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L'Église de Satan

L'Église de Satan

Titel: L'Église de Satan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnaud Delalande
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compassion. Vous êtes restés sourds à nos appels. Il n’est
plus temps de revenir en arrière à présent. Je ne vous aime pas, mon ami, ni
vous ni les vôtres. Sachez, Jean de Montréal, que votre femme, Alazaïs de
Bugarach, cette femme que vous avez abandonnée pour épouser la cause hérétique,
vient de donner naissance à une fille. Naturellement, vous ne la verrez jamais ;
et naturellement, cela est sans importance, puisqu’elle n’est pas de vous. Avant
que vous ne mouriez, je voudrais que vous sachiez une chose. Il est de mon
devoir de garder cette enfant sous ma protection. Ainsi, je saurai l’éloigner
des influences néfastes de votre famille. Je trouve la chose fort belle : je
m’occuperai d’elle, je m’occuperai de cette brebis que je choisis parfaitement
au hasard, parmi toutes les brebis égarées.
    Il étendit le bras devant lui, d’un geste
impérial. Puis il serra le poing.
    —  … Et je prouverai
que jamais Sathanas ne sera triomphant. Je le vaincrai dans l’âme même de cette
créature. Je prouverai, comme l’a dit le Seigneur, que le mauvais grain peut
être bonifié, si on le soustrait à sa funeste semence… Seigneur, notre Dieu, disent Isaïe et les prophètes, des maîtres étrangers nous ont possédés
sans vous ; faites qu’étant dans vous maintenant, nous ne nous souvenions
que de votre nom ! Elle s’en souviendra, mon ami ; elle grandira
dans mon ombre et sera fière de son Église. La douleur de l’enfantement n’est
rien, mon ami, rien en regard de celle qu’éprouve le Christ Rédempteur lorsqu’il
se souvient de tous ces enfants que vous ôtez à sa maistrie. Voyez donc : pour
vous, je vais réparer le destin. Je serai son gouverneur, son précepteur et sa
conscience. J’en ai le pouvoir. Et ce sera là une manière de pardon pour vos
fautes, Jean de Montréal. Sans doute le seul pardon que vous méritez.
    Il rit.
    — Porc ! Chien galeux ! hurla
le prisonnier, crachant autant de salive que de sang. Aguilah, vous serez
maudit jusqu’à la fin des temps ! Laissez-moi sortir ! Laissez-moi, vous
m’entendez !
    Aguilah écarta un bras, haussa les sourcils et
tendit la main vers le ciel.
    —  De profundis clamavi ad te, Domine, dit-il
avec ironie. Oui, adressez vos suppliques au Seigneur, âme déjà damnée, sentez
les flammes de l’enfer qui vous attend. Le voyez-vous, ce Dragon, cette bête
aux mille visages, qui rampe et se terre dans notre belle Occitanie ? Il
sera bientôt à nos pieds, tête tranchée, sa queue déroulée et inerte, sa langue
pendante au milieu des fumées. Priez le vrai Dieu, Jean de Montréal, qu’il vous
accorde la rémission de vos péchés !
    Le prisonnier tirait sur ses chaînes de toutes
ses forces, muscles tendus, les veines saillant à ses tempes ; les
bracelets autour de ses poignets, de ses chevilles, meurtrissaient sa chair.
    Tout à coup, Aguilah s’arrêta.
    — Je suis las d’avoir sillonné ce pays à
la recherche de votre secret.
    Il planta ses yeux dans ceux du prisonnier.
    — Quel secret ?
    Aguilah le gifla. Une gifle cinglante.
    — Quel secret ? Ne vous moquez pas
de moi. Celui que vous n’avez cessé de nous cacher ! Je parle des reliques
ramenées par un chevalier inconnu et sans religion, en l’an de grâce 1209. Oui,
il y a plus de trente ans de cela ! Je parle de ces reliques impies que je
sais dissimulées, là, quelque part ! Durant tout ce temps, nous avons
écumé les villes et les châteaux, retourné toute la terre ! Mais rien n’a
suffi à nous permettre de les retrouver. J’ai cherché sans relâche, pour lever
enfin ce mensonge derrière lequel se cache votre secte, et vos champions
Bertrand Marty et Guilhabert de Castres !
    Aguilah se pencha en avant :
    — Éclairez-moi donc, Jean de Montréal. Je
n’attends de vous… qu’une simple confirmation de ce que je crois déjà. Il me
suffit d’un mot et vous êtes libre. Alors dites-moi, maintenant : ou
sont les reliques ?
    Jean releva la tête.
    Il resta muet.
    Aguilah se tourna vers le bourreau, se passa
une main sur les lèvres, puis dit :
    — Arrachez-lui les ongles, s’il vous
plaît. Arrachez-lui un à un, et qu’il implore chaque fois le Seigneur d’un
Notre Père.
    Le bourreau, croc de fer entre les doigts, écarquilla
les yeux.
    Aguilah répéta :
    — Cet hérétique a tranché il y a quelque
temps les mains de mon cousin, Frère Guillaume. Assurons-nous qu’il ne pourra
plus user des siennes.

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