Le Troisième Reich, T2
de son
fondateur et dictateur, mais c’étaient des tâches bien différentes.
Les messagers chargés du testament d’Hitler n’avaient pas encore
eu le temps d’apporter celui-ci à Dœnitz, qui ignorait encore sa nomination de
successeur du Führer. Il fallait donc en informer l’amiral
par radio. Mais Bormann hésitait : il était bien difficile de renoncer à
la puissance un instant savourée ! Il finit par envoyer un message.
GRAND AMIRAL DŒNITZ
A la place de l’ex-maréchal du Reich Gœring, c’est vous que
le Führer a désigné comme son successeur. Confirmation écrite vous parviendra
incessamment. Vous prendrez immédiatement toutes mesures requises par la
situation.
Pas un mot sur la mort d’Hitler.
L’amiral, qui avait le commandement suprême de toutes les forces
allemandes dans le nord, avait transféré son Q. G. à Plœn, dans le Schleswig. Cette nouvelle le stupéfia. A la différence des
autres chefs du parti, il n’avait jamais désiré succéder à Hitler : une
telle pensée n’avait même pas effleuré sa cervelle de marin. Deux jours plus
tôt, croyant qu ’Himmler serait le successeur désigné, il
était allé trouver le chef S. S. pour lui offrir son appui. Mais, comme il n’aurait
pas envisagé de désobéir à un ordre du Führer, il envoya la réponse suivante, sans
se douter qu’Adolf Hitler n’était plus.
Mon Fuehrer !
Ma loyauté vous reste indéfectible. Je ferai tout mon
possible pour vous aider à Berlin. Néanmoins, si le sort m’oblige à gouverner
le Reich, en tant que votre successeur, désigné par vous, je continuerai cette
guerre jusqu’à une fin digne de la lutte unique et héroïque du peuple allemand.
Grand amiral Dœnitz.
Cette nuit-là, Bormann et Gœbbels eurent une nouvelle idée. Ils
décidèrent de tenter une négociation avec les Soviets. Le général Krebs, le
chef de l’état-major général de l’armée, qui était resté au bunker, avait été
autrefois attaché militaire adjoint à Moscou. Il parlait le russe et il avait
même reçu l’accolade de Staline, à la gare de Moscou. Peut-être pourrait-il
obtenir quelque chose des Bolcheviks ? Ce que Bormann et Gœbbels
désiraient exactement, c’était un sauf-conduit pour eux deux, afin de prendre
les places que leur avait désignées le Führer dans le nouveau gouvernement Dœnitz.
En retour, ils étaient prêts à offrir la reddition de Berlin.
Le général Krebs se mit en route peu après minuit, le 30 avril,
pour voir le général Chuikov, commandant les troupes soviétiques assiégeant
Berlin [296] .
Un des officiers allemands qui l’accompagnaient a relaté en
ces termes le début de la conversation.
Krebs : Aujourd’hui,
c’est 1er mai, un grand jour de fête pour nos deux nations.
Chuikov :
Pour nous, en effet. Mais je ne sais ce qu’il en est pour vous (25).
Le général russe exigea la reddition sans condition du bunker en
bloc, sans distinction de personne, ainsi que de toutes les troupes allemandes
de Berlin.
Krebs mit un certain temps à remplir sa mission et l’impatient
Bormann, ne le voyant pas revenir à onze heures, le 1er mai, envoya un
autre message par radio, à Dœnitz.
Les termes du Testament sont immédiatement applicables. Je
vais vous rejoindre aussitôt que possible. Je vous conseille de ne pas le
divulguer avant mon arrivée.
C’était un texte ambigu. Bormann n’était pas assez franc pour
révéler la mort du Führer. Il voulait sortir de Berlin
pour être le premier à informer Dœnitz de cette nouvelle sensationnelle et s’assurer
la faveur du nouveau commandant en chef. Mais Gœbbels qui, avec sa femme et ses
enfants, était sur le point de mourir, n’avait aucune raison de cacher la
vérité à l’amiral. A quinze heures quinze il expédia de son côté un message à Dœnitz
– et ce fut la dernière communication par radio émise par le bunker assiégé.
AU grand amiral Dœnitz
Ultra-secret.
Le Führer est mort hier à quinze heures trente. Testament 29 avril
vous désigne comme président du Reich… (Suivent les noms des principaux membres
du cabinet désignés.)
Par ordre du Führer, le Testament vous a été envoyé… Bormann
a décidé de vous rejoindre aujourd’hui pour vous informer de la situation. A
vous de décider du moment et de la façon de mettre au courant la presse et les
troupes. Confirmez réception.
Gœbbels.
Gœbbels n’estimait pas nécessaire de renseigner le nouveau chef
sur ses
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