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Le Troisième Reich, T1

Le Troisième Reich, T1

Titel: Le Troisième Reich, T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Shirer
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excellé,
par-dessus tous ceux de leurs contemporains (31).
    Il faut bien noter les analogies entre ce texte et la citation
précédente de Mein Kampf . La fusion de l'homme politique et du penseur,
voilà ce qui produit un héros, une « figure de l'histoire universelle », un
Alexandre, un César, un Napoléon. Si cette même fusion existait en lui, comme
Hitler en était venu à le croire, pourquoi ne se fût-il pas égalé à eux?
    Souvent, Hitler déclara que le chef suprême plane au-dessus de
la morale ordinaire. Hegel et Nietzsche ne pensaient pas différemment sur ce
point. Nous avons vu Hegel prétendre que les « vertus particulières » et les «
points de vue inopportuns » ne doivent pas être des obstacles sur la voie
suivie par les grands meneurs de peuples. Il ne faut pas davantage s'offusquer
si les héros, en accomplissant leur destin, piétinent ou déchiquettent beaucoup
de fleurs innocentes. Et Nietzsche, dans son extravagante exagération, va bien
plus loin encore.
    Les hommes forts, les vrais maîtres, retrouvent la
conscience pure des bêtes de proie; monstres heureux, ils peuvent revenir d'une
effroyable suite de meurtres, d'incendies, de viols, et de tortures avec des
cœurs aussi joyeux, des âmes aussi satisfaites que s'ils s'étaient amusés à des
bagarres d'étudiants... Quand un homme est capable de commander, quand il est
par sa nature un « maître », quand il est violent dans ses actes et dans ses
manières, quelle importance pourrait-il bien attacher aux traités?... Pour
juger la moralité comme il convient, il faut la remplacer par deux concepts
tirés de la zoologie : le dressage d'une bête et l'élevage d'une espèce. (32).
    De telles théories, exprimées à leur paroxysme par Nietzsche et
adoptées avec enthousiasme par une foule d'Allemands, semblent avoir exercé une
forte attraction sur Hitler. Ainsi, un génie animé par une mission était
supérieur aux lois et ne pouvait pas s'empêtrer de morale bourgeoise. Par
conséquent, quand ce fut pour lui le moment d'agir, Hitler était en mesure de
justifier les actes les plus cruels commis de sang-froid : suppression des
libertés personnelles, pratique brutale du travail forcé, horreur des camps de
concentration, massacre de ses propres partisans en juin 1934, assassinats de
prisonniers de guerre et exécutions massives de Juifs.
    Quand Hitler sortit de la prison de Landsberg cinq jours avant
la Noël 1924, il se trouva en face d'une situation qui aurait déterminé presque
tout autre homme que lui à renoncer à la vie publique. Le Parti nazi et sa
presse étaient interdits; ses anciens lieutenants lâchaient pied et
disparaissaient; lui-même n'avait plus le droit de parler dans les meetings.
Pis encore, il était menacé d'être déporté dans son Autriche natale, ainsi que
la police d'État bavaroise en avait fait avec insistance la demande au ministre
de l'Intérieur. Nombre de ses vieux camarades se rangeaient à l'opinion commune
: Hitler était un homme fini ; il allait tomber dans l'oubli, comme beaucoup
d'autres politiciens de province qui avaient joui d'une notoriété éphémère
durant les années d'agitation où la République paraissait constamment sur le
point de sombrer [41] .
    Mais la République avait résisté à la tempête et, peu à peu,
elle se consolidait. Pendant qu'Hitler se trouvait en prison, un véritable
sorcier des finances, du nom de Hjalmar Horace Greeley Schacht, avait réussi à
stabiliser la monnaie; l'inflation désastreuse était terminée. Le plan Dawes
avait allégé le fardeau des réparations. Les capitaux d'Amérique commençaient à
affluer. L'économie se rétablissait rapidement. Stresemann poursuivait avec
bonheur sa politique de réconciliation avec les Alliés. Les Français évacuaient
la Ruhr. On discutait à Locarno d'un pacte de sécurité qui devait faciliter un
règlement général des affaire européennes et faire entrer l'Allemagne à la
Société des Nations.
    Pour la première fois depuis la défaite, après six années de
tension, de troubles et de crises, le peuple allemand commençait à mener une
vie normale. Deux semaines avant qu'Hitler sortît de Landsberg, les
sociaux-démocrates (ceux qu'il appelait les criminels de novembre) recevaient
30 pour 100 de suffrages de plus (sur un collège de près de 8 millions), dans
une élection générale où ils s'étaient déclarés en faveur de la République. Les
nazis, combinés avec des groupes racistes du nord

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