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Le Voleur de vent

Le Voleur de vent

Titel: Le Voleur de vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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mort, et de là lui venait
envie de pleurer.
    Ou bien en cet instant même où regardant la
baronne il se disait qu’il faudrait avoir des ailes afin d’effleurer les êtres
qu’on aime et, ne les touchant point, être en certitude de ne leur jamais faire
de mal.
    On sella pour Isabelle cheval de sept ans, de
préférence à une jument et un cheval d’à peine trois ans très nerveux et la
baronne remarqua qu’à l’égal de « Flamboyant », le bel Andalou
aveugle, tous étaient d’un noir charbonneux.
    Devinant sa pensée, le comte précisa :
    — Il se dit depuis toujours en ma famille
que le premier Nissac, voici des siècles et des siècles, arriva de l’est monté
sur haut cheval noir, n’ayant pour seul bagage que sa longue épée à la main. Je
suppose que s’il n’alla pas plus loin qu’ici, c’est qu’il fut arrêté par la mer.
En tous les cas, légende ou histoire vraie, depuis des siècles tous nos chevaux
sont noirs.
    — Il trouva donc femme, cet ancêtre
barbare ?… demanda la baronne avec petit accent de provocation.
    — Ma présence ici semble l’attester, madame.
    — On peut donc être Nissac et aimer d’amour ?…
remarqua-t-elle avec un ton assez désagréable qu’elle regretta aussitôt.
    Le comte ne répondit pas sur l’instant. Il
monta en selle, puis :
    — On peut aimer et ne point savoir parler
d’amour, madame, mais il ne me semble pas que la timidité retranche quoi que ce
soit à la vérité et à la force de semblable sentiment.
    Sans attendre de réponse, il lança son cheval
au galop et le baronne ne put comme elle le souhaitait rattraper ses
malheureuses paroles.
    Les forêts des Nissac s’étendaient sur des
lieues et des lieues, coupées d’étangs et, à mesure qu’on se rapprochait de la
mer, apparaissaient landes désolées balayées par les forts vents glacés venus
du large.
    Durant cette longue promenade, ils échangèrent
rares paroles et, peu avant le château, le comte mit pied à terre.
    Avec fierté presque enfantine, il montra une
garenne, des ruches, un verger, des colombiers et pigeonniers, jardin
bouquetier et médicinal puis ils passèrent les douves et s’engouffrèrent sous
la grande porte aux armes des Nissac qu’elle connaissait, ayant remarqué ce
blason frappé, au souper, sur la vaisselle d’argent.
    Enfin, il la mena à l’oratoire.
    — C’est là bien modeste chapelle mais
voici quelque temps déjà que nous ne faisons plus dire de messes au château, sauf
très rares exceptions concernant nos villageois.
    — Il n’est point besoin de messe pour
croire !… osa-t-elle dire.
    — Mais pour croire, faut-il espérer ?…
répondit-il avec finesse.
    Ils se regardèrent, prêts à se prendre en les
bras l’un de l’autre mais, une fois encore, l’occasion fut manquée et le comte
se détourna.
    La journée s’écoula rapidement. Les barons de
Sousseyrac et Fey des Étangs dormaient encore en le début d’après-midi. En
revanche, le seigneur Yasatsuna ne ménagea point sa peine. Il revêtit son
armure et s’exerça avec sa « yari », lance courte à l’aide de
laquelle il frappait d’estoc toujours de haut en bas, la lame, droite, étant
pourvue de deux tranchants.
    Puis, tels des objets sacrés, il étala sur
peau de daim ses trois sabres : le long, dit Katana, le court Wakasashi, les
deux appartenant au genre diashô, et enfin le très court tantô, utilisé pour la
défense personnelle en combat très rapproché.
    Il réalisa ensuite figures à cheval, ayant
décoré la selle de pompons rouges tels qu’en son pays.
    Au souper, qu’avait tenu à préparer en secret
Isabelle de Guinzan, grande fut la surprise de voir arriver les mets, gibiers, poissons,
viandes et volailles tels qu’en la forme où ils furent déposés sur la table car
on eût cru voir, très fortement réduits de tailles, girafes, singes, loups, éléphants
et crocodiles. Et chacun fut plongé en l’émerveillement devant pareil prodige.
    La soirée n’était guère très avancée lorsque
le comte de Nissac proposa qu’on regagnât les chambres car on partait le
lendemain fort tôt pour le Louvre.
    Le duc d’Épernon
transpirait sous sa cagoule de pénitent, et le fait n’était point dû seulement
à la chaleur qui régnait en cet hôtel particulier de la rue Saint-Julien, mais
à la peur qui lui collait à la peau à l’idée que des forces dont il ignorait
tout l’avaient identifié tel le chef d’un complot visant à

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