Le Troisième Reich, T2
allemandes opérant en Italie, et dont
certaines étaient déjà très engagées en Sicile où elles combattaient contre les
armées d’Eisenhower, auraient été coupées de leurs bases d’approvisionnement. Elles
n’auraient alors pu tenir longtemps.
Mais les Italiens ne pouvaient pas se retourner en une nuit
contre les Allemands. Il fallait d’abord que Badoglio établît le contact avec
les Alliés pour essayer d’obtenir un armistice, ainsi qu’une aide des Alliés
contre les divisions de la Wehrmacht. Hitler avait vu
juste en disant que c’était ce que Badoglio allait faire, mais il ne se doutait
pas que cela prendrait aussi longtemps. En fait, cette hypothèse domina la
discussion lors d’un conseil de guerre qui se tint le 27 juillet au
quartier général du Führer et auquel assistaient les « têtes »
du gouvernement et des forces armées nazies, dont Gœring, Gœbbels, Himmler, Rommel et le nouveau commandant en chef de la marine, l’amiral
Karl Dœnitz – qui, en janvier, avait succédé au grand amiral Raeder, tombé en
disgrâce [222] .
La majorité des généraux, menés par Rommel, conseillèrent
la prudence, demandant que toute action envisagée en Italie fût préparée avec
le plus grand soin et non sans avoir été mûrement pesée. Hitler voulait
attaquer aussitôt, encore que cela signifiât le retrait de divisions blindées
du front de l’Est où elles étaient absolument nécessaires, les Russes venant
juste de déclencher (15 juillet) leur première offensive d’été de la
guerre. Pour une fois, il semble que les généraux aient réussi à imposer leur
volonté : Hitler se laissa persuader de ne rien entreprendre. Entre-temps,
on avait rassemblé toutes les troupes possibles pour les déverser en Italie à
travers les Alpes. L’hésitation des généraux impressionna fâcheusement Gœbbels.
Ils ne tiennent pas compte (écrivait-il dans son journal
après ces palabres) de ce que l’ennemi prépare. Les Anglais ne vont
certainement pas attendre une semaine pendant que nous étudions et préparons
notre action.
Hitler et lui n’avaient pas besoin de s’inquiéter : les
Alliés n’attendirent pas une semaine, ils en attendirent six. A ce moment-là, Hitler
avait établi ses plans, et les forces pour les exécuter étaient à pied d’œuvre.
En fait, son esprit fébrile avait déjà conçu ces plans lors du
conseil de guerre du 27 juillet. Ils étaient au nombre de quatre : 1.
Opération Eiche (Chêne), pour faire enlever Mussolini soit par la marine,
s’il se trouvait sur une île, soit par des parachutistes de la Luftwaffe, s’il
était interné à l’intérieur ; 2. Opération Student , ayant pour
objectif l’occupation de Rome et le rétablissement de Mussolini au pouvoir ;
3. Opération Schwarz (Noir), nom conventionnel désignant l’occupation
militaire de toute l’Italie ; 4. Opération Achse (Axe) envisagée
pour la capture ou la destruction de la flotte italienne.
Au début de septembre 1943, deux événements décidèrent la mise
en action des plans établis par le Führer. Le 3 septembre, les troupes
alliées débarquaient en Italie du sud et, le 8 septembre, on annonçait
publiquement qu’un armistice avait été conclu entre l’Italie et les puissances
occidentales (il avait été secrètement signé le 3 septembre).
Ce même 8 septembre, Hitler s’envolait à destination de
Zaporozhe, en Ukraine, pour essayer de raffermir le front allemand qui
chancelait, mais, selon Gœbbels, il fut pris « d’un étrange sentiment de
malaise », et il revint le même soir à son quartier général de Rastenburg,
en Prusse-Orientale, pour apprendre la défection de son principal allié. Il
avait beau avoir prévu cet événement et tout préparé en conséquence, le choix
du moment et les circonstances dans lesquelles il se produisit le prirent au
dépourvu. Pendant plusieurs heures, la plus grande confusion régna au Quartier Général.
Les Allemands apprirent l’armistice italien par une émission de
la B. B. C. de Londres, et lorsque Jodl, de Rastenburg, appela par téléphone le
maréchal Kesselring, à Frascati, près de Rome, pour lui demander si cette
nouvelle était exacte, le commandant en chef confessa qu’il en entendait parler
pour la première fois. Toutefois, Kesselring, dont ce même matin le quartier
général avait été détruit par un bombardement allié et qui s’occupait de
rassembler les troupes pour affronter un
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