait-il que lorsqu’on se rend chez le vieux gentilhomme, son suisse demande : « Est-ce pour la porte de devant ou pour la porte de derrière ? » La rumeur court à Versailles : on se demande si l’affaire des palissades n’a pas été organisée pour donner au roi le goût des hommes. Laduchesse de La Ferté ne se prive pas de décliner les rois de France avec leurs goûts :Henri II etCharles IX aimaient les femmes,Henri III les mignons,Henri IV les femmes,Louis XIII les hommes, Louis XIV les femmes.La duchesse prédit que le temps des mignons devrait revenir…
Arrestation deVilleroy et apothéose deDubois
Cette affaire cause beaucoup de bruit et ternit la gloire du gouverneur de S.M. De plus en plus malheureux, ce vieillard de quatre-vingts ans fait pitié. Aussi lecardinal de Bissy a-t-il résolu de le réconcilier avec Dubois, lequel a accepté de les recevoir tous deux. Le 4 août, jour d’audience des ambassadeurs, le duc de Villeroy et le cardinal de Bissy se présentent dans l’antichambre du ministre. Dubois vient au-devant d’eux le sourire aux lèvres et introduit ses visiteurs dans son cabinet. La conversation prend tout d’abord un tour agréable ; soudain le gouverneur du roi perd son calme, profère injures et menaces contre Dubois. Ses vociférations se font entendre jusque dans l’antichambre. Incapable de mettre un frein à ce torrent de folies, le cardinal de Bissy attrapele maréchal par les épaules, le tire jusqu’à la porte qu’il ouvre devant les ambassadeurs stupéfiés.
Laissant patienter les ministres étrangers, Dubois, comme un tourbillon, les yeux hors de la tête, se précipite chez leduc d’Orléans en criant : « Je suis
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