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Le Voleur de vent

Le Voleur de vent

Titel: Le Voleur de vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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répandre son poison !…
Ah, il faut qu’ils sachent que pareil méfait ne sera oncques pardonné par homme
connaissant la valeur de la vérité.
    Puis, regardant le roi, il ajouta d’un air de
réprobation :
    — Ils en ont menti, car les choses ne
furent point ainsi en leurs circonstances. Mais si je sais qui ils sont, je les
amènerai à résipiscence et ce ne sera point pour douce admonition !… Au
reste, Votre Majesté, peut-être n’est-il point sage d’écouter telles vilenies
car en cette voie où sont les médisants, qui sait si, devant que les feuilles
ne reviennent aux arbres, ils ne diront pas que vous avez séduit et abandonné
le Grand Turc.
    Henri quatrième fut un instant interdit, tentant
mentalement de rassembler ce qu’il venait d’entendre afin qu’on dressât un acte
et conduisît séant monsieur de Nissac à la Bastille : « J’ai
donc une langue de scorpion, un cœur de vipère, des yeux de basilic, je suis en
outre un chauffe-cire qui a séduit et abandonné le Grand Turc ! »
    Puis il comprit que cela ne s’adressait point
à lui en l’esprit de l’amiral et, aussitôt mis à l’aise, il eut plutôt envie d’en
rire.
    Il s’en garda pourtant devant l’air sombre de
monsieur de Nissac qui poursuivit :
    — Sire, je n’avais point le projet de
séduire la duchesse. C’est elle qui s’en vint à la nuit me trouver sur la
dunette. Elle savait ce qu’elle voulait, moi pas. Je suis un homme de solitude,
sans artifices, et de peu d’expérience avec les femmes car attendant l’amour, et
non les aventures galantes. Mais, à l’aube de cette nuit, tout fut fini entre
la duchesse et moi.
    « Il ne manque point de courage de parler
ainsi car il est rare qu’un homme confesse son peu d’expérience avec les femmes !…
Sans doute ces paroles sont-elles aussi destinées à la baronne, mais ma
présence ne l’a point arrêté en sa résolution. Ah, Nissac, comme j’aurais aimé
t’avoir pour ami au lieu de quoi je vais t’envoyer à la mort car il y a entre
nous Fontaine-Française et que la vérité sur cette affaire, au-delà de ma
personne, ou à travers elle, ternirait la monarchie. »
    Ainsi pensait le roi, non sans tristesse. Tristesse
qui s’accrut encore en voyant scène qui se déroulait sous ses yeux.
    Comme enfermé en lui-même, l’amiral-comte de
Nissac regardait avec mélancolie du côté de la rivière de Seine, n’apercevant
point avec quels yeux amoureux la baronne l’observait. Aimer ainsi, Henri
quatrième en eut le vertige et songea une nouvelle fois arrêter son entreprise
consistant à envoyer Nissac à la mort. Et sans doute aucun l’eût-il fait si l’affaire
n’engageait que lui mais hélas pour l’amiral, c’est la monarchie qui risquait
de se trouver en péril. La baronne Isabelle de Guinzan savait depuis le premier
instant que le comte de Nissac était le grand amour de sa vie et qu’après lui, si
tragiquement il devait se trouver un « après », les autres hommes n’existeraient
pas. Mais voir ainsi celui qu’elle aimait renoncer à la fierté du paraître, ne
point endosser habit flatteur du séducteur, comme l’y invitait le roi, choisir
la vérité, quand celle-ci vous montre tel un homme qui n’a point besoin de
multiplier les conquêtes amoureuses pour exister et cherche en une seule femme
ce que les autres ne trouvent point en toutes, ah, c’était là chose délicieuse.
Elle songea, regrettant de ne le pouvoir dire : « Comme je t’aime, cher
comte !… Comme je serais heureuse de me blottir contre ton épaule et que
tu prennes ma taille entre tes bras puissants, et me serres, me serres si fort
que j’en meure de plaisir. »
    Cependant, le roi reprit :
    — C’est fort bien, Nissac, et pour ma
part, je ne cherchais point à vous blesser. Néanmoins, les humiliations que
vous avez infligées à Philippe III amusent une partie de l’Europe, nos
alliés, qui se trouvent ainsi rassurés. Il faut continuer.
    — Disposez de moi, Sire.
    Henri quatrième hésita. Il était temps encore
de tout arrêter mais, chez le Béarnais, la conception qu’il se faisait du
devoir fut la plus forte, et c’est là toute la cruauté du métier de roi : savoir
sacrifier un homme de grande valeur tel Nissac à l’intérêt de la couronne.
    Henri quatrième continua :
    — Vous devez encore frapper l’Espagnol, telle
cette fois qui ne vous est pas officiellement attribuée : le canonnage, presque
de nuit, de six

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