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Le tribunal de l'ombre

Le tribunal de l'ombre

Titel: Le tribunal de l'ombre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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terres inconnues dont lui seul avait le secret.
    Je pris d’abord ce silence pour un geste de récréance, mais il eut la sagesse de ne faire aucune allusion à la détention de ma sœur, s’il ne l’ignorait purement et simplement.
    La mort dans l’âme, le désarroi dans le cœur, je dus, bien malgré moi, m’incliner à rebelute devant l’incontestable justesse de ses arguments. Il est vrai que je ne l’avais plus porté dans mon cœur depuis que des doutes terribles m’avaient assailli. Depuis le jour où je l’avais soupçonné d’avoir trempé dans le meurtre abominable du chevalier hospitalier, Gilles de Sainte-Croix. Il en restait des traces. Malgré notre conversation récente.
     
    Mais ce qui fut dit fut fait sur l’heure, dès que Géraud de Castelnau d’Auzan eut accepté, de bon gré, de porter son seing et son petit sceau sur le parchemin que Marguerite avait consciencieusement gratté sous ma dictée.
    Nos prisonniers prêtèrent serment et quittèrent nos enceintes de nuit, sans bruit ni clameur, discrètement, ainsi qu’il était convenu pour le cas où des espions à la solde du sire de Castelnaud auraient rôdé dans les parages. Mieux valait ne pas attirer l’attention.
    La principale réticence du Conseil, on peut le comprendre, eut trait aux cent écus d’or que j’envisageai de bailler au chevalier d’Auzan en les prélevant sur la rançon que le comte de Derby venait de nous allouer :
    « Comment un prisonnier rançonné pouvait-il recouvrer la liberté en spoliant ceux qui l’avaient capturé ? » s’esclaffèrent la plupart des membres du Conseil.
    Je dus argumenter pied à pied. D’aucuns en profitèrent pour me réclamer des comptes sur les avances qu’ils avaient déjà consenties lorsque nous avions débougeté d’importantes sommes pour obtenir le ralliement des paysans des trois paroisses.
    Le chevalier de Montfort se garda d’intervenir pour débattre de faits qui étaient antérieurs à sa venue, mais il me conforta dans mes nouveaux sentiments à son égard en appuyant finalement ma proposition. Il déclara que ce dernier débours n’aurait jamais pu être envisagé si je n’avais point organisé la défense du village d’aussi belle façon et obtenu aussi magnifique rançon du lieutenant général du roi d’Angleterre. J’en restai coi, la bouche en cœur, savourant discrètement ces mots qui me firent chaud au corps.
    Or donc, il décida de trancher dans ce sens, passant outre à quelques murmures de désapprobation. En revanche, le Conseil donna son accord pour que les manants et paysans de la seigneurie, qui avaient si ardemment participé à la défense du village, reçoivent rétribution, même modeste, des débours occasionnés lors du siège et du festin que nous avions organisé pour la signature de la trêve. Déduction faite des sommes qui leur avaient déjà été concédées.

    Marguerite venait d’attiser le feu qui se languissait mollement dans la cheminée, au plus grand bonheur de Cloc, notre petit chat noir.
    Cette nuit, j’avais enfermé nos dogues dans leur chenil, pour qu’ils ne troublent pas un repos que nous avions bien mérité. Et pour qu’ils ne tentent pas de participer, sur notre couche, à nos ébats. Seuls, enfin seuls dans une intimité trop rare ces derniers temps.
     
    Mon épouse se dirigeait, pour les moucher, vers les chandelles qui éclairaient notre chambrée lorsqu’on frappa discrètement trois coups à la porte. Passé complies, Guillaume de Lebestourac découchait désormais pour vaquer à des occupations plus fornicatrices, en compagnie d’Honorine, que verbales, en la nôtre.
    J’entrebâillai la porte et fus tenté de la refermer aussitôt au nez du chevalier Foulques de Montfort. Son air grave, cependant, me retint de commettre ce geste pour le moins discourtois. Nous le reçûmes en chainse de nuit. Il n’en parut pas gêné pour si peu, nous pria de l’excuser pour cette visite tardive, déclina le faudesteuil sur lequel je le conviai à prendre place séant, sortit un parchemin d’une boîte à messages qu’il portait à la ceinture et nous invita à en prendre connaissance.
    Marguerite s’approcha à petits pas et se glissa près de moi. Cloc s’étira en baillant. Le feu ronronnait. Des braises craquèrent et des flammèches en jaillirent. Foulques s’en approcha pour se réchauffer le dos et nous observa à la dérobée.
    Je brisai fébrilement les sceaux, redoutant que quelque

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