Le vétéran

était le professeur John Ingles, président du département d'histoire de l'Ouest de l'Université du Montana à Bozeman. Il avait pour invité
    d'honneur le suppléant du sénateur de l'…tat, venu spécialement de Washington. Trois membres du Congrès de Helena l'accompagnaient, ainsi que trois fonctionnaires du ministère de l'…ducation. Le professeur Ingles ouvrit le cadenas et fit entrer les visiteurs, qui regardèrent autour d'eux avec intérêt et curiosité.
    - Monsieur le sénateur, messieurs, soyez les bienvenus à Fort Héritage, déclara le professeur, rayonnant de contentement.
    Il faisait partie de ces individus chanceux qui non seulement possèdent une bonne humeur à toute épreuve mais font aussi leur métier de leur plus grande passion. Toute sa vie était dévolue à son travail : une étude de l'Ouest traditionnel et une analyse de son histoire. Il était complètement imprégné du Montana d'autrefois, des guerres des Plaines, des tribus indiennes qui avaient vécu et chassé dans la région. Fort Héritage incarnait le rêve qu'il avait nourri pendant une décennie, et il lui avait fallu plaider sa cause une bonne centaine de fois lors des réunions de comité. Cette journée représentait le couronnement de ces dix années.
    - Ce fort et ce comptoir sont la reconstitution exacte, au moindre détail près, de ce qui existait à l'époque de l'immortel général Custer. J'ai moi-même veillé à chaque détail, et je m'en porte garant.
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    Tout en guidant le groupe à travers les bungalows en bois et les autres b
    ‚timents, il expliqua que son projet avait son origine dans ses démarches auprès de la Société d'histoire du Montana et du Cultural Trust ; le financement provenait des fonds que le Trust tirait des taxes sur le charbon, et qu'il avait accepté, après moult discussions, de lui allouer.
    Il leur assura que la conception du fort était irréprochable, et qu'il avait utilisé le bois des forêts de la région, comme l'auraient fait leurs ancêtres. Par souci de perfection, il avait même interdit les écrous en acier au profit de clous plus authentiques. Son enthousiasme débordant se communiquait à ses hôtes.
    - Fort Héritage va constituer une expérience pédagogique motivante et pleine de sens pour les enfants et les jeunes gens du Montana, et - je l'espère - pour ceux des …tats voisins. Jusque dans le Wyoming et le Dakota du Sud, des groupes ont déjà réservé pour des voyages organisés. En dehors de nos murs, en bordure de la réserve crow, nous avons trente arpents d'enclos pour les chevaux, et la saison venue, nous ramasserons les foins pour pouvoir les nourrir. Des spécialistes seront chargés de couper le foin comme autrefois. Les visiteurs se familiariseront avec la vie de la Frontière cent ans en arrière. Je vous certifie qu'on ne trouve pas l'équivalent ailleurs en Amérique.
    - «a me plaît, fit le sénateur, ça me plaît énormément. Mais comment allez-vous trouver du personnel ?
    - C'est un peu la cerise sur le g‚teau, mon cher sénateur. H ne s'agit pas d'un musée, mais d'un fort en activité, comme en 1870. Notre budget nous permet d'embaucher une soixantaine de jeunes gens durant tout l'été, ainsi que les jours fériés et pendant les vacances scolaires. La plupart des employés seront des jeunes personnes, recrutées dans les cours d'art dramatique des grandes villes du Montana. Les réactions ont été
    incroyablement positives, de la part d'étudiants qui souhaitent travailler pendant l'été tout en accomplissant une t‚che louable. Nous avons déjà
    soixante volontaires. Moi-même je serai le major Ingles du 2e régiment de cavalerie, commandant de ce poste. Il y aura aussi un sergent, un caporal et huit soldats - des étudiants qui savent monter à cheval. Les montures nous seront prêtées par des fermiers obligeants.
    ´ Des jeunes filles joueront le rôle des cuisinières et des blan-r
    M
    chisseuses. Tout le monde portera des costumes d'époque. D'autres étudiants en art dramatique se mettront dans la peau des trappeurs descendus des montagnes, des éclaireurs venus des plaines, ou des pionniers qui traversaient les Rocheuses pour aller vers l'ouest. Un véritable forgeron a accepté de se joindre à nous ; ainsi, les visiteurs pourront regarder comment on ferrait les chevaux. C'est moi qui célébrerai le service religieux, là-bas dans la chapelle du poste, et nous chanterons les cantiques de jadis. Bien entendu, les filles