Le Troisième Reich, T2
même, le 7 octobre, le général von
Brauchitsch avertit ses commandants de groupes, sur les instances d’Hitler
… de faire tous préparatifs pour immédiate invasion des
territoires hollandais et belge, si la situation politique l’exige (2).
Deux jours plus tard, le 9 octobre, dans la directive n° 6,
Hitler ordonnait :
Les préparatifs doivent être faits pour une opération
offensive… par le Luxembourg, contre la Belgique et la Hollande. Cette attaque
doit être exécutée aussitôt et en aussi grande force que possible… L’objectif
de cette attaque est d’occuper en Hollande, en Belgique et au nord de la France
un territoire aussi vaste que possible (3).
Les Belges et les Hollandais, naturellement, n’étaient pas au
courant des ordres secrets d’Hitler. Toutefois ils furent avertis de ce qui les
attendait. Quelques-uns avaient déjà été prévenus : le colonel Oster, un
des conspirateurs anti-nazis, avertit les attachés militaires hollandais et
belge à Berlin le 5 novembre de s’attendre à une attaque allemande pour le
12 novembre, qui était alors la date fixée. A la fin d’octobre, Gœrdeler, autre
conspirateur, s’était rendu à Bruxelles à l’instigation de Weizsaecker, pour
prévenir les Belges d’une attaque imminente. Et peu après le Nouvel An, le 10 janvier
1940, les plans d’Hitler sur l’offensive à l’Ouest étaient tombés entre les
mains des Belges quand un officier qui les transportait avait fait un
atterrissage forcé en Belgique.
Les états-majors hollandais et belge savaient déjà par leurs services
de renseignements que les Allemands concentraient 50 divisions sur leurs
frontières. Ils bénéficiaient aussi d’une source exceptionnelle d’informations
dans la capitale allemande. Cette « source » était le colonel G. F. Sas,
attaché militaire hollandais à Berlin. Sas était un ami intime du colonel Oster
et dînait souvent chez lui dans le faubourg écarté de Zehlendorf – une habitude
facilitée, après la déclaration de guerre, par le blackout à
la faveur duquel nombre de gens à Berlin, Allemands et étrangers, pouvaient se
livrer à des activités subversives sans grande crainte d’être découverts.
C’est à Sas que Oster passa le tuyau, au début de novembre, de l’assaut
prévu alors pour le 12 et, en janvier, il donna un nouvel avertissement à l’attaché.
Le fait qu’aucune de ces attaques n’avait eu lieu affaiblit quelque peu le
crédit de Sas à La Haye et à Bruxelles, où l’on ignorait naturellement qu’Hitler
avait en réalité arrêté ces dates pour son agression, puis les avait retardées.
Cependant les renseignements donnés à Sas par Oster sur l’invasion de la
Norvège et du Danemark, et cela dix jours avant, et l’exactitude de la date qu’il
avait indiquée, semblent avoir restauré son prestige dans sa patrie.
Le 3 mai, Oster dit nettement à Sas que l’attaque allemande
à l’Ouest par les Pays-Bas et la Belgique commencerait le 10 mai, et l’attaché
militaire s’empressa d’en informer son gouvernement. Le lendemain, La Haye
recevait confirmation de son envoyé au Vatican. Les Hollandais passèrent
immédiatement le mot aux Belges. Le 5 mai était un dimanche, et à mesure
que la semaine passait, il devenait tout à fait évident pour nous tous à Berlin
que le choc à l’Ouest se produirait dans quelques jours. La tension montait
dans la capitale. Le 8 mai, je câblai à mon bureau de New York de laisser
un de nos correspondants à Amsterdam au lieu de l’expédier en Norvège, où de
toute façon la guerre était terminée, et ce soir-là la censure militaire m’autorisa
à faire une allusion dans mon émission à une opération prochaine à l’Ouest
intéressant la Hollande et la Belgique.
Dans la soirée du 9 mai, Oster et Sas dînèrent ensemble ;
ce devait être la dernière fois. L’officier allemand confirma que l’ordre
définitif avait été donné de lancer l’attaque à l’Ouest à l’aube du lendemain. Pour
être sûr qu’il n’y avait eu aucun changement de dernière heure, Oster fit un
saut après dîner au Q. G. de l’O. K. W. dans la Bendlerstrasse. Il n’y avait eu
aucun changement. « Le cochon est parti sur le front de l’Ouest », dit
Oster à Sas. Le « cochon », c’était Hitler. Sas prévint l’attaché
militaire belge, se rendit ensuite à la légation et fit passer un appel
téléphonique à La Haye. Un code spécial pour cet
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