Le Troisième Reich, T2
venu de tenir – ou de trahir – sa promesse secrète au Japon.
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L’HEURE DES ÉTATS-UNIS
La promesse téméraire faite au Japon datait du printemps de 1941,
époque des conversations entre Hitler et Yosuke Matsuoka, ministre des Affaires
étrangères nippon, pro-nazi convaincu. Les procès-verbaux de ces conversations
nous permettent de suivre le processus d’un autre faux calcul du Führer, celui-là
monumental. Ces documents, et d’autres de la même période, mettent en relief de
façon saisissante l’ignorance d’Hitler, l’orgueilleuse suffisance de Gœring et
la stupidité de Ribbentrop, tous trois incapables de jauger la puissance
militaire des États-Unis. Ignorance, orgueil, stupidité qui allaient entraîner
l’erreur déjà commise par Guillaume II, Hindenburg et Ludendorff, vingt-huit
ans plus tôt.
La politique d’Hitler à l’égard des États-Unis témoigne d’un
singulier illogisme. N’éprouvant que du mépris pour leurs prouesses militaires,
il s’ingénie pendant deux ans à les garder à l’écart du conflit. L’ambassade du
Reich à Washington s’y employa par tous les moyens, y compris une tentative de
corruption des membres du Congrès, des subventions à la presse et l’appui
massif apporté au comité pro-isolationniste « Amérique d’abord ».
Les propos tenus par Hitler dans le privé trahissent cependant
une certaine clairvoyance. Tant que Roosevelt occuperait la Maison-Blanche, l’Amérique,
il s’en rendait parfaitement compte, mettrait obstacle à son grandiose
programme d’hégémonie mondiale et de découpage de la planète entre les
puissances de la Triplice. Il fallait donc la liquider, et même « impitoyablement ».
Pas tout de suite cependant. Une nation à la fois, tel est le secret de la
réussite. L’heure de l’Amérique viendrait. Mais pas avant la liquidation de la
Grande-Bretagne et de l’U. R. S. S. Appuyée par le Japon et l’Italie, l’Allemagne
s’occuperait alors de ces parvenus d’Américains qui, restés seuls et isolés, succomberaient
sans peine à l’assaut victorieux de l’Axe.
Le Japon représentait l’atout maître dans le jeu que menait
Hitler pour prolonger la non-belligérance des États-Unis jusqu’à ce qu’il fût
prêt à leur tomber dessus. Autrement dit, la menace japonaise pouvait empêcher
l’Amérique de se lancer dans le conflit européen ainsi qu’elle l’avait fait en
1917 (1). Ribbentrop n’avait pas manqué d’expliquer tout cela à Mussolini lors
de leurs conversations du 11 mars 1940.
Au début de 1941, Hitler et Ribbentrop étaient extrêmement
désireux d’entraîner le Japon dans la guerre ; non contre les États-Unis, pas
davantage contre l’Union Soviétique à la veille de l’agression allemande, mais
contre la Grande-Bretagne entêtée à ne pas s’avouer vaincue. Le 23 février,
Ribbentrop, installé dans son domaine autrichien (confisqué à son profit) de
Fuschl, près de Salzbourg, recevait le fougueux et colérique ambassadeur nippon,
le général Hiroshi Oshima, dont le pro-nazisme échevelé impressionna souvent l’auteur
de ces pages.
Bien que la guerre soit d’ores et déjà gagnée, apprit Ribbentrop
à son invité, il est souhaitable que, « dans son propre intérêt, le Japon
entre en guerre le plus tôt possible » et s’empare des possessions
britanniques en Extrême-Orient.
L’intervention brusquée des Japonais ne manquera pas d’écarter
les États-Unis du conflit. Même dans le cas contraire, continua Ribbentrop, la
victoire finale de l’Axe ne sera aucunement compromise. La flotte japonaise
vaincra sans difficulté la flotte américaine et la chute simultanée de l’Angleterre
et des États-Unis précipitera la fin des hostilités. Dans leurs négociations
avec Washington, les Japonais doivent donc parler net et faire montre de
fermeté, seule attitude susceptible de maintenir les États-Unis hors du conflit.
Le peuple américain… n’est pas disposé à sacrifier une
seconde fois ses fils et se montre hostile à l’aventure dans laquelle Roosevelt
et les Juifs, meneurs de jeu, veulent l’entraîner. Notre politique vis-à-vis
des États-Unis doit être empreinte d’une grande fermeté…
Ribbentrop présenta ensuite un autre argument, celui-là même qui
tomba si lamentablement à plat avec le Caudillo.
« S’il arrivait que l’Allemagne fléchisse, dit-il, le
Japon aurait aussitôt à faire face à une coalition mondiale. Berlin
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