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Le temps des poisons

Le temps des poisons

Titel: Le temps des poisons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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répondu que non.
    —
    J'y suis toujours, précisa ce dernier d'une voix rauque. Je surveille les larrons. Nous avons une légion de mendiants ! Une véritable légion ! Je n'avais pas aperçu Adam, ajouta-t-il après réflexion. J'ai donc rejoint Maîtresse Ursula dans la maison. Nous avons frappé et cogné et, en fin de compte - il bomba le torse autant qu'il le put —, j'ai donné l'ordre qu'on enfonce la porte. Je suis sorti et ai réquisitionné quelques hommes. Nous avons forcé l'huis. Dedans, c'était terrible : Maître Adam gisait sur le sol, tout tordu, le visage... eh bien ! vous verrez...
    —
    Ce jour-là...
    Une voix forte monta de la place derrière eux.
    —
    ... ce jour-là, le Seigneur viendra accompagné de ses anges qui, avec tous les feux de l'Enfer, sépareront les bons des méchants, les agneaux des boucs et, en ce jour, où serez-vous ? Souvenez-vous, en ce Jour de Colère et de Deuil, les cieux et la terre s'embraseront !
    Kathryn pivota sur ses talons et jeta un regard sur le marché. Les enfants qui jouaient au pied de la croix et les femmes qui s'y étaient installées pour bavarder avaient disparu et avaient cédé la place à une sombre silhouette, tout de noir vêtue, tel un corbeau, qui fulminait. La jeune femme ne pouvait distinguer ses traits mais la voix était aussi retentissante et vibrante qu'une trompette. Elle quitta le groupe et s'avança sur les pavés.
    —
    Que plaiderons-nous ? continuait le prêcheur qui avait à présent attiré une petite foule. Que plaiderons- nous quand les justes demanderont merci ? O voyez quelle terreur nos cœurs déchirera quand du Ciel le juge descendra !
    Sa voix mélodieuse et chantante retenait l'attention des passants.

    Kathryn se fraya un chemin. L'homme, de taille moyenne, barbe et cheveux noirs hirsutes, la figure tannée par le soleil, battait l'air de ses mains puissantes en vociférant ses terribles imprécations. Le rythme même de son sermon, sa façon de bouger, faisaient oublier aux spectateurs où ils se trouvaient. En une fraction de seconde, il réussissait à les faire réfléchir à ce qui se passerait quand le monde sombrerait et que les éléments se fondraient dans les flammes.
    Le prêcheur décida alors de s'adresser directement à ses auditeurs.
    —
    Vous, habitants de Walmer, vous n'êtes point différents des autres.
    Et il se lança dans une nouvelle description des horreurs à venir.
    Kathryn l'écouta quelques instants. Ces prédicants la fascinaient toujours, par leurs gestes, la force de leur voix, leur langage coloré, leur manière de séduire une foule : elle avait souvent souhaité que d'autres prêtres, dans leur sermon du dimanche, fassent montre d'une étincelle de ce feu qui inspirait ces hommes.
    Colum lui prit le bras.
    —
    Ce n'est qu'un prédicateur itinérant, Kathryn. Le père Clement dit qu'il est ici depuis quelques jours. Nous ne devons pas offenser les autres, ils attendent...
    Kathryn rejoignit le petit groupe et présenta ses excuses pour s'être laissé distraire.
    —
    Je voudrais qu'il s'en aille, grommela Walter. Je voudrais qu'il ramasse son gourdin et parte ailleurs. La vie est bien assez difficile sans qu'on nous rappelle les quatre dernières choses.

    —
    C'est-à-dire ? railla la jeune femme.
    —
    Eh bien, le Ciel, l'Enfer, le Purgatoire et le Jugement dernier, précisa Walter en plissant les yeux. Je ne suis qu'un sergent, parfois un peintre, et pas un théologien. Il vaudrait mieux que vous interrogiez le père
    Clement. Je ne les ai pas énumérés dans le bon ordre, n'est-ce pas, mon père ?
    — Ce prêcheur ne fait pas de mal, déclara le prêtre en désignant la place du marché. Et pourquoi m'opposerais- je à ceux qui veulent m'aider à soigner la vigne du Seigneur ? Maîtresse Swinbrooke, entrez donc ; je veux vous montrer quelque chose.

CHAPITRE III
    « Car l'intempérance est le vrai tombeau de l'entendement et de la sagesse de l'homme. »
    Chaucer, « Le conte du Pardonneur », Les Contes de Cantorbéry Ils pénétrèrent dans la maison par la porte de derrière. Kathryn remarqua combien l'endroit était propre et entretenu avec soin : bien que le logis soit petit, tout était à sa place. Dans le solar aux murs chaulés la jonchée était fraîche. Les tables et les chaires de bois, comme les instruments de cuivre suspendus près de l'âtre, avaient été polis et luisaient dans la pâle lumière qui filtrait à travers les fenêtres. Il en allait de même pour

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