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Le Troisième Reich, T2

Le Troisième Reich, T2

Titel: Le Troisième Reich, T2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Shirer
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Dardanelles – leur convoitise de longue
date – tandis qu’ils s’adjugeraient, eux, le reste des Balkans : la
Roumanie, la Yougoslavie et la Bulgarie.
    Ainsi débutent mes notes du 12 novembre 1940. Aujourd’hui, nous
en savons beaucoup plus long sur cette entrevue, grâce aux documents saisis à
la Wilhelmstrasse et, parmi eux, les procès-verbaux
confidentiels des séances [95] ,
à l’exception d’un seul, conservé par l’interprète personnel du Führer,
Herr Doktor Schmidt, personnage doué d’ubiquité (30). A la première
séance de la matinée, Ribbentrop fit montre d’une attitude à la fois arrogante
et évasive, mais Molotov le perça rapidement à jour et, à travers lui, le jeu
allemand.
    « L’Angleterre est vaincue, commença le ministre nazi,
et je répète que sa capitulation n’est plus qu’une question de temps… La
Grande-Bretagne et son empire abordent aujourd’hui le commencement de la fin. Elle
espère, il est vrai, l’entrée en guerre des États-Unis, mais cela ne sera d’aucune
conséquence pour l’Allemagne. L’Allemagne et l’Italie ne laisseront jamais un
Anglo-Saxon prendre pied sur le continent européen… Il n’existe donc pas de
problème militaire… Les puissances de l’Axe se préoccupent non pas de la façon
dont elles gagneront la guerre, mais des moyens d’abréger une guerre déjà
gagnée. »
    Cela dit, Ribbentrop expliqua que l’heure avait sonné pour les
quatre puissances de délimiter leurs sphères d’influence. Chacune d’elles « orienterait
naturellement son expansion au Sud ». Le Japon l’avait déjà fait ; l’Italie
aussi. Quant à l’Allemagne, après avoir instauré l’Ordre nouveau en
Europe occidentale, elle trouverait son Lebensraum supplémentaire en
Afrique Centrale (quel choix !). « Je me demande, continua Ribbentrop,
si l’U. R. S. S. n’a pas intérêt à tourner elle aussi ses regards vers le sud, afin
de trouver du côté de la mer le débouché si essentiel pour elle. »
    « Quelle mer ? » jeta Molotov, glacial.
    Question embarrassante et cruciale s’il en fut. D’autres
allaient s’ensuivre, Ribbentrop eut le temps de s’en apercevoir au long des
trente-six heures de discussion ininterrompue avec ce Bolchevik têtu, réaliste
et lucide. La question désarçonna Ribbentrop qui, sur le moment, ne trouva rien
à répondre. Il essaya d’une diversion en battant la campagne à propos des
changements considérables qui allaient s’opérer dans le monde entier après la
guerre, puis il se lança dans un galimatias verbeux, où il était question d’un
élément important entre tous, à savoir le « bon travail déjà accompli par
les partenaires du Pacte germano-soviétique et le bon travail qu’ils
accompliraient encore ».
    Molotov insista : à sa question
précise, il attendait une réponse précise. A la longue, le ministre nazi
insinua que « l’accès à la mer le plus avantageux pour la Russie semblait
s’offrir du côté du golfe Persique et de la mer d’Oman ».
    Le Commissar écouta tout cela sans broncher, avec une
expression impénétrable (31), note le docteur Schmidt. Il ouvrit à peine la
bouche, sauf en fin de séance, pour déclarer que la délimitation de sphères d’intérêt
exigeait « précision et vigilance », surtout entre l’Allemagne et la
Russie. L’astucieux négociateur ménageait ses munitions pour l’assaut de l’après-midi
avec Hitler. Le tout-puissant dictateur allait connaître là une expérience
surprenante, exaspérante s’il en fut et, à coup sûr, unique dans sa carrière.
    Tout aussi vague que son ministre et plus grandiloquent encore, il
entonna son leitmotiv habituel : aussitôt que les conditions
atmosphériques le permettraient, l’Allemagne assènerait « le coup de grâce
à l’Angleterre ». Restait évidemment le point d’interrogation américain, mais
il n’était pas question que les États-Unis « puissent mettre en péril la
liberté des autres nations avant 1970 ou 1980… Les affaires d’Europe, d’Asie et
d’Afrique ne les regardaient pas ». Assertion approuvée par Molotov. Ce fut d’ailleurs la seule.
    Après qu’Hitler eut achevé un exposé prolixe d’aimables
généralités, réaffirmé qu’il n’existait pas de divergences fondamentales entre
les deux pays dans la poursuite de leurs intérêts respectifs, en particulier
dans leur commune poussée vers « l’accès de l’Océan », Molotov lui fit

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