Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS
fabrication du produit destiné à la « destruction des animaux nuisibles ». Il explique : « Les douves du château et la proximité d’étangs favorisent la propagation de ce fléau, bien que nous l’ayons peu subi durant l’année 1943. » Anticipant prudemment sur le délai d’acheminement de la fameuse brochure, Lang réclamera la livraison immédiate des ingrédients nécessaires.
À l’image du Reich, la façade de la maternité des Ardennes commence à se fissurer. On maintient les apparences, mais les nouvelles ne sont pas rassurantes. Le 26 avril, Walter Lang livre au général Ebner un tableau sans fard de la situation à Wégimont : « Les conditions actuelles ne permettent pas d’écrire de longues lettres bien qu’il y ait beaucoup à raconter. » Trois nouvelles naissances ont eu lieu et une infirmière adresse d’ailleurs un courrier à l’état civil secret du Lebensborn , Steinhöring II pour les faire enregistrer. D’autre part, la maternité a été récemment jumelée sur le plan administratif avec la Reichsschule Flandern , une école SS rassemblant une centaine d’élèves, dans les environs de Gand. Nous ignorons si ces jeunes garçons étaient censés venir admirer leurs petits congénères ou saluer les mères modèles…
Pour le reste, c’est la débâcle au château. Lang ne supporte plus l’infirmière en chef. Il a également congédié Frau Rückel, une collaboratrice devenue « mégalomane »… Le personnel de la maternité, lui, semble avoir perdu toute retenue : le régisseur du domaine, l’officier Pletsch, a dû être hospitalisé à cause d’une… syphilis. Il a contaminé Frau Franze, la dactylo. Une employée de cuisine belge a également transmis la maladie au sergent SS flamand Overbeck, qui s’était « acoquiné avec elle lors de son séjour » sur place… « Je ne peux pas vous raconter les détails par écrit », ajoute pudiquement Lang.
Quelques semaines auparavant, le curé de Soumagne note dans son journal : « La maternité internationale tourne à plein. C’est la débauche organisée. Une petite servante âgée de 17 ans a un enfant d’un an et demi. » Que sait-il exactement de ce qui se passe à la maternité ? Toujours est-il que pour l’homme d’église, le château est la demeure du Diable. Il ajoute : « Une petite flamande éplorée, se disant catholique, est venue au début de mars 1944 me demander si on n’avait pas jeté un sort sur son enfant âgé de deux mois et transporté à l’hôpital à Bruxelles. Elle ne pouvait pas aller le voir… »
Jusqu’au bout, le commandant Walter Lang va chercher à tenir la maternité en ordre de marche, même si trois infirmières seront retirées de son effectif au cours de l’été, certainement à cause du manque d’activité. Lang vante en tout cas les mérites de son dernier carré de fidèles employés, notamment l’infirmière Helene Magg et le SS-Mann Beyer, pour l’intendance. Il invite chaleureusement le général Ebner à lui rendre visite dès que possible. Le médecin chef du Lebensborn n’honorera cependant pas cette invitation. D’après les éléments que j’ai pu rassembler, un dernier enfant, Anne-Marie, naît à Wégimont, le 18 août. Ce jour-là, sur le front de l’Est, l’Armée rouge libère Sandomierz, ville polonaise sur la Vistule, entre Lublin et Cracovie. Le même jour, les troupes alliées qui viennent de débarquer sur les plages de Provence foncent sur Aix et Gap. En Normandie, une percée décisive ouvre la route de Paris.
Les premiers éléments de la 3 e division blindée américaine entreront dans Liège le 7 septembre 1944. Six jours plus tôt, le Sturmbannführer-SS Walter Lang a fait évacuer précipitamment la maternité Ardennen .
Dans sa fuite, il a emmené un précieux chargement : les enfants.
1 - L’assistante de Max Sollmann.
2 - Et ce n’est pas tout en ce qui concerne le curriculum vitae de Frau Viermetz : à la fin du mois de septembre 1942, juste avant de rejoindre sa nouvelle affectation en Belgique, Inge Viemertz se rend à Bled, une charmante villégiature au bord d’un lac, dans les Alpes slovènes. Cette fois-là, il s’agit de statuer sur le sort d’une vingtaine d’enfants de résistants fusillés…
3 - Elles sont surnommées ainsi à cause de leur blouse sombre mais aussi de leur fidélité à l’idéologie du Reich.
VI
L’étrange pouponnière dans la
Weitere Kostenlose Bücher