Le temps des illusions
deLouis XIV en 1654. Les tailleurs, les brodeurs, les tapissiers et tous les autres artisans concernés par ces préparatifs sont déjà à l’ouvrage. Il appartiendra au Régent d’arbitrer les querelles d’étiquette qui éclateront immanquablement entre les grands officiers de la Couronne, les princes, les ducs, les pairs et tous les autres assistants…
En attendant, branle-bas de combat. Il faut distribuer les appartements du château, faire en sorte qu’ils puissent accueillir dignement leurs occupants. Ceux qui n’y habiteront pas cherchent des logements en ville. Les Versaillais sont en liesse. Depuis sept ans les affaires ont périclité, beaucoup de commerces ont fermé. La présence du roi annonce le retour de l’opulence.
Le 13 juin,Louis XV reçoit les adieux des cours souveraines. Les Parisiens sont venus l’acclamer sous ses fenêtres. Le surlendemain, à trois heures de l’après-midi, son carrosse se fraie un chemin au milieu d’une foule en délire, mais le jeune homme a tellement hâte d’arriver à Versailles qu’il fait avancer ses chevaux au galop dès le Cours-la-Reine. LeRégent, son fils leduc de Chartres, leduc de Bourbon, lemaréchal de Villeroy, l’évêque de Fréjus se tiennent avec lui dans sa voiture où il fait une chaleur incroyable, mais le roi s’en moque.
Dès son arrivée au château, Louis ne se tient plus de joie : il est chez lui et bien chez lui. Après s’être recueilli dans la chapelle où le saint sacrement est exposé, il veut tout voir. Avec l’enthousiasme et la vivacité de son âge, il court dans les jardins, exploretous les bosquets, accompagné par le Régent et par son gouverneur qui le suivent avec peine. Il se précipite ensuite jusque dans la galerie des Glaces où il s’allonge par terre pour admirer le plafond. Il galope à cheval dans le parc, visite et revisite le château. Il est d’une humeur charmante, d’autant que leduc de Villeroy ne peut pas le suivre à ce rythme-là. L’adolescent ne supporte plus les radotages du vieux compagnon deLouis XIV. Le matin, à huit heures, il y a plus de monde à son lever qu’à celui du feu roi. Cependant, il est encore trop jeune pour être le véritable maître de la Cour. À neuf heures moins le quart, on ne sait plus que faire, hormis jouer gros jeu et faire l’amour dans les appartements, dans les combles, dans les bosquets…
Libertins, libertines et… arracheurs de palissades
LeRégent ne va qu’une fois par semaine à Paris où il se promène publiquement aux Tuileries avec Mme d’Averne. Le reste du temps, il profite d’autres plaisirs au château, mais il travaille avecDubois et entretient son pupille des affaires du royaume. Le crédit du cardinal ne cesse d’augmenter, ce qui exaspère le duc de Villeroy, lequel se pavane et affiche un mépris cinglant à l’égard de son ennemi. Le 20 juillet, Dubois ayant demandé d’entrer au Conseil des finances traditionnellement présidé par les Villeroy, une vive algarade a éclaté entre eux. « Vous voulez tout gouverner, Monsieur, mais je ne le souffrirai pas », a rugi le maréchal après avoir traité le cardinal de « vieille idole devant qui tout le monde pliait le genou ». Sans perdre son calme, Dubois a répliqué que ce n’était pas à lui qu’il fallait s’en prendre mais au Régent et au roi. Sur ces entrefaites,Villeroy a couru raconter l’affaire auduc d’Orléans qui lui a répondu qu’il avait eu tort de s’en prendre aucardinal. Villeroy est furieux. Les courtisans comptent les points. Ils s’intéressent aussi à la dispute survenue entre Mme dePléneuf, maîtresse de M. LeBlanc, secrétaire d’État à la Guerre, et sa fille Mme dePrie, maîtresse duduc de Bourbon. Mme de Prie voulait trucider sa mère et son amant. Querelle entre deux putains prétend l’avocatMarais 1 …
Il y a mieux (ou pire).Madame, mère du Régent, qui a connu tous les scandales de la cour du grand roi, n’en croit pas ses oreilles. Elle n’a pas osé donner tous les détails de l’histoire à sa tante la raugrave Louise, de peur de la choquer. Et pourtant que ne lui a-t-elle pas déjà raconté ! Afin de séduire leduc de Richelieu, laduchesse de Retz a soupé nue avec lui et ses meilleurs amis. On imagine la suite… Elle a également essayé de séduire le roi et porté ses mains sur lui dans des endroits très cachés, mais elle n’est pas allée plus loin (où était donc le duc de Villeroy ?, mais
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