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Le Voleur de vent

Le Voleur de vent

Titel: Le Voleur de vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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par le jurisconsulte.
    — Mais parmi toutes celles-ci se trouvait
une des plus belles, des plus convoitées : Julienne d’Estrées, duchesse de
Villars. N’est-elle pas ravissante, monsieur le comte ?
    En son humeur des plus sombres, Nissac répondit :
    — Certainement !… Mais elle ne m’évoque
point les jardins de la reine Sémiramis : sa bouche sent l’ail à quatre
toises.
    Élisabeth fut émue, et prise de forte envie de
rire. Au fond, elle ne croyait pas que le vice-amiral fût un galant assoiffé de
conquêtes et, en l’histoire contée ici, elle ne doutait pas de sa bonne foi. Alors
pourquoi ne le montrait-elle pas ?… Pourquoi toujours chercher à déplaire
à cet homme qu’elle aimait malgré tout ce qui se mettait en travers de si
tendre sentiment ?… En cet instant, où il se trouvait en grand embarras et
de la plus injuste des façons, elle eût souhaité se blottir contre lui.
    Mais c’est un regard glacé qu’elle lui jeta
tandis que le jurisconsulte reprenait :
    — On aurait tort de se moquer, car
Julienne d’Estrées, duchesse de Villars, se prit réellement de passion pour
monsieur de Nissac qui, ce n’est pas un secret, la repoussa. De chagrin, la
belle duchesse se suicida.
    — Elle survécut, hélas !… ajouta
Nissac qui, brusquement, porta la voix en l’oreille du jurisconsulte :
    — Savez-vous comment elle se suicida ?
    — Mais certainement : elle avala ses
diamants et n’en mourut point.
    Louis partit d’un rire de grande gaîté, tant
lui semblait bien en la manière de la Cour de se suicider… en avalant des
diamants !
    Nissac, qui connaissait cette histoire de
longue main pour l’avoir en partie vécue ne rit pas et, aussitôt, Élisabeth lui
demanda sans douceur :
    — Pourquoi êtes-vous toujours si sérieux,
monsieur de Nissac ?
    Las d’être ainsi malmené, le comte répondit
pour la première fois d’un ton un peu vif :
    — C’est le seul moyen que j’ai trouvé
pour me faire rire, madame.
    Puis, se tournant vers Louis :
    — Je prends la mer demain et il me faut
dormir.
    Cette nuit-là, pourtant,
le comte de Nissac tarda à s’endormir. Il se trouvait en état de grande
tristesse et sans guère d’espoir qu’Élisabeth change d’attitude à son endroit.
    Il murmura :
    — Elle ne m’aime point, ne m’a jamais
aimé et ne m’aimera jamais.
    Pourtant, il ne s’était jamais encore trouvé, en
sa vie, en un tel besoin d’être aimé et d’aimer lui aussi.
    — Je suis folle !…
Je ne travaille qu’à mon malheur, qu’à ruiner l’intérêt que me porte monsieur
de Nissac. Louis, je ne mérite ni l’amour, ni le bonheur.
    Le frère prit la sœur en ses bras, ne sachant
que répondre.
    Endormi sur son fauteuil, le jurisconsulte
bavait d’importance, inondant son pourpoint.
    Dehors, en la nuit froide, une chouette lança
son cri solitaire.

26
    Le Dragon Vert filait, légèrement incliné sur la vague, le vice-amiral de Nissac prenant le
vent au mieux des possibilités de la voilure de son navire.
    Deux vaisseaux s’étaient montrés, d’abord
entreprenants en leur approche, pour s’éloigner au plus vite en reconnaissant
le grand dragon de bois sculpté peint en vert qui ornait la proue du bâtiment
royal. Et grande fut leur chance car le comte de Nissac, occupé ce jour en
autre mission, ne chercha point l’engagement.
    Le vice-amiral se trouvait sur la dunette, le
second, le baron Charles Paray des Ormeaux, à ses côtés.
    Silencieux, tous deux suivaient du regard
monsieur de Yasatsuna, le torse nu et le front ceint d’un bandeau rouge qui, son
curieux sabre japonais à la main, s’exerçait sur le vaste pont supérieur contre
adversaires imaginaires qui semblaient, en cette figure, l’attaquer de tous
côtés à la fois et au même instant.
    Sur le gaillard d’arrière, à portée de voix de
Nissac puisque le vent se trouvait favorable, les barons de Sousseyrac et Fey
des Étangs commentaient cet étrange combat contre des ombres.
    — Il est fort rapide et des plus précis !…
remarqua Sousseyrac en homme de guerre de grande expérience.
    — Vous devriez faire tel que lui, capitaine,
et manger poisson cru ou demi-pourri pour avoir séjourné en saumure dont ne
voudraient point sorcières pour y faire apparaître démons de l’enfer.
    — Peut-être le devrais-je en effet mais
poisson pourri séjournant entre les dents ne plaît point aux dames car il donne
aux baisers goût de sentine.
    Fey des

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